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Summary
# Les notions fondamentales de droits et libertés
Cette section explore la définition des droits et libertés fondamentaux et des concepts connexes, ainsi que les distinctions entre diverses notions voisines [4](#page=4).
### 1.1 Définition des notions clés
Les termes "droits et libertés fondamentaux" désignent de manière doctrinale soit les droits porteurs de valeurs fondamentales (approche substantialiste), soit les droits énoncés dans une norme de rang fondamental dans l'ordre juridique, c'est-à-dire au niveau constitutionnel ou conventionnel (approche normativiste) [4](#page=4).
#### 1.1.1 Droits de l'homme
En droit international et européen, cette expression est générique et désigne les droits consacrés dans les conventions relatives aux droits de l'homme. En droit interne français, elle renvoie à la conception jusnaturaliste des droits découlant de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 [4](#page=4).
#### 1.1.2 Libertés publiques
Cette notion désigne les droits et libertés dégagés par le Conseil d'État, de valeur législative, depuis la IIIe République. Leur respect s'impose aux autorités étatiques. Un exemple est le droit au recours pour excès de pouvoir, dégagé dans l'arrêt CE, Ass., 1950, Lamotte [4](#page=4).
#### 1.1.3 Principes fondamentaux
Dans un sens large, cette notion renvoie aux principes structurant l'ordre juridique, tels que la liberté, l'égalité et la fraternité. Dans un sens plus étroit, elle désigne les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR). Il s'agit de principes issus d'une norme législative antérieure à 1946, mise en œuvre de manière continue et portant sur une règle générale et essentielle à la Nation. La liberté d'association est un exemple de PFRLR identifié par le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1971 [4](#page=4).
### 1.2 Distinctions des notions voisines
#### 1.2.1 Liberté vs droit
Une **liberté** est une prérogative ancrée dans la sphère d'autonomie du sujet de droit, conférant un pouvoir d'autodétermination, comme la liberté d'expression ou de manifestation. Un **droit** est une prérogative attribuée par une autorité, dont le sujet de droit peut invoquer le bénéfice auprès de cette autorité, comme le droit à la santé ou le droit au respect de la vie privée [4](#page=4).
#### 1.2.2 Droits et libertés fondamentaux vs "Liberté fondamentale" (art. L. 521-2, c. justice adm.)
Les **droits et libertés fondamentaux** sont ceux porteurs de valeurs fondamentales ou consacrés dans une norme de rang fondamental. La **"liberté fondamentale"** (au sens de l'article L. 521-2 du CJA) désigne l'ensemble des droits et libertés identifiés par le Conseil d'État comme tels, pouvant être invoqués dans le cadre d'un référé-liberté [4](#page=4).
#### 1.2.3 Liberté individuelle vs Libertés personnelles
La **liberté individuelle** est le droit de ne pas être soumis arbitrairement à la contrainte physique, relevant de la compétence du juge judiciaire. Les **libertés personnelles** englobent l'ensemble des prérogatives, autres que la liberté individuelle, dont les sujets de droit sont titulaires [4](#page=4).
### 1.3 Typologie des libertés et des droits fondamentaux
#### 1.3.1 Classification selon l'objet
* **Droit-autonomie (ou droit de)**: prérogative visant à la protection d'un pouvoir d'émancipation de l'autorité publique (ex.: droit d'aller et venir) [5](#page=5).
* **Droit-créance (ou droit à)**: prérogative visant à l'obtention d'une prestation de l'autorité publique (ex.: droit au travail) [5](#page=5).
#### 1.3.2 Classification selon la génération
* **Droits de première génération**: issus de l'esprit révolutionnaire de 1789, ils protègent l'autodétermination du sujet de droit face à l'État (ex.: droit à la liberté d'expression) [5](#page=5).
* **Droits de deuxième génération**: issus d'un esprit socialisant et égalitariste (milieu du XXe siècle), ils impliquent des prestations de l'État (droits-créances) [5](#page=5).
* **Droits de troisième génération**: issus de la globalisation de la fin du XXe et début du XXIe siècle, ils visent la protection de l'Humanité et de son environnement (ex.: droit à un environnement sain) [5](#page=5).
#### 1.3.3 Classification selon les obligations des autorités
* **Obligation négative**: devoir pour les autorités de s'abstenir de toute action contraire aux droits [5](#page=5).
* **Obligation positive**: devoir pour les autorités de mettre en œuvre les moyens raisonnablement exigibles pour prévenir ou remédier aux situations contraires aux droits [5](#page=5).
#### 1.3.4 Critères secondaires de distinction
* **Titulaires**: peuvent être des personnes physiques (nationaux ou étrangers) ou des personnes morales (syndicat, société, etc.) [5](#page=5).
* **Intensité du contrôle juridictionnel**: en l'absence de hiérarchie stricte, les conflits sont résolus par la recherche d'un juste équilibre. Le contrôle juridictionnel dépend de la nature des droits [5](#page=5):
* **Droits absolus**: ne peuvent faire l'objet de dérogation ou d'exception (ex.: droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants) [5](#page=5).
* **Droits non absolus**: peuvent être limités par l'État si la limite est proportionnée (ex.: droit au respect de la vie privée). Le contrôle repose sur le principe de proportionnalité, souvent appliqué via un triple test: adéquation, nécessité et proportionnalité stricte [5](#page=5).
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# Sources et évolution des droits et libertés fondamentaux
Ce thème examine l'historique des libertés avant la Révolution française, leur développement depuis 1789, ainsi que les sources constitutionnelles, internationales et européennes qui les consacrent.
### 2.1 Les libertés avant la Révolution de 1789
L'émergence des droits et libertés fondamentaux trouve ses racines dans diverses périodes historiques, allant de l'Antiquité au XVIIIe siècle [6](#page=6).
#### 2.1.1 L'Antiquité
La pensée gréco-romaine a vu naître les premières formes de démocratie, caractérisées par le pouvoir du peuple, bien que de manière directe et inégalitaire. L'exclusion des femmes, des esclaves et des étrangers, ainsi que la variation du poids du vote selon la richesse, limitaient cette notion de pouvoir citoyen. Les prémices de la théorie du droit naturel se font également sentir, liant la Cité à l'homme et les droits à la citoyenneté. Le christianisme a apporté une contribution significative en consacrant la dignité de chaque individu, indépendamment de toute distinction, et en affirmant l'idée de liberté humaine, impliquant la responsabilité des actes [6](#page=6).
#### 2.1.2 Le Moyen-Âge
Au Moyen-Âge, la légitimité du pouvoir politique fut subordonnée à Dieu, donnant naissance au droit de résistance à un gouvernement injuste, comme le soutenait Saint Thomas d'Aquin. Les légistes ont développé l'exigence pour le souverain de poursuivre le bien commun à travers des lois fondamentales s'imposant au Roi. Une forme de droit des libertés a émergé avec la reconnaissance de libertés concédées par les seigneurs locaux ou consacrées dans des textes royaux, tels que la Magna Carta de 1215. Des juridictions furent également instituées pour veiller au respect de ces lois fondamentales [6](#page=6).
#### 2.1.3 L'Ancien Régime et les Lumières
Les Lumières ont marqué une progression décisive des idées sur le droit naturel, le concevant comme inhérent à la nature humaine, indépendamment de toute appartenance sociale ou politique. La notion de contrat social s'est développée, une fiction juridique postulant que les individus renoncent à certaines libertés pour déléguer le pouvoir de gouverner à des représentants, en vue d'assurer la paix et le bien commun. En France, l'édit de Nantes de 1598 a accordé des libertés de conscience et de culte aux protestants, bien que les avancées législatives aient été limitées. En Angleterre, la Petition of Rights de 1628 a prohibé les détentions illégales, et l'Habeas Corpus de 1679 a constitutionnalisé ces droits, établissant le droit d'être présenté devant un juge et le droit à réparation en cas d'arbitraire. Le Bill of Rights de 1689 a fondamentalement subordonné le pouvoir royal au respect de ces droits, marquant la fin de la royauté de droit divin [6](#page=6).
### 2.2 Les libertés depuis la Révolution de 1789
La Révolution française a constitué un tournant majeur dans la consécration et l'évolution des droits et libertés fondamentaux.
#### 2.2.1 L'héritage de la Révolution de 1789
La Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 a proclamé des droits universels et naturels, inhérents à la nature humaine, et a exigé la légalité des atteintes qui leur seraient portées. La Déclaration de 1793 a introduit des droits-créances à la charge de l'État, tels que le secours aux indigents et le droit à l'instruction. L'abolition de l'esclavage a été décrétée en France et dans ses colonies le 4 février 1794 [7](#page=7).
#### 2.2.2 Une marche contrariée des libertés
Le XIXe siècle a connu une éclipse des droits de l'homme en raison de régimes autoritaires. Des critiques contre-révolutionnaires ont contesté l'universalisme des droits, le considérant comme une fiction face aux inégalités sociales. La critique marxiste a avancé que les libertés proclamées étaient formelles, masquant une dépendance et une aliénation concrètes des individus. Le totalitarisme a directement nié les droits de l'homme et la primauté de l'individu [7](#page=7).
L'œuvre républicaine a tenté de rétablir un équilibre. La IIe République a instauré une philosophie d'équilibre entre liberté et égalité, ajoutant une dimension fraternelle, comme l'interdiction de pratiquer l'esclavage même à l'étranger. La IIIe République a été une ère de libertés consacrées par des lois républicaines, incluant la liberté de réunion la liberté de la presse la liberté syndicale et la liberté d'association ainsi que la séparation des Églises et de l'État. Ces avancées ont préfiguré les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et les libertés publiques reconnues par le Conseil d'État [7](#page=7).
#### 2.2.3 Renouveau après la Seconde Guerre mondiale
La protection des droits et libertés a connu un renforcement considérable après la Seconde Guerre mondiale, notamment par l'internationalisation de leur protection [7](#page=7).
* **Système international:** La Déclaration universelle des droits de l'homme a été adoptée en 1948. Les Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques (PIDCP) et aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) sont entrés en vigueur en 1966, supervisés par des comités spécifiques. Diverses conventions sectorielles et catégorielles, comme la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la convention relative aux droits de l'enfant ont été adoptées. Le droit humanitaire a également connu un essor avec les Conventions de Genève de 1949 [7](#page=7).
* **Système régional:** En Europe, la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) de 1950, relevant du Conseil de l'Europe, est protégée par la Cour européenne des droits de l'homme. La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, issue du traité de Lisbonne de 2007, fait partie du cadre de l'Union européenne. Des systèmes régionaux existent également en Amérique (Convention américaine des droits de l'homme) et en Afrique (Charte africaine des droits de l'homme et des peuples) [8](#page=8).
Au niveau national, la IVe République a intégré des droits-créances dans le Préambule de sa Constitution de 1946. Sous la Ve République, le Préambule de la Constitution de 1958 renvoie à plusieurs textes fondateurs, dont la Déclaration de 1789, le Préambule de 1946 et la Charte de l'environnement de 2004. Le Conseil Constitutionnel, créé en 1958, est devenu un garant des libertés et droits constitutionnels en France [8](#page=8).
#### 2.2.4 Ambivalences de la période actuelle
La période actuelle est marquée par une tendance à la limitation des libertés au nom de la sécurité publique et de la lutte contre le terrorisme, avec une intégration progressive des restrictions du régime d'exception dans le droit commun. L'émergence d'une quatrième génération de droits vise à protéger la personne humaine contre les dangers liés aux progrès technologiques, tels que les manipulations génétiques ou la surveillance automatisée [8](#page=8).
### 2.3 Les sources constitutionnelles
Les sources constitutionnelles des droits et libertés en France sont structurées autour du « bloc de constitutionnalité ».
#### 2.3.1 Le bloc de constitutionnalité
Ce terme, d'origine doctrinale, désigne l'ensemble des normes de rang constitutionnel qui s'imposent à la hiérarchie des normes juridiques en France. La décision du Conseil constitutionnel de 1971, « Liberté d'association », est considérée comme fondatrice de cette notion. Ces normes constitutionnelles priment sur les conventions internationales (article 55 de la Constitution de 1958) et les lois. Les conflits entre normes conventionnelles et constitutionnelles sont résolus au profit de la norme constitutionnelle par les juges administratifs et judiciaires. Les lois sont soumises au respect des normes constitutionnelles, ce que vérifie le Conseil constitutionnel lors de ses contrôles a priori et a posteriori (QPC). Les actes administratifs sont également soumis au contrôle de conformité aux normes constitutionnelles [11](#page=11).
#### 2.3.2 Normes faisant partie du « bloc de constitutionnalité »
Le bloc de constitutionnalité comprend des normes textuelles et non-textuelles.
* **Normes textuelles :**
* Le **Corps de la Constitution de 1958**: contient des articles mentionnant des droits de manière sporadique (ex.: liberté individuelle à l'article 66) [11](#page=11).
* Le **Préambule de la Constitution de 1958**: renvoie à la DDHC de 1789, au Préambule de 1946 et à la Charte de l'environnement de 2004, et est formellement inclus dans le bloc de constitutionnalité depuis 1971 [11](#page=11).
* La **Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789**: consacre des droits civils et politiques et est incluse dans le bloc de constitutionnalité depuis 1973 [11](#page=11).
* Le **Préambule de la Constitution de 1946**: énumère les principes particulièrement nécessaires à notre temps (PPNT) et identifie les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) [11](#page=11).
* Les **Principes particulièrement nécessaires à notre temps (PPNT)**: droits économiques, sociaux et culturels tels que l'égalité homme-femme, le droit au travail, la liberté syndicale et le droit de grève [11](#page=11).
* Les **Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR)**: principes issus de lois républicaines antérieures à 1946, mis en œuvre de manière continue et visant une règle générale et essentielle. Des exemples incluent la liberté d'association, la liberté d'enseignement et l'indépendance de la juridiction administrative [11](#page=11) [12](#page=12).
* La **Charte de l'environnement de 2004**: consacre le droit de chacun à vivre dans un environnement sain, reposant sur les principes de prévention et de précaution [12](#page=12).
* **Normes non-textuelles :**
* **Principes de valeur constitutionnelle (PVC)**: normes dégagées par le Conseil constitutionnel sans fondement textuel direct, consacrant des libertés et droits fondamentaux comme la continuité du service public [12](#page=12).
* **Objectifs de valeur constitutionnelle (OVC)**: normes identifiées par le Conseil constitutionnel, visant à limiter l'exercice des libertés et droits fondamentaux, comme la sauvegarde de l'ordre public [12](#page=12).
### 2.4 Les sources internationales
Le droit international joue un rôle crucial dans la protection des droits et libertés fondamentaux.
#### 2.4.1 Droit international général
Le droit international général reconnaît plusieurs sources normatives.
* **Notions :**
* **Convention**: Accord entre sujets de droit international, régi par le droit international et liant les parties [13](#page=13).
* **Coutume**: Norme générale opposable à tous les États, découlant d'une pratique fréquente et perçue comme obligatoire [13](#page=13).
* **Principe général de droit**: Norme issue de la convergence des ordres juridiques nationaux et de leur transposition dans l'ordre juridique international [13](#page=13).
* **Principe général du droit**: Norme structurante de l'ordre juridique international, comme l'égalité entre les États [13](#page=13).
* **Jus cogens**: Norme impérative et indérogeable reconnue par la communauté internationale, protégeant des intérêts fondamentaux, telle que la prohibition de la torture ou de l'esclavage [13](#page=13).
* **Instruments :**
* **Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948**: Texte déclaratif sans valeur conventionnelle, posant une matrice des droits inhérents à l'homme, destinée à être déclinée dans des conventions universelles, régionales et spéciales [13](#page=13).
* **Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 (PIDCP)**: Consacre les droits civils et politiques et repose sur la protection du Comité des droits de l'homme [13](#page=13).
* **Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 (PIDESC)**: Consacre les droits économiques, sociaux et culturels et repose sur la protection du Comité des droits économiques, sociaux et culturels [13](#page=13).
#### 2.4.2 Droit international spécial
Ce droit traite de la protection des droits humains dans des contextes spécifiques.
* **Notions :**
* **Droit international des droits de l'homme**: Oblige les États à garantir les droits reconnus aux personnes sous leur juridiction [13](#page=13).
* **Droit international humanitaire**: Régit l'activité des États en période de conflits armés [13](#page=13).
* **Droit international pénal**: Répime les activités portant atteinte aux principes fondamentaux du droit humanitaire et des droits de l'homme [13](#page=13).
* **Instruments :**
* **Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948**: Prohibe le génocide et oblige les États parties à le prévenir et le réprimer [13](#page=13).
* **Convention contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants de 1984**: Prohibie la torture et impose des mesures positives pour la prévenir [13](#page=13).
* **Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979**: Consacre les droits des femmes sur le principe de non-discrimination [14](#page=14).
* **Convention internationale relative aux droits de l’enfant de 1989**: Consacre les droits des enfants sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant [14](#page=14).
### 2.5 Les sources européennes
Le droit européen, tant au niveau du Conseil de l'Europe qu'au niveau de l'Union européenne, offre des cadres de protection des droits et libertés.
#### 2.5.1 Droit du Conseil de l'Europe
Le Conseil de l'Europe, créé en 1949, a pour objectif la protection des droits de l'homme, de la démocratie et de la prééminence du droit en Europe [15](#page=15).
* **Instruments :**
* **Convention européenne des droits de l'homme (CEDH)**: Protège les droits civils et politiques et repose sur le mécanisme de la Cour européenne des droits de l'homme. Les droits consacrés sont universels, leur protection repose sur les principes d'effectivité et d'actualité, et leur garantie est objective. La CEDH est considérée comme l'« instrument constitutionnel de l’ordre public européen » [15](#page=15).
* **Charte sociale européenne**: Consacre les droits économiques, sociaux et culturels, protégés par un mécanisme de recommandation devant le Comité européen des droits sociaux [15](#page=15).
#### 2.5.2 Droit de l'Union européenne
L'Union européenne, issue du Traité de Rome de 1957, vise la coopération économique et politique entre les États membres [15](#page=15).
* **Instruments :**
* **Principes généraux du droit de l'Union européenne**: Dégagés par la Cour de justice de l'Union européenne, ils s'inspirent des traditions constitutionnelles communes et de la CEDH [15](#page=15).
* **Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne**: Proclamée en 2000 et entrée en vigueur en 2009, elle consacre les droits fondamentaux et contraint les institutions européennes ainsi que les États membres lors de la mise en œuvre du droit de l'Union européenne [15](#page=15).
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# Protection institutionnelle des droits et libertés
Voici une synthèse détaillée sur la protection institutionnelle des droits et libertés, conçue pour être un outil d'étude complet.
## 3. La protection institutionnelle des droits et libertés
Cette section explore les mécanismes et les institutions, tant au niveau international qu'au niveau national, qui visent à garantir et à protéger les droits et libertés fondamentaux.
### 3.1 Les juridictions pénales internationales
Les juridictions pénales internationales sont chargées de juger les crimes les plus graves qui relèvent du droit international. Elles peuvent être divisées en plusieurs catégories en fonction de leur temporalité et de leur rattachement [16](#page=16).
#### 3.1.1 Tribunaux militaires internationaux
Ces tribunaux étaient des juridictions pénales internationales temporaires, créées pour juger des crimes commis lors de conflits armés internationaux.
* **Tribunal de Nuremberg:** Établi par l'Accord de Londres du 8 août 1945, il visait à juger les "grands criminels de guerre des pays européens de l'Axe", sans limitation géographique [16](#page=16).
* **Tribunal de Tokyo (pour l'Extrême-Orient):** Mis en place par la Proclamation spéciale du 16 janvier 1946, il avait pour objectif la poursuite et le châtiment des grands criminels de guerre [16](#page=16).
#### 3.1.2 Tribunaux pénaux internationaux
Créés dans le cadre des Nations Unies, ces tribunaux étaient également temporaires et avaient pour mission de juger des crimes contre l'humanité, de guerre et de génocide.
* **Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY):** Instauré par la Résolution 827 du Conseil de Sécurité en 1993, il était compétent pour les agissements commis à compter du 1er janvier 1991 sur le territoire de l'ex-Yougoslavie [16](#page=16).
* **Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR):** Créé par la Résolution 955 du Conseil de Sécurité en 1994, il s'occupait des crimes commis entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 au Rwanda et par des ressortissants rwandais dans des États voisins [16](#page=16).
#### 3.1.3 Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux
Ce mécanisme, créé par la Résolution 1966 du Conseil de Sécurité en 2010, a pour rôle de prendre la suite du TPIY et du TPIR une fois leur mandat achevé [16](#page=16).
#### 3.1.4 Tribunaux pénaux "internationalisés"
Il s'agit de juridictions intégrées à l'ordre juridique interne d'un État, mais dont la procédure et la compétence sont régies par le droit international. Des exemples incluent le Tribunal Spécial pour la Sierra Leone (TSSL) et les Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux Cambodgiens (CETC) [16](#page=16).
#### 3.1.5 Cour pénale internationale (CPI)
La CPI est une juridiction pénale internationale permanente, établie par le Statut de Rome en 1998. Elle juge les crimes contre l'humanité, le génocide, les crimes de guerre et d'agression commis depuis le 1er juillet 2002 par des ressortissants ou sur le territoire d'un État partie au Statut de Rome. Sa compétence est *complémentaire* à celle des juridictions nationales, intervenant en cas de manque de volonté ou de capacité des États à juger les auteurs présumés [16](#page=16).
#### 3.1.6 Crimes de droit pénal international
Le droit pénal international définit plusieurs catégories de crimes particulièrement graves :
* **Génocide:** Actes visant à détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, incluant le meurtre, l'atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale, la stérilisation ou l'avortement forcé, le transfert forcé d'enfants, et la soumission à des conditions de vie destinées à entraîner la destruction du groupe [16](#page=16).
* **Crime contre l'humanité:** Meurtre, extermination, réduction en esclavage, déportation ou transfert forcé de population, emprisonnement, torture, viol, esclavage sexuel, persécution, disparition forcée, crime d'apartheid ou autres actes inhumains, commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique contre une population civile [16](#page=16).
* **Crime de guerre:** Infractions graves aux Conventions de Genève de 1949 et aux lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux [16](#page=16).
* **Crime d'agression:** Planification, préparation, lancement ou exécution d'un acte d'agression constituant une violation manifeste de la Charte des Nations Unies, par une personne apte à diriger l'action politique ou militaire d'un État [16](#page=16).
### 3.2 La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH)
La CEDH est une institution clé dans la protection des droits de l'homme en Europe, veillant à l'application de la Convention européenne des droits de l'homme.
#### 3.2.1 Organisation de la Cour
* **Juges:** La Cour compte 46 membres, un par État partie, élus par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe pour un mandat de neuf ans non renouvelable. Le président est élu par la Cour en assemblée plénière [17](#page=17).
* **Formations de jugement :**
* **Juge unique:** Traite les demandes de mesures provisoires et les requêtes manifestement irrecevables [17](#page=17).
* **Comité de trois juges:** Statue sur la recevabilité et/ou le fond des requêtes lorsque la jurisprudence est bien établie [17](#page=17).
* **Chambre:** Composée de sept juges, elle juge les requêtes transmises ou qui lui sont directement allouées. L'arrêt devient définitif sauf si un renvoi devant la Grande Chambre est demandé et accepté [17](#page=17).
* **Grande Chambre:** Comprenant dix-sept juges, elle statue sur les affaires dont la Chambre s'est dessaisie ou sur renvoi [17](#page=17).
* **Requêtes :**
* **Requête interétatique:** Introduite par un État partie contre un autre [17](#page=17).
* **Requête individuelle:** Introduite par un individu contre un État partie [17](#page=17).
#### 3.2.2 Procédures particulières
* **Procédure de l'arrêt pilote:** Utilisée lorsque la violation trouve son origine dans un problème systémique et structurel, la Cour donne des indications à l'État pour remédier au dysfonctionnement [17](#page=17).
* **Procédure de règlement amiable:** Une forme de conciliation dont l'effet est de radier l'affaire du rôle si les parties parviennent à un accord [17](#page=17).
* **Demande de satisfaction équitable:** Demande de réparation forfaitaire pour un dommage subi, lorsque le droit interne ne permet pas de le réparer [17](#page=17).
#### 3.2.3 Jurisprudence de la Cour
* **Notion autonome:** La définition des termes utilisés dans la Convention est propre au droit de la Convention et indépendante des définitions nationales [17](#page=17).
* **Obligation positive:** Les États ont l'obligation de prendre des mesures raisonnablement exigibles pour prévenir ou remédier aux situations contraires aux droits conventionnels [17](#page=17).
* **Violation virtuelle:** Une violation caractérisée par le risque qu'une situation fait peser sur le requérant, même si la violation n'a pas encore eu lieu (ex.: expulsion vers un État où le risque de torture est avéré) [17](#page=17).
* **Nécessité dans une société démocratique:** Test de proportionnalité utilisé par la Cour pour vérifier si une mesure est nécessaire pour atteindre un but légitime sans être excessive [17](#page=17).
* **Autorité de la chose jugée:** Les décisions de la Cour sont obligatoires pour les États parties au litige, qui doivent en tirer les conséquences pour réparer et prévenir de futures violations, sous la surveillance du Comité des Ministres [17](#page=17).
### 3.3 Les recours devant la Cour européenne des droits de l’homme
La CEDH offre deux voies de recours principales pour la protection des droits et libertés.
#### 3.3.1 Le recours interétatique
Ce recours, prévu par l'article 33 de la Convention, permet à un État partie de saisir la Cour pour alléguer la violation par un autre État de ses obligations conventionnelles [18](#page=18).
#### 3.3.2 Le recours individuel
Ouvert à toute personne sous la juridiction d'un État partie (article 34 de la Convention), ce recours est obligatoire depuis 1998 et constitue un véritable droit de recours international [18](#page=18).
##### 3.3.2.1 Conditions tenant au requérant
* **Personne:** Peut être une personne physique (seule ou en groupe) ou une personne morale si elle est une "organisation non gouvernementale" [18](#page=18).
* **Qualité de victime :**
* **Catégories de victimes:** Directe (directement affectée) ou indirecte (proche d'une personne décédée). Une victime peut être potentielle si le risque de violation est avéré et le dommage irréversible [18](#page=18).
* **Perte de la qualité de victime:** En cas de reconnaissance de la violation par les autorités et de réparation du préjudice [18](#page=18).
##### 3.3.2.2 Conditions tenant à la procédure
* **Épuisement des voies de recours internes:** Le requérant doit avoir exercé les recours disponibles et efficaces en droit national, et avoir invoqué les griefs conventionnels devant les instances nationales [18](#page=18).
* **Délai de saisine de la Cour:** Le délai est passé de six à quatre mois à compter de la dernière décision interne définitive, suite à l'entrée en vigueur du Protocole n° 15 [18](#page=18).
* **Abus de droit:** L'exercice d'un droit détourné de sa finalité ou visant à nuire à autrui constitue un obstacle procédural [18](#page=18).
##### 3.3.2.3 Conditions tenant à la compétence de la Cour
* **Compétence ratione materiae:** La Cour est compétente pour examiner le respect des droits protégés par la Convention européenne des droits de l'homme [19](#page=19).
* **Compétence ratione personae:** La Cour examine le respect des obligations par un État partie à l'égard d'une personne sous sa juridiction, c'est-à-dire une personne sur laquelle l'État exerce son autorité ou son contrôle [19](#page=19).
* **Compétence ratione loci:** En général, une personne est sous la juridiction d'un État si elle se trouve sur son territoire [19](#page=19).
* **Compétence ratione temporis:** La Cour est compétente pour les situations se déroulant à partir de la ratification de la Convention ou de ses Protocoles par l'État partie [19](#page=19).
##### 3.3.2.4 Conditions tenant au fond
* **Absence de défaut manifeste de fondement:** Une requête est irrecevable si elle ne révèle aucune violation apparente de la Convention [19](#page=19).
* **Existence d'un préjudice important:** Une requête est irrecevable si le préjudice subi est mineur, sauf si le respect des droits de l'homme exige un examen [19](#page=19).
### 3.4 Le Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel est une institution centrale dans le contrôle de la constitutionnalité des normes en France.
#### 3.4.1 Composition
Le Conseil est composé de membres de droit (anciens Présidents de la République) et de neuf membres nommés pour un mandat de neuf ans irrévocable et non renouvelable. Trois sont nommés par le Président de la République, trois par le Président du Sénat, et trois par le Président de l'Assemblée Nationale [20](#page=20).
#### 3.4.2 Compétences
* **Compétence consultative:** Avis sur la mise en œuvre de l'article 16 de la Constitution (pouvoirs exceptionnels) [20](#page=20).
* **Compétence juridictionnelle:** Juge électoral pour l'élection présidentielle, les élections législatives et les référendums, et contrôle des mandats électoraux [20](#page=20).
* **Contrôle de constitutionnalité :**
* Règlements des assemblées parlementaires (obligatoire) [20](#page=20).
* Lois organiques (contrôle a priori obligatoire) [20](#page=20).
* Lois ordinaires (contrôle a priori et a posteriori facultatifs) [20](#page=20).
* Lois référendaires (incompétence du Conseil) [20](#page=20).
* Engagements internationaux (contrôle avant ratification ou approbation) [20](#page=20).
#### 3.4.3 Contrôle de constitutionnalité des lois
* **Contrôle a priori:** Conformité à la Constitution après le vote et avant la promulgation de la loi [20](#page=20).
* **Contrôle a posteriori:** Conformité aux droits et libertés des lois en vigueur, dans le cadre d'un litige [20](#page=20).
#### 3.4.4 Saisine
* **Contrôle a priori:** Initialement réservée aux plus hautes autorités de l'État, la saisine est désormais possible par 60 députés ou 60 sénateurs [20](#page=20).
* **Contrôle a posteriori:** Instauration de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) transmise par les juridictions ordinaires sur demande du justiciable [20](#page=20).
#### 3.4.5 Techniques de contrôle
* **Effet cliquet:** Le législateur ne peut pas réduire le niveau de protection des droits et libertés une fois qu'il a été établi [20](#page=20).
* **Garanties légales:** Le législateur ne peut pas créer un régime moins protecteur que celui prévu par la Constitution, ni omettre les garanties essentielles [20](#page=20).
* **Réserve d'interprétation:** Indication par le Conseil du sens à donner à une disposition législative validée [20](#page=20).
* **Types de contrôle:** Dénaturation, erreur manifeste d'appréciation, ou triple test [20](#page=20).
### 3.5 La Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC)
La QPC est un outil majeur pour le contrôle de constitutionnalité a posteriori.
#### 3.5.1 La procédure de QPC
Créée par la réforme de 2008 (article 61-1 de la Constitution), la QPC permet de contrôler la conformité d'une disposition législative aux droits et libertés garantis par la Constitution dans le cadre d'un litige [21](#page=21).
* **Transmission de la QPC aux juridictions suprêmes :**
* Une QPC peut être posée durant toute instance, par un écrit distinct et motivé [21](#page=21).
* La juridiction saisie du litige l'examine sans délai et la transmet au Conseil d'État ou à la Cour de cassation si la disposition est applicable au litige, n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution, et si la QPC n'est pas dépourvue de caractère sérieux [21](#page=21).
* La juridiction sursoit à statuer jusqu'à réception de la décision des juridictions suprêmes [21](#page=21).
* **Renvoi de la QPC par les juridictions suprêmes au Conseil constitutionnel :**
* Les juridictions suprêmes statuent dans un délai de trois mois; à défaut, la QPC est automatiquement renvoyée au Conseil constitutionnel [21](#page=21).
* La QPC est transmise au Conseil constitutionnel si la disposition est applicable, n'a pas déjà été déclarée conforme, et si la QPC est nouvelle ou présente un caractère sérieux [21](#page=21).
#### 3.5.2 Décision du Conseil constitutionnel
Si le Conseil constitutionnel déclare une disposition inconstitutionnelle, il peut l'abroger ou reporter ses effets pour protéger un objectif d'intérêt général [21](#page=21).
#### 3.5.3 Les termes de la QPC
* **Disposition législative:** L'objet du contrôle peut être une loi ordinaire, organique, une ordonnance ratifiée, une loi du pays, ou les interprétations constantes de la jurisprudence des juridictions suprêmes. Les lois référendaires et les révisions constitutionnelles sont exclues du contrôle [21](#page=21).
* **Droits et libertés garantis par la Constitution:** Le contrôle s'opère uniquement à l'égard des droits et libertés garantis par la Constitution, excluant les normes constitutionnelles qui n'en protègent pas [21](#page=21).
### 3.6 L’indépendance des juridictions
L'indépendance des juridictions est un pilier de l'État de droit, assurant une justice impartiale.
#### 3.6.1 Corps judiciaire
* **Magistrat :**
* **Du siège:** Le juge, qui tranche les litiges sur la base du droit [22](#page=22).
* **Du parquet:** Le procureur, conseiller-rapporteur, avocat général, qui participent à l'exercice de la fonction juridictionnelle mais sont sous l'autorité du garde des Sceaux, limitant leur indépendance au sens de l'article 5 § 3 de la CEDH [22](#page=22).
* **Droit à un procès équitable:** Ensemble de garanties procédurales (art. 14 PIDCP, art. 6 CEDH, art. 47 Charte UE) assurant la composition du tribunal, l'accès et le déroulement de l'instance [22](#page=22).
* **Principes de valeur constitutionnelle :**
* **Indépendance de l'autorité judiciaire:** Possibilité de prendre des décisions à l'abri de toute instruction ou pression [22](#page=22).
* **Inamovibilité des magistrats du siège:** Garantie constitutionnelle [22](#page=22).
* **Égalité de traitement dans l'accès à la magistrature:** Principe d'accès aux emplois publics [22](#page=22).
* **Impartialité des magistrats:** Absence de préjugé ou de préjugement de l'affaire [22](#page=22).
#### 3.6.2 Juridictions administratives
* **Juges administratifs:** Ils appartiennent à deux corps distincts: les conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et les conseillers d'État [22](#page=22).
* **Dualisme juridictionnel:** Principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, inspiré par le principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) d'indépendance de la juridiction administrative [22](#page=22).
* **Indépendance des juridictions administratives:** Reconnue implicitement par la loi de 1872 portant réorganisation du Conseil d'État [22](#page=22).
* **Dualisme fonctionnel:** Le Conseil d'État exerce à la fois une fonction consultative et contentieuse, ce qui n'est pas contraire à l'impartialité si les juges des formations de jugement n'ont pas siégé dans les formations consultatives sur la même affaire [22](#page=22).
* **Rapporteur public:** Anciennement "commissaire du Gouvernement", il exprime une opinion juridique. Son ancienne participation au délibéré et l'absence de communication de ses conclusions ont été jugées contraires aux principes d'égalité des armes et de contradictoire [22](#page=22).
### 3.7 L’autorité judiciaire
L'autorité judiciaire est le "gardienne de la liberté individuelle" et joue un rôle essentiel dans la protection des droits et libertés.
#### 3.7.1 Juge naturellement protecteur des droits et libertés fondamentaux
* **Autorité judiciaire:** Ensemble des magistrats, juridictions et organes concourant au pouvoir de juger. Elle est la "gardienne de la liberté individuelle" (article 66 de la Constitution) [23](#page=23).
* Elle contrôle la *conventionnalité* des lois (Ch. mixte, 1975, *Jacques Vabre*), mais pas leur constitutionnalité. En cas d'inconventionnalité, le juge écarte la loi [23](#page=23).
#### 3.7.2 Juge civil
Le juge civil peut être saisi de recours, notamment par la voie du référé, concernant :
* Le droit de propriété, défini comme le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue [23](#page=23).
* Les droits conventionnels, qui produisent leurs effets dans les rapports privés, comme le droit au respect de la vie privée [23](#page=23).
#### 3.7.3 Juge pénal
Le juge pénal détermine la culpabilité et fixe la sanction, limitant l'exercice de la liberté de l'auteur. Il protège ainsi d'autres libertés fondamentales en réprimant les entraves [23](#page=23).
#### 3.7.4 Juge assurant la protection des droits et libertés contre l’administration
* **Gardien de la liberté individuelle:** Le juge judiciaire est compétent pour se prononcer sur la légalité des décisions administratives portant gravement atteinte à la liberté individuelle, dans la limite du droit à la sûreté [23](#page=23).
* **Censeur de la voie de fait:** Le juge judiciaire est compétent lorsque l'administration porte atteinte à une liberté individuelle ou à un droit de propriété en manifestant être sortie de ses attributions. Le juge administratif peut être compétent en référé-liberté [23](#page=23).
* **Protecteur de la propriété privée:** Le juge judiciaire intervient dans les procédures d'expropriation et en cas d'emprise irrégulière de l'administration, pour statuer sur l'indemnisation du préjudice [23](#page=23).
### 3.8 Le juge administratif
Le juge administratif est un acteur essentiel dans la protection des libertés.
#### 3.8.1 Juge compétent pour protéger les libertés
* **Juridiction administrative:** Composée des tribunaux administratifs, des cours administratives d'appel et du Conseil d'État. Le juge administratif dispose d'une compétence constitutionnellement réservée en matière de réformation ou d'annulation des décisions des autorités publiques [24](#page=24).
* Il est "juge de la légalité" des actes administratifs et vérifie le respect des libertés constitutionnelles et conventionnelles [24](#page=24).
* Lorsque les normes existantes sont insuffisantes, il crée de nouvelles normes sous forme de principes généraux du droit [24](#page=24).
* Il contrôle la conventionnalité des lois et, en cas d'inconventionnalité, écarte la loi [24](#page=24).
* Il contrôle la constitutionnalité des actes administratifs, sauf si l'acte est prévu par une loi, auquel cas la loi fait "écran". L'écran peut être "transparent" si la loi ne fait que définir une compétence [24](#page=24).
#### 3.8.2 Juge contrôlant les atteintes portées par l’administration aux libertés
* **Atteintes causées par la police administrative:** Le juge contrôle la légalité externe (procédure, formalités) et interne (respect du principe de proportionnalité, nécessité de la mesure) des mesures de police [24](#page=24).
* **Atteintes résultant du service public:** Le juge vérifie que la création d'un service public à vocation économique est justifiée par un motif d'intérêt général et ne contrevient pas aux règles de concurrence [24](#page=24).
### 3.9 Les recours devant le juge administratif
Le juge administratif dispose de plusieurs recours pour garantir la légalité des actes administratifs et la protection des libertés.
#### 3.9.1 Juge de l’excès de pouvoir
* **Recours pour excès de pouvoir (REP):** Ce recours, ouvert même sans texte, vise à assurer le respect de la légalité de tout acte administratif [25](#page=25).
* **Conditions de recevabilité :**
* **Intérêt à agir:** Doit être direct, individuel, légitime, personnel, direct et certain [25](#page=25).
* **Délai:** Le recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la publication de la décision [25](#page=25).
* **Moyens invocables :**
* **Légalité externe:** Vice d'incompétence, vice de procédure, vice de forme [25](#page=25).
* **Légalité interne:** Erreur de droit, erreur sur les faits, erreurs de qualification juridique, détournement de pouvoir [25](#page=25).
* **Intensité du contrôle:** Le juge peut exercer un contrôle absent, restreint (bilan coûts-avantages), normal (entier), ou maximum (mieux adapté) [25](#page=25).
* **Effets du recours:** Une décision de rejet a une autorité relative, tandis qu'une décision d'annulation a une autorité absolue. L'annulation est rétroactive, sauf exception, et peut être différée ou expliquée [25](#page=25).
#### 3.9.2 Juge de l’urgence
* **Référé-suspension (article L. 521-1 du CJA):** Permet la suspension temporaire de l'exécution d'une décision administrative en cas de doute sérieux sur sa légalité et d'urgence [25](#page=25).
* **Référé-liberté (article L. 521-2 du CJA):** Procédure d'urgence permettant d'ordonner toutes mesures nécessaires pour mettre fin à une atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale. La notion de "liberté fondamentale" est définie par la jurisprudence du Conseil d'État [26](#page=26).
### 3.10 La protection non-juridictionnelle des libertés
Outre les recours juridictionnels, des garanties non-juridictionnelles existent tant au niveau interne qu'international.
#### 3.10.1 Les garanties non-juridictionnelles en droit interne
* **Droits de démocratie directe :**
* **Droit de résistance à l’oppression:** Droit naturel et imprescriptible de l'homme, incluant le droit à l'insurrection et à la désobéissance à un ordre manifestement illégal [27](#page=27).
* **Droit de pétition:** Possibilité de s'adresser aux pouvoirs publics et autorités constitutionnelles, aux électeurs d'une collectivité territoriale, et aux organes de l'Union Européenne [27](#page=27).
* **Institutions indépendantes :** Organismes agissant au nom de l'État sans relever du gouvernement.
* **Défenseur des droits:** Autorité constitutionnelle chargée de défendre les droits et libertés, avec des missions spéciales pour la protection des enfants, la lutte contre les discriminations, et la déontologie des forces de sécurité. Il dispose de pouvoirs d'information, de recommandation et de médiation [27](#page=27).
* **Contrôle général des lieux de privation de liberté (CGLPL):** Veille au respect des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, avec des droits de visite, d'accès à l'information, et la possibilité de formuler des recommandations ou d'initier des poursuites [27](#page=27).
* **Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL):** Assure la conformité des traitements de données personnelles aux lois et normes. Elle dispose de droits de contrôle et de sanctions pécuniaires [27](#page=27).
* **Commission d’accès aux documents administratifs (CADA):** Veille au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques, et au principe de transparence [27](#page=27).
#### 3.10.2 Les garanties non-juridictionnelles en droit international
* **Contrôle sur rapport:** Exercé par des comités onusiens à partir de rapports étatiques évaluant la conformité aux obligations conventionnelles. Ce contrôle peut concerner un rapport initial ou périodique [28](#page=28).
* **Contrôle sur plainte :** Exercé par des comités onusiens à l'occasion de communications alléguant des violations conventionnelles. Ces communications peuvent être :
* **Communications étatiques:** Un État partie peut dénoncer le non-respect d'une convention par un autre État partie [28](#page=28).
* **Communications individuelles:** Une personne peut saisir un comité d'une plainte contre un État partie, après épuisement des voies de recours internes [28](#page=28).
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# Protection effective des droits et limitations
Ce module explore les garanties procédurales essentielles à un procès équitable, ainsi que les restrictions qui peuvent s'appliquer aux droits, notamment dans le contexte de la lutte antiterroriste.
### 4.1 Le droit à un procès équitable
Le droit à un procès équitable constitue un ensemble de droits qui encadrent la composition du tribunal et le déroulement de la procédure judiciaire, qu'il s'agisse d'un litige civil, pénal, administratif, disciplinaire ou pénitentiaire. Le concept de tribunal, tel que défini par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), englobe tout organe établi par la loi, chargé de trancher des questions relevant de sa compétence sur la base de normes de droit et d'une procédure organisée [30](#page=30).
#### 4.1.1 Champ matériel du droit à un procès équitable (article 6 de la Convention EDH)
Le champ d'application de ce droit se divise en deux volets :
* **Volet civil:** Il concerne les procédures relatives à une "contestation en matière civile ou commerciale", c'est-à-dire un différend portant sur les droits reconnus par le droit interne et ayant des incidences patrimoniales [30](#page=30).
* **Volet pénal:** Il s'applique aux procédures concernant une "accusation en matière pénale". Ceci inclut la notification par une autorité compétente du reproche d'avoir commis une infraction pénale, qu'elle soit qualifiée comme telle en droit interne ou qu'elle contrevienne à une norme répressive ou dissuasive entraînant une sanction suffisamment grave [30](#page=30).
#### 4.1.2 Les garanties du procès équitable
Les garanties d'un procès équitable se déclinent en droits relatifs à la composition du tribunal et au déroulement de la procédure.
##### 4.1.2.1 Droits relatifs à la composition du tribunal
Ces droits, protégés par l'article 6 § 1 de la Convention EDH, incluent :
* **Garantie d'indépendance des juges:** L'indépendance doit être à la fois subjective (absence de pressions ou d'influences extérieures) et objective (apparence d'indépendance vis-à-vis des autres organes et des parties) [30](#page=30).
* **Garantie d'impartialité des juges:** L'impartialité doit être subjective (juger sans préjugé ni préjugement) et objective (garantir l'apparence d'impartialité) [30](#page=30).
##### 4.1.2.2 Droits relatifs au déroulement de la procédure
Ces droits comprennent :
* **Droit d'accès à un tribunal:** Il s'agit du droit de soumettre un différend à un tribunal disposant d'une compétence de "pleine juridiction". Ce droit n'est pas absolu et peut faire l'objet de restrictions proportionnées à un but légitime [30](#page=30).
* **Droit à l'aide juridictionnelle:** Ce droit garantit l'accès à l'aide juridictionnelle pour les parties dont les ressources ne permettent pas un accès effectif au tribunal [30](#page=30).
* **Droit à être jugé dans un délai raisonnable:** Les litiges doivent être résolus dans un délai proportionné à leur complexité et à leur enjeu, en tenant compte du comportement des parties et des autorités [30](#page=30).
* **Principe du contradictoire:** Il exige que chaque partie ait une possibilité effective de présenter les éléments nécessaires à ses prétentions, en discutant de toutes les pièces du dossier [31](#page=31).
* **Principe de l'égalité des armes:** Ce principe assure un juste équilibre entre les parties, garantissant qu'aucune partie ne se trouve en situation de désavantage significatif [31](#page=31).
* **Droits de la défense:** Spécifiques au procès pénal, ils incluent le droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, le droit à l'assistance d'un avocat et le droit à un interprète gratuit [31](#page=31).
* **Principe de la présomption d'innocence:** Il implique le droit pour tout accusé de ne pas subir les effets d'une déclaration de culpabilité avant qu'elle ne soit prononcée par une juridiction, et la charge de la preuve incombe à l'accusation [31](#page=31).
* **Principe de publicité des débats:** La publicité des audiences et des jugements assure la transparence de l'administration de la justice, avec des exceptions possibles pour protéger d'autres intérêts légitimes [31](#page=31).
* **Principe de loyauté de la preuve:** Il garantit la légalité dans l'administration de la preuve [31](#page=31).
##### 4.1.2.3 Droits relatifs à la décision de justice rendue
* **Droit à l'obtention d'une solution juridictionnelle:** Le droit d'obtenir une décision définitive à l'issue d'une procédure judiciaire [31](#page=31).
* **Principe non bis in idem:** L'interdiction d'être poursuivi ou puni une deuxième fois pour les mêmes faits par les juridictions du même État [31](#page=31).
* **Droit à la motivation des décisions de justice:** Les juges doivent permettre aux requérants de comprendre les raisons de la décision rendue [31](#page=31).
* **Prohibition du déni de justice:** Les décisions rendues ne doivent pas être arbitraires ou manifestement erronées [31](#page=31).
* **Droit à l'exécution du jugement:** Les autorités doivent veiller à ce que les décisions définitives produisent leurs effets [31](#page=31).
### 4.2 Le droit à l'exécution des décisions de justice
Le droit à l'exécution des décisions de justice garantit à la partie gagnante l'effectivité et la rapidité de l'application de la décision rendue. Ce droit n'est pas absolu et peut faire l'objet de restrictions proportionnées à un but légitime [32](#page=32).
#### 4.2.1 Moyens d'exécution des décisions de justice par le juge
* **Juge civil:** Dispose de pouvoirs d'injonction, d'astreinte, de prescription de mesures de protection, de coercition renforcée pour les affaires familiales, et peut recourir au concours de la force publique [32](#page=32).
* **Juge administratif:** Dispose de pouvoirs d'astreinte et d'injonction, pouvant être préventifs ou prononcés a posteriori pour assurer l'exécution d'une décision [32](#page=32).
* **Arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme:** Leur exécution est contrôlée par le Comité des ministres, qui invite l'État condamné à informer des mesures prises et peut saisir la Cour en cas de non-exécution [32](#page=32).
### 4.3 Le droit à la sûreté
Le droit à la sûreté, ou liberté individuelle, interdit la contrainte physique arbitraire ou illégale [33](#page=33).
#### 4.3.1 La rétention
La rétention peut intervenir dans le cadre de contrôles d'identité :
* **Contrôles d'identité administratifs:** Préventifs, visant à prévenir une atteinte à l'ordre public [33](#page=33).
* **Contrôles d'identité judiciaires:** Réalisés en cas de soupçon plausible d'infraction, de recherche de renseignements ou de personnes recherchées [33](#page=33).
* **Contrôles "Schengen":** Effectués aux frontières pour vérifier le respect des titres et documents prévus par la loi [33](#page=33).
* **Contrôles d'identité des étrangers:** Visent à vérifier les titres de séjour [33](#page=33).
La vérification d'identité prolongée peut entraîner une rétention, limitée au temps strictement nécessaire pour établir l'identité, avec notification au procureur de la République [33](#page=33).
#### 4.3.2 Garde à vue
La garde à vue est une mesure de contrainte où une personne soupçonnée d'une infraction est maintenue à la disposition des enquêteurs pour une durée limitée. Le gardé à vue bénéficie de droits fondamentaux, tels que le droit au silence, l'assistance d'un avocat et d'un interprète, l'aide juridictionnelle, un avis médical, et le droit de faire prévenir un proche [33](#page=33).
#### 4.3.3 La détention
* **Détention dans un établissement pénitentiaire :**
* **Détention provisoire:** Peut être prononcée en cours d'instruction ou après sa clôture, sous conditions strictes et contestable [34](#page=34).
* **Mesures de sûreté:** Visent à prévenir de nouvelles infractions et protéger la société, incluant l'inscription à des fichiers, injonctions de soins, suivis judiciaires, et placements sous surveillance [34](#page=34).
* **Détention dans un établissement psychiatrique:** L'hospitalisation sans consentement est possible sous certaines conditions (demande d'un tiers, péril imminent, demande du représentant de l'État). La dignité et la liberté individuelle de la personne hospitalisée sont garanties, avec un contrôle du magistrat du siège du tribunal judiciaire [34](#page=34).
### 4.4 Limitations normales
Les limitations normales restreignent l'exercice des droits et libertés qui ne sont pas absolus, dans des circonstances non exceptionnelles [36](#page=36).
#### 4.4.1 L'autorité de limitation des libertés
* **En droit interne:** Le principe de réserve de la loi impose que l'ingérence de l'État soit fondée sur une loi votée par le Parlement, traitant de domaines réservés, notamment les libertés publiques [36](#page=36).
* **En droit international:** L'exigence de légalité requiert que les restrictions soient fondées sur une loi accessible, précise et obligatoire [36](#page=36).
#### 4.4.2 Les régimes de limitation des libertés
* **Régime répressif:** La liberté est le principe, la restriction l'exception. Les restrictions sont généralement postérieures à l'exercice du droit, et le régime est indissociable de la proportionnalité et du contrôle judiciaire a posteriori [36](#page=36).
* **Régime préventif:** La sécurité est le principe, la liberté l'exception. Les restrictions sont antérieures à l'exercice du droit, pouvant nécessiter une autorisation préalable. Ce régime repose sur un contrôle a priori par les autorités administratives, soumis à un contrôle judiciaire étroit [36](#page=36).
### 4.5 L'ordre public
L'ordre public, notion transversale et évolutive, justifie la conciliation des droits et libertés, ainsi que leur limitation [37](#page=37).
#### 4.5.1 Un motif de protection des droits et des libertés fondamentaux
L'État est responsable de garantir les droits de chacun en assurant leur conciliation. Les conflits entre droits sont résolus par des principes d'ordre public, tant en droit interne qu'international [37](#page=37).
#### 4.5.2 Un motif de limitation d'un droit ou d'une liberté fondamental
* **Protection de l'intérêt général:** La sauvegarde de l'ordre social peut justifier la limitation des droits. Cela s'applique en droit administratif (pouvoirs de police générale) et constitutionnel (protection de la salubrité, sécurité, tranquillité publique). En droit pénal, la sanction des infractions porte atteinte à la liberté individuelle [37](#page=37).
* **Protection des valeurs essentielles:** L'ordre public immatériel limite l'exercice des droits portant atteinte à la dignité humaine ou à la moralité publique. Ceci s'applique dans les contrats entre personnes privées (ordre public de direction) et entre États (normes de jus cogens) [37](#page=37).
### 4.6 Le contrôle de proportionnalité
Le contrôle de proportionnalité vérifie si une atteinte portée à un droit non absolu est conforme à la loi [38](#page=38).
#### 4.6.1 Objet du contrôle
Il vise à s'assurer que les mesures étatiques n'apportent pas une atteinte disproportionnée aux droits non absolus [38](#page=38).
#### 4.6.2 Étapes du contrôle
Le contrôle comprend l'identification d'un but légitime et l'évaluation de la proportionnalité selon trois étapes: aptitude, nécessité, et proportionnalité stricto sensu (absence de mesure alternative moins attentatoire) [38](#page=38).
#### 4.6.3 Contrôles de proportionnalité
* **Ordre juridique national:** Le contrôle de constitutionnalité (par le Conseil constitutionnel) et le contrôle de conventionnalité (par les juges judiciaires et administratifs) vérifient la proportionnalité des atteintes portées aux droits [38](#page=38).
* **Ordre juridique européen:** La Cour européenne des droits de l'homme contrôle la proportionnalité des atteintes à la CEDH, en vérifiant la nécessité dans une société démocratique et la situation concrète du requérant [38](#page=38).
### 4.7 Limitations exceptionnelles
Les limitations exceptionnelles restreignent l'exercice des droits dans des circonstances exceptionnelles, telles que les états de siège ou d'urgence [39](#page=39).
#### 4.7.1 Limitations exceptionnelles posées par le droit interne
* **Régimes constitutionnels :**
* **Recours aux pouvoirs exceptionnels de l'article 16:** Applicable en cas de circonstances exceptionnelles graves empêchant les pouvoirs publics d'agir. La décision est un acte de gouvernement, mais les actes pris en application sont soumis au contrôle du juge s'ils relèvent du domaine réglementaire [39](#page=39).
* **État de siège:** Déclaré en cas de péril imminent résultant d'une guerre étrangère ou d'une insurrection armée, entraînant le transfert de compétences de police à l'autorité militaire [39](#page=39).
* **Autres régimes :**
* **État d'urgence:** Déclaré en cas de péril imminent ou de calamité publique. Il permet des mesures telles que les assignations à résidence, perquisitions administratives, dissolutions de groupements, fermetures de lieux, et réquisitions. Il y a un phénomène de banalisation de ces mesures dans le droit commun [39](#page=39) [40](#page=40).
* **Circonstances exceptionnelles:** Étend les pouvoirs de l'administration en cas de gravité particulière, d'imprévisibilité, rendant impossible l'action selon la légalité ordinaire. Les mesures doivent poursuivre un but d'intérêt général, être exigées par les circonstances, strictement limitées dans le temps et proportionnées [40](#page=40).
#### 4.7.2 Limitations exceptionnelles résultant du droit international
* **Article 15 de la CEDH:** Permet aux États de déroger à certains droits pour sauvegarder la vie ou l'existence de la Nation, sous notification au Secrétaire général du Conseil de l'Europe. La dérogation doit être motivée par des circonstances exceptionnelles, strictement nécessaire, et exclut certains droits fondamentaux [40](#page=40).
* **Article 4 du PIDCP:** Autorise des dérogations dans le but de sauvegarder l'existence de la Nation, sous notification au Secrétaire général des Nations Unies, et exclut certains droits non dérogeables [40](#page=40).
### 4.8 La lutte contre le terrorisme
Le terrorisme se définit comme l'usage de la violence à des fins politiques [41](#page=41).
#### 4.8.1 L'arsenal répressif à l'encontre du terrorisme
* **Infractions de droit commun:** Des infractions de droit commun sont réprimées au titre du terrorisme lorsqu'elles sont commises en relation avec une entreprise visant à troubler gravement l'ordre public par intimidation ou terreur [41](#page=41).
* **Infractions spécifiques au terrorisme:** Celles-ci incluent le terrorisme écologique, l'association de malfaiteurs, le financement du terrorisme, la non-justification des ressources, le recrutement à des fins terroristes, la provocation et l'apologie du terrorisme, l'entrave au blocage de sites faisant l'apologie du terrorisme, la consultation habituelle de tels sites, et l'entreprise terroriste individuelle [41](#page=41).
#### 4.8.2 Les modalités de lutte contre le terrorisme
* **Modalités administratives :**
* **État d'urgence:** Étend les pouvoirs de police pour prévenir et lutter contre le terrorisme, permettant des limitations de circulation, assignations à résidence, dissolutions de groupements, fermetures de lieux, et perquisitions [41](#page=41).
* **Droit commun:** La loi renforce la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme par des mesures de prévention, des techniques de renseignement, et des contrôles d'identité étendus dans les zones frontalières [42](#page=42).
* **Modalités judiciaires :**
* **Règles de compétence dérogatoires:** Compétence spéciale du procureur de la République, du juge d'instruction, du tribunal correctionnel et de la cour d'assises de Paris, ainsi que la création du parquet national antiterroriste [42](#page=42).
* **Règles particulières de poursuites et d'instruction:** Procédures dérogatoires concernant les contrôles d'identité, les perquisitions nocturnes, les procédés d'investigation (interceptions téléphoniques, sonorisations, captations de données), la prolongation de la garde à vue, et la durée de la détention provisoire [42](#page=42).
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# Droits fondamentaux spécifiques et leur protection
Voici une synthèse détaillée sur les droits fondamentaux spécifiques et leur protection, conçue pour un guide d'étude.
## 5. Droits fondamentaux spécifiques et leur protection
Ce chapitre explore les droits fondamentaux essentiels que sont l'égalité, la dignité de la personne, l'intimité et la vie sociale, ainsi que la nationalité et la citoyenneté, en détaillant les mécanismes de leur protection juridique.
### 5.1 L'égalité devant la loi et par la loi
Le principe d'égalité, énoncé dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789, stipule que les êtres humains naissent et demeurent libres et égaux en droits. Ce principe se décline en deux dimensions principales: l'égalité devant la loi (formelle) et l'égalité par la loi (réelle) [43](#page=43).
#### 5.1.1 L'égalité devant la loi (égalité formelle)
L'égalité devant la loi exige que les pouvoirs publics ne puissent exclure une catégorie de personnes du bénéfice d'une règle. Elle se manifeste par plusieurs principes [43](#page=43):
* **Principes généraux du droit:** Le Conseil d'État exige qu'un traitement similaire soit réservé à des situations similaires. Toutefois, les pouvoirs publics peuvent légitimement opérer une différence de traitement si elle est rendue nécessaire par une loi, justifiée par des différences de situations appréciables entre les administrés, ou motivée par une raison d'intérêt général, à condition que cette différence soit proportionnée au motif [43](#page=43).
* **Principe de valeur constitutionnelle:** Le Conseil constitutionnel a consacré l'égalité comme principe à valeur constitutionnelle. Il impose au législateur de réserver un traitement similaire à des situations semblables, tout en lui accordant la faculté de prévoir une différence de traitement si celle-ci est proportionnée à un but légitime et prohibé [43](#page=43).
* **Droit de l'Union européenne:** Le droit européen impose un traitement similaire pour les situations identiques et un traitement différent pour les situations distinctes, impliquant ainsi deux obligations [43](#page=43).
#### 5.1.2 L'égalité par la loi (égalité réelle)
L'égalité par la loi exige une intervention positive des pouvoirs publics pour assurer une justice sociale et une égalité réelle dans les conditions d'existence [43](#page=43).
* **En droit français:** Cette égalité se fonde sur la faculté des pouvoirs publics de différencier les traitements pour tendre vers une égalité réelle. La différence de traitement doit être proportionnée au but poursuivi. Les pouvoirs publics ne sont cependant pas obligés de traiter différemment des situations distinctes [43](#page=43).
* **En droit européen:** Le droit européen impose de traiter différemment des situations distinctes lorsque les traiter de manière similaire serait disproportionné [43](#page=43).
#### 5.1.3 Les discriminations positives
Les discriminations positives sont des mesures de traitement différencié et préférentiel en faveur d'une minorité, visant à atteindre une égalité réelle [43](#page=43).
* **En droit français:** Elles sont en principe peu admises, car contraires à la conception universaliste de l'égalité. L'exception notable est le principe de parité, favorisant l'accès des femmes aux mandats et fonctions [43](#page=43).
* **En droit européen:** L'Union européenne a promu des directives en matière d'emploi et de travail pour favoriser l'égalité. Cependant, les quotas sont généralement interdits, sauf pour les travailleurs handicapés [43](#page=43).
### 5.2 L'interdiction des discriminations
La prohibition des discriminations interdit de traiter différemment deux personnes en raison d'une caractéristique liée à un critère prohibé, tel que l'âge, le sexe, l'orientation sexuelle ou l'origine [44](#page=44).
#### 5.2.1 Discrimination directe et indirecte
* **Discrimination directe:** Le traitement réservé à une personne est moins favorable en raison d'un critère prohibé [44](#page=44).
* **Discrimination indirecte:** Les effets d'un même traitement désavantagent une personne en raison de caractéristiques personnelles liées à un critère prohibé [44](#page=44).
#### 5.2.2 Le principe de non-discrimination
Le principe de non-discrimination est consacré dans divers ordres juridiques :
* **Droit de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH):** Les discriminations directes ou indirectes sont interdites seulement si elles sont disproportionnées par rapport à un but légitime. L'article 14 de la CEDH interdit la discrimination dans la jouissance des droits conventionnels, tandis que le Protocole n°12 élargit cette interdiction à tout droit garanti par le droit interne et conventionnel [44](#page=44).
* **Droit de l'Union européenne:** Les discriminations directes sont prohibées, tandis que les discriminations indirectes le sont si elles sont disproportionnées. Les articles 18 et 19 du TFUE interdisent les discriminations fondées sur la nationalité, le sexe, la race, l'origine ethnique, la religion, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. L'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE prohibe également les discriminations [44](#page=44).
* **Droit français:** La loi de 2008 a instauré le délit de rupture de neutralité et assimilé le harcèlement et l'injonction de discriminer à des discriminations [44](#page=44).
#### 5.2.3 Déclinaisons de la non-discrimination
* **Discriminations à raison de la race:** Les statistiques ethniques sont prohibées [44](#page=44).
* **Discriminations à raison de l'orientation sexuelle:** La CJUE a jugé illégale l'exclusion permanente des hommes homosexuels du don du sang. La CEDH a condamné des commentaires haineux en ligne visant un couple homosexuel [44](#page=44).
* **Discriminations à raison des convictions religieuses:** Une obligation générale de neutralité vestimentaire dans un règlement intérieur peut constituer une discrimination indirecte si elle désavantage particulièrement les adhérents d'une religion et n'est pas justifiée [44](#page=44).
### 5.3 La dignité de la personne et ses atteintes
La dignité est une qualité inaliénable et inhérente à toute personne humaine. Toute atteinte à la dignité constitue une violation de ce droit absolu [45](#page=45).
#### 5.3.1 Prohibition générale des atteintes à la dignité
La prohibition s'applique aux traitements indignes par nature et par gravité.
* **Traitements indignes par nature:** Sont prohibés l'esclavage, le travail forcé, la servitude et la traite des êtres humains [45](#page=45).
* **Esclavage:** État où s'exercent des attributs de propriété sur un individu [45](#page=45).
* **Travail forcé:** Travail exigé sous menace, pour lequel la personne ne s'est pas offerte volontairement [45](#page=45).
* **Servitude:** État de dépendance complète d'une personne envers une autre, n'impliquant la négation de la liberté [45](#page=45).
* **Traite:** Recrutement, transport ou accueil de personnes par la force, la contrainte, la tromperie, l'abus d'autorité ou de vulnérabilité, aux fins d'exploitation [45](#page=45).
* **Traitements indignes par leur gravité:** Incluent la torture, les traitements inhumains ou dégradants, qui doivent dépasser un certain seuil de gravité [45](#page=45).
* **Traitement dégradant:** Crée chez les victimes un sentiment de peur, d'angoisse et d'infériorité, visant à les humilier et les avilir [45](#page=45).
* **Traitement inhumain:** Cause de vives souffrances physiques ou morales infligées sans respect pour les victimes [45](#page=45).
* **Torture:** Traitements inhumains délibérés provoquant de très graves et cruelles souffrances [45](#page=45).
* **Détermination du seuil de gravité :**
* **Élément objectif:** La nature des souffrances [45](#page=45).
* **Élément subjectif:** La vulnérabilité de la victime (âge, sexe, état de santé, situation de détention, statut d'étranger illégal) [45](#page=45) [46](#page=46).
#### 5.3.2 Prohibition absolue de l'atteinte à la dignité
L'État ne peut ni justifier une atteinte à la dignité, ni déroger à son obligation de protection [46](#page=46).
* **Protection contre l'État:** En cas de traitement indigne infligé par l'État, sa responsabilité internationale peut être engagée [46](#page=46).
* **Protection par l'État:** En cas de traitement indigne perpétré par un individu, l'État a une obligation de prévention (cadre législatif et réglementaire) et de réaction (enquête, protection des victimes) [46](#page=46).
#### 5.3.3 Protection étendue de la dignité
* **Conséquences indignes de l'éloignement:** Le principe de non-refoulement s'applique, interdisant d'éloigner une personne vers un pays où elle risque de subir des traitements indignes. Ceci inclut la protection des étrangers malades qui ne pourraient pas accéder aux soins nécessaires dans le pays de destination [46](#page=46).
* **Conditions indignes de détention:** Les mineurs en rétention administrative sont particulièrement vulnérables. La surpopulation carcérale, caractérisée par un espace personnel réduit, des conditions insalubres et une nourriture insuffisante, peut constituer un traitement indigne. Le droit français a mis en place de nouveaux recours pour contester ces conditions [47](#page=47).
### 5.4 La dignité de la personne et la bioéthique
La bioéthique étudie les problèmes éthiques liés aux avancées biologiques, techniques et médicales, en plaçant la dignité de la personne au centre des préoccupations [48](#page=48).
#### 5.4.1 Principe matriciel et significations de la dignité
* **Principe "matriciel":** La dignité est un principe à valeur constitutionnelle, fondement de nombreux droits fondamentaux [48](#page=48).
* **Significations plurielles :**
* **Droit au respect de la dignité (subjective):** Droit de toute personne à être protégée contre toute forme d'asservissement et de dégradation de son corps [48](#page=48).
* **Restriction de droits au titre de la protection de la dignité (objective):** La dignité peut justifier des restrictions à l'exercice de droits fondamentaux, à condition qu'elles soient proportionnées [48](#page=48).
#### 5.4.2 La protection de la vie
* **Naissance de la personne:** Le droit au respect de la vie privée garantit la liberté de devenir ou non parent [48](#page=48).
* **Nature juridique de l'embryon:** L'embryon n'a pas la personnalité juridique et n'est pas une chose ordinaire. Les autorités n'ont pas d'obligation de le protéger au titre du droit à la vie [48](#page=48).
* **Conception de l'embryon:** Les techniques d'assistance médicale à la procréation (AMP) sont strictement encadrées. Le don de gamètes est gratuit et anonyme. La gestation pour autrui (GPA) et le clonage sont interdits [48](#page=48) [49](#page=49).
* **Instrumentalisation de l'embryon:** Le "bébé-médicament" est autorisé sous conditions strictes. L'expérimentation sur embryon est encadrée [49](#page=49).
* **La vie de la personne :**
* **Protection du corps humain:** Le principe de l'inviolabilité et de l'intégrité du corps humain subordonne toute intervention thérapeutique au consentement de l'intéressé ou à la nécessité médicale. Les atteintes légales incluent le don et l'utilisation d'éléments du corps, le prélèvement d'organes, la recherche biomédicale, et les examens génétiques. Les atteintes illégales incluent les traitements inhumains, dégradants et la torture [49](#page=49) [50](#page=50).
* **Non-patrimonialité du corps humain:** Le corps humain est indisponible à titre onéreux [50](#page=50).
* **Protection de l'espèce humaine:** Interdiction des pratiques eugéniques, du clonage reproductif et des manipulations génétiques visant à modifier la descendance [50](#page=50).
#### 5.4.3 La protection de la fin de vie
* **La mort:** L'instant de la mort, au niveau du cerveau et du tronc cérébral, met fin à la personnalité juridique [50](#page=50).
* **Le choix de la mort :**
* **Suicide:** La provocation au suicide est réprimée [50](#page=50).
* **Euthanasie:** Le droit à la vie ne garantit pas un "droit à mourir". L'euthanasie active est réprimée. L'euthanasie passive, par le refus de l'obstination déraisonnable ou le droit de refuser un traitement, vise à assurer une fin de vie digne. La sédation profonde et continue jusqu'au décès est reconnue dans certains cas [50](#page=50) [51](#page=51).
* **Le mort:** Le cadavre fait l'objet d'une protection spécifique, notamment pour le prélèvement d'organes, les recherches biomédicales et l'identification génétique post-mortem [51](#page=51).
### 5.5 La dignité de la personne et les droits sociaux
Les droits sociaux, souvent qualifiés de droits-créances, sont des droits dont la mise en œuvre dépend de l'action de l'État et dont la justiciabilité est variable. Ils sont ancrés dans les principes particulièrement nécessaires à notre temps (PPNT) du Préambule de la Constitution de 1946 [51](#page=51).
#### 5.5.1 Le droit à la protection sociale
Ce droit consacre la solidarité nationale face aux risques de l'existence. Il est reconnu comme un droit fondamental mais ne produit pas d'effet direct et peut faire l'objet de restrictions proportionnées [51](#page=51).
* **Concrétisations en droit interne :**
* **Lutte contre les exclusions:** Obligation de garantir l'accès aux droits fondamentaux en matière d'emploi, logement, santé, justice et éducation [51](#page=51).
* **Sécurité sociale:** Couvre les risques maladie, maternité, famille et perte de revenus professionnels [51](#page=51).
* **Revenu de solidarité active (RSA):** Garantit un revenu minimum en contrepartie d'une démarche de recherche d'emploi ou de projet professionnel [51](#page=51).
#### 5.5.2 Le droit à l'emploi
Il s'agit d'une liberté de travailler, et non d'un droit à l'obtention d'un emploi. Sa mise en œuvre suppose l'action du législateur. C'est un droit fondamental, mais il n'est pas une liberté fondamentale au sens du référé-liberté et ne produit pas d'effet direct [51](#page=51).
* **Concrétisations en droit interne:** Les politiques publiques de lutte contre le chômage visent à protéger le droit du travail en limitant la capacité de licenciement des employeurs [52](#page=52).
#### 5.5.3 Le droit au logement
Ce droit est une déclinaison du droit à un niveau de vie suffisant et à des conditions de vie dignes [52](#page=52).
* **Droit fondamental :**
* **Droit au logement:** Reconnu par des normes conventionnelles, il ne produit pas d'effet direct [52](#page=52).
* **Droit à l'hébergement d'urgence:** Reconnu comme une liberté fondamentale au sens du référé-liberté [52](#page=52).
* **Objectif de valeur constitutionnelle:** Vise à garantir un logement décent [52](#page=52).
* **Concrétisations en droit interne:** L'interdiction de la discrimination dans l'accès au logement, l'obligation d'un plan d'hébergement d'urgence, et le "droit au logement opposable" (DALO) et le "droit à l'hébergement opposable" (DAHO). Le respect de ces droits peut être imposé au juge administratif [52](#page=52).
### 5.6 La protection internationale de la personne
La protection internationale concerne les réfugiés et ceux bénéficiant de la protection subsidiaire, dans le cadre du régime d'asile européen commun [53](#page=53).
#### 5.6.1 La procédure d'éligibilité
* **Accès à la procédure:** La demande d'asile peut être faite à la frontière ou sur le territoire. Des procédures accélérées ou normales existent selon les cas [53](#page=53).
* **Examen des demandes:** L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) examine la demande et peut accorder ou rejeter l'asile. La Cour nationale du droit d'asile (CNDA) est compétente pour les recours contre les décisions de rejet de l'OFPRA [53](#page=53).
#### 5.6.2 Les conditions d'éligibilité
* **Qualité de réfugié:** L'octroi du statut de réfugié est déclaratif. Il faut remplir plusieurs conditions: un élément d'extranéité, une crainte personnelle et fondée de persécutions, un motif de persécutions lié à la race, religion, nationalité, opinions politiques ou appartenance à un groupe social, un agent de persécution, et une absence de protection dans le pays d'origine [53](#page=53) [54](#page=54).
* **Protection subsidiaire:** Si le demandeur n'est pas réfugié, il peut bénéficier de la protection subsidiaire s'il risque la peine de mort, des actes de torture, ou des menaces graves en cas de conflit armé [54](#page=54).
#### 5.6.3 Éviction de la protection internationale
Le principe de non-refoulement protège les réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire. Des clauses d'exclusion (crimes graves, agissements contraires aux buts de l'ONU) et de cessation (retour volontaire dans le pays d'origine, acquisition d'une nouvelle nationalité) peuvent entraîner la perte de ces protections [54](#page=54).
### 5.7 Le droit au respect de la vie privée et familiale
Ce droit protège l'intégrité physique et mentale, ainsi que l'intimité, l'identité et la sphère personnelle de l'individu. Il est garanti par la CEDH, la Constitution et la loi [55](#page=55).
#### 5.7.1 Le droit au respect de la vie privée
La vie privée comprend la vie personnelle intime (liberté sexuelle, image, domicile, secret de la correspondance, données personnelles, identité biologique) et la vie privée sociale (droit à l'insertion sociale et professionnelle, conversations avocat-client, identité sociale) [55](#page=55).
* **Voies d'action :**
* **Voie civile:** Référé pour faire cesser une atteinte grave, et action en réparation du préjudice subi [56](#page=56).
* **Voie pénale:** Sanction des atteintes à la vie privée (captation, enregistrement), à la représentation de la personne, et violations du secret professionnel et des correspondances [56](#page=56).
#### 5.7.2 Le droit au respect de la vie familiale
Il inclut le droit de se marier et de mener une vie familiale normale [56](#page=56).
* **Droit de se marier:** Les États doivent permettre d'instaurer des partenariats civils pour les couples homosexuels si le mariage leur est fermé [56](#page=56).
* **Droit de mener une vie familiale normale:** Se limite au noyau familial et protège le droit d'entretenir des liens et de vivre avec sa famille. Il ne garantit pas le simple désir de fonder une famille ni le droit de procréer [56](#page=56).
### 5.8 La protection des données personnelles
Toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable est une donnée personnelle. Le traitement de ces données est encadré pour garantir la transparence et la protection [57](#page=57).
#### 5.8.1 Consécration du droit à la protection des données personnelles
Ce droit est une composante du droit au respect de la vie privée, avec un caractère fondamental indirect en droit constitutionnel et direct en droit européen [57](#page=57).
* **Droit constitutionnel:** La loi "Informatique et Libertés" de 1978, modifiée pour transposer le RGPD, constitue une garantie légale d'exigence constitutionnelle [57](#page=57).
* **Droit européen:** La "Convention 108" et l'article 8 de la CEDH garantissent la protection des données. Le droit de l'Union européenne, notamment le RGPD, pose des principes et obligations pour le traitement des données [57](#page=57).
#### 5.8.2 Le régime de protection des données personnelles
* **Protection décentralisée:** Contrôlée par une autorité administrative indépendante, la CNIL, et assurée par des délégués à la protection des données (DPO) [58](#page=58).
* **Protection différenciée:** Deux régimes existent selon que les données sont sensibles (origine raciale, opinions politiques, santé, etc.) ou ordinaires. Le traitement des données sensibles est en principe interdit, sauf consentement explicite [58](#page=58).
* **Protection procédurale:** Inclut le droit à l'information, le droit d'accès, le droit à la rectification et le droit à l'oubli numérique [58](#page=58).
### 5.9 La vie privée et familiale des détenus
Les détenus bénéficient du droit au respect de leur vie privée et familiale, bien que des restrictions soient admises pour garantir l'ordre pénitentiaire [59](#page=59).
#### 5.9.1 Garantie du droit au respect de la vie privée et familiale des détenus
Ce droit est reconnu aux détenus au niveau universel, régional et national. Il inclut le droit d'entretenir des liens avec sa famille, y compris par insémination artificielle [59](#page=59).
#### 5.9.2 Restrictions au droit au respect de la vie privée et familiale des détenus
Des restrictions proportionnées sont possibles concernant :
* **Communications avec l'extérieur:** Correspondances (sous pli ouvert sauf exceptions) et appels téléphoniques peuvent être limités [59](#page=59) [60](#page=60).
* **Visites:** Les visites peuvent être soumises à des fouilles et écoutes avec information préalable [60](#page=60).
* **Vidéo-surveillance:** Peu permise en principe, elle peut être utilisée si la protection de l'ordre le justifie, en cas de risque d'évasion ou de suicide [60](#page=60).
### 5.10 Le travail en prison
Les détenus ont un droit d'accès à une activité proposée par l'établissement pénitentiaire, visant à leur réinsertion. Ce droit n'est pas absolu et peut faire l'objet de restrictions proportionnées [61](#page=61).
#### 5.10.1 Un régime dérogatoire
Le travail en prison peut être interne (service général, travaux industriels) ou externe. L'accès à l'emploi est décidé par la Commission pluridisciplinaire unique [61](#page=61).
#### 5.10.2 Exclusion du droit commun du travail et évolution
Longtemps, le droit commun du travail ne s'appliquait pas aux détenus. Depuis la loi de 2021, ils concluent un contrat d'emploi pénitentiaire, dont les litiges relèvent toutefois du juge administratif [61](#page=61).
#### 5.10.3 Droits des détenus
Certains droits sociaux (retraite, maladie, chômage) sont reconnus, mais le droit de grève et la liberté syndicale restent exclus [61](#page=61).
### 5.11 Le droit à l'environnement
Le droit à un environnement sain protège l'intérêt de tout être humain à la qualité de sa vie et à sa santé [62](#page=62).
#### 5.11.1 Droit à un environnement sain
Ce droit, considéré comme de "troisième génération", protège contre les risques pour la vie, les traitements inhumains et dégradants, les atteintes disproportionnées à la vie privée et le risque pour la santé humaine. Les États ont une obligation de vigilance environnementale. La protection de l'environnement est un objectif de valeur constitutionnelle [62](#page=62).
#### 5.11.2 Protection du droit à un environnement sain
* **Mesures préventives:** Information et participation des citoyens, principe de précaution face aux risques incertains, et mesures de prévention face aux risques avérés [63](#page=63).
* **Mesures curatives :**
* **Responsabilité interne:** Réparation du préjudice écologique (civil et pénal) [63](#page=63).
* **Responsabilité internationale:** Réparation des dommages environnementaux causés par un fait internationalement illicite [63](#page=63).
### 5.12 La nationalité
La nationalité est le lien juridique de rattachement d'un individu à un État. Le droit à la nationalité, pour ne pas être apatride, est reconnu mais limité par le droit souverain des États [64](#page=64).
#### 5.12.1 L'entrée dans la communauté nationale
La nationalité s'établit par attribution (droit du sang et droit du sol) ou par acquisition (décret de naturalisation, déclaration de mariage, déclaration d'enfants adoptés ou recueillis) [64](#page=64).
#### 5.12.2 Hypothèses d'opposition à l'établissement de la nationalité
Le défaut d'assimilation (respect des valeurs essentielles de la société française) et la fraude (actes d'état civil falsifiés, mariages blancs) peuvent s'opposer à l'établissement de la nationalité [64](#page=64).
#### 5.12.3 La sortie de la communauté nationale
La perte de la nationalité peut résulter d'un comportement fait comme national d'un pays étranger, ou d'une déchéance en cas de condamnation pour des crimes portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, sauf si cela conduit à l'apatridie [65](#page=65).
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## Erreurs courantes à éviter
- Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens
- Portez attention aux formules et définitions clés
- Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section
- Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents
Glossary
| Term | Definition |
|------|------------|
| Libertés et droits fondamentaux | Notion doctrinale désignant soit les droits porteurs de valeurs fondamentales, soit les droits énoncés dans une norme de rang fondamental (constitutionnel ou conventionnel). |
| Droits de l’homme | Terme générique en droit international et européen pour les droits consacrés dans les conventions de droits de l’homme. En droit interne, il renvoie à la conception jusnaturaliste issue de la Déclaration des droits de l’Homme de 1789. |
| Libertés publiques | Droits et libertés dégagés de manière prétorienne par le Conseil d’État, de valeur législative, s’imposant aux autorités étatiques. |
| Principes fondamentaux | Au sens large, principes structurant l'ordre juridique. Au sens étroit, principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, issus d'une loi républicaine antérieure à 1946, mise en œuvre de manière continue et portant une règle générale et essentielle. |
| Droit-autonomie | Prérogative protégeant le pouvoir d'émancipation d'un sujet de droit vis-à-vis de l'autorité publique. |
| Droit-créance | Prérogative attribuant au sujet de droit le droit à une prestation de l'autorité publique. |
| Droits de première génération | Droits issus de l'esprit révolutionnaire de 1789, protégeant l'autodétermination de l'individu contre ou en dehors de l'État. |
| Droits de deuxième génération | Droits issus d'un esprit socialisant et égalitariste, nécessitant une prestation de l'État. |
| Droits de troisième génération | Droits issus de la globalisation, visant la protection de l'Humanité et de son environnement. |
| Obligation négative | Obligation pour l'État de ne pas agir en violation des droits. |
| Obligation positive | Obligation pour l'État de prendre des mesures pour prévenir ou remédier aux situations contraires aux droits. |
| Droits absolus | Droits ne pouvant faire l'objet de dérogation ou d'exception. |
| Droits non absolus | Droits dont l'exercice peut être limité par l'État sous condition de proportionnalité. |
| État de droit | Ordonnancement juridique garantissant la neutralisation du pouvoir pour protéger les justiciables contre l'arbitraire. |
| Bloc de constitutionnalité | Ensemble des normes de rang constitutionnel dans la Ve République, incluant la Constitution, le Préambule de 1958, la DDHC de 1789, le Préambule de 1946 et la Charte de l'environnement de 2004. |
| Principes particulièrement nécessaires à notre temps (PPNT) | Droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Préambule de la Constitution de 1946. |
| Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) | Principes dégagés par le Conseil constitutionnel, issus d'une loi républicaine antérieure à 1946, mise en œuvre continue et portant une règle générale et essentielle. |
| Principes de valeur constitutionnelle (PVC) | Normes identifiées par le Conseil constitutionnel, sans fondement textuel nécessaire, consacrant des libertés et droits fondamentaux. |
| Objectifs de valeur constitutionnelle (OVC) | Normes identifiées par le Conseil constitutionnel, sans fondement textuel nécessaire, limitant l'exercice des libertés et droits fondamentaux. |
| Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) | Texte conventionnel régional consacrant les droits civils et politiques, protégé par la Cour européenne des droits de l’homme. |
| Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne | Texte conventionnel régional proclamé en 2000, entré en vigueur en 2009, consacrant les droits fondamentaux dans le cadre de l'UE. |
| Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) | Voie de contrôle de conformité de la loi aux droits et libertés garantis par la Constitution, initiée a posteriori et dans le cadre d'un litige. |
| Indépendance des juridictions | Principe garantissant que les juges et magistrats exercent leurs fonctions à l'abri de toute instruction, pression ou influence extérieure. |
| Autorité judiciaire | Ensemble des magistrats et juridictions concourant à l'exercice du pouvoir de juger dans l'ordre judiciaire, gardienne de la liberté individuelle. |
| Juge administratif | Juridiction administrative chargée de réformer ou annuler les décisions des autorités publiques et de contrôler la légalité des actes administratifs. |
| Recours pour excès de pouvoir | Recours permettant de contester la légalité d'un acte administratif. |
| Référé-liberté | Procédure d'urgence permettant au juge administratif d'ordonner toute mesure nécessaire pour mettre fin à une atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale. |
| Ordre public | Notion transversale et évolutive protégeant les droits et libertés, justifiant des limitations pour la sauvegarde de l'intérêt général ou des valeurs essentielles. |
| Contrôle de proportionnalité | Méthode de contrôle permettant de vérifier si une atteinte portée à un droit non absolu est justifiée par un but légitime et si elle est adéquate, nécessaire et proportionnée stricto sensu. |
| Limitations exceptionnelles | Restrictions aux droits et libertés imposées en circonstances exceptionnelles, telles que l'état de siège, l'état d'urgence ou les pouvoirs exceptionnels. |
| Lutte contre le terrorisme | Ensemble des infractions et des modalités administratives et judiciaires visant à prévenir, détecter et réprimer les actes terroristes. |
| Principe d’égalité | Droit de toute personne de bénéficier d'un traitement similaire dans une situation semblable, avec des déclinaisons formelles et réelles. |
| Discrimination | Traitement différentiel fondé sur un critère prohibé, qu'il soit direct ou indirect. |
| Dignité de la personne | Qualité inaliénable et indisponible inhérente à toute personne humaine, qui interdit les traitements inhumains, dégradants ou la torture. |
| Bioéthique | Étude des problèmes éthiques posés par les avancées biologiques, techniques et médicales, notamment en ce qui concerne la protection de la vie et du corps humain. |
| Droits sociaux | Droits-créances dont la mise en œuvre dépend de l'action de l'État, tels que le droit à la protection sociale, le droit à l'emploi et le droit au logement. |
| Protection internationale de la personne | Régime de protection des personnes au titre de la qualité de réfugié ou de la protection subsidiaire, encadré par des procédures et des conditions d'éligibilité. |
| Droit au respect de la vie privée et familiale | Droit à la protection contre les atteintes disproportionnées à l'intimité, à l'identité et à la sphère personnelle de la vie d'un individu. |
| Protection des données personnelles | Composante du droit au respect de la vie privée garantissant la transparence du traitement des données et encadrant leurs usages. |
| Travail en prison | Droit pour les détenus d'accéder à une activité professionnelle visant leur réinsertion, encadré par un régime dérogatoire au droit commun du travail. |
| Droit à l’environnement sain | Droit de troisième génération protégeant l'intérêt de l'être humain à la qualité de sa vie et de sa santé face aux impacts environnementaux. |
| Nationalité | Lien juridique de rattachement d'un individu à un État, établi par attribution (jus sanguinis, jus soli) ou acquisition (naturalisation, déclaration). |