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Summary
# Le développement des États-Unis d'Amérique
Voici un résumé détaillé sur le développement des États-Unis d'Amérique, couvrant la période de l'ère coloniale à l'industrialisation.
## 1. Le développement des États-Unis d'Amérique
L'émergence des États-Unis est marquée par une transition d'une ère coloniale vers une nation indépendante et une puissance industrielle, façonnée par des facteurs économiques, politiques et sociaux clés.
### 1.1 L'ère coloniale : fondations et aspirations
Les débuts de la colonisation nord-américaine ont été motivés par la recherche de liberté, tant religieuse que politique, par des colons originaires d'Angleterre, d'Irlande et d'Allemagne. La fuite face à l'autorité ecclésiastique et royale en Angleterre a trouvé un terrain propice en Amérique du Nord, suscitant des mouvements migratoires importants, tels que l'épopée du Mayflower en 1620. Les treize colonies anglaises se sont développées avec un désir d'autonomie et de liberté économique. La relation avec la métropole anglaise était régie par des chartes royales, mais les tensions économiques, dues à des échanges commerciaux jugés inéquitables par les colons, ont rapidement émergé. L'augmentation de la pression fiscale par l'Angleterre, notamment via des politiques comme celle sur le commerce du thé, a exacerbé ces conflits, menant à des événements comme le Boston Tea Party et, ultimement, à la lutte pour l'indépendance [1](#page=1) [2](#page=2).
#### 1.1.1 Contrasts régionaux et développement économique
L'ère coloniale était une période dynamique marquée par l'expansion vers l'ouest et la notion de "frontière". Des contrastes régionaux significatifs ont émergé [2](#page=2):
* **Le Nord:** Caractérisé par une agriculture de subsistance, la pêche, et le développement d'industries naissantes, favorisant une orientation économique libérale [2](#page=2).
* **Le Sud:** Axé sur une agriculture à grande échelle, comme la production de sucre et de mélasse, rendue possible par un climat plus clément et l'institutionnalisation de l'esclavage. Ces divergences d'intérêts entre le Nord et le Sud ont constitué un terreau fertile pour les futures tensions, culminant avec la guerre de Sécession [2](#page=2).
### 1.2 L'indépendance des États-Unis
La déclaration d'indépendance en 1776, formalisée par le traité de paix de 1783, fut une réponse directe aux contraintes commerciales imposées par l'Angleterre, notamment son monopole sur le commerce extérieur. Les colonies, cherchant à maximiser leurs profits, ont vu leurs aspirations contrariées par une augmentation des taxes [2](#page=2).
#### 1.2.1 Les fondements de la croissance post-indépendance
Après l'indépendance, les États-Unis ont connu un développement rapide grâce à plusieurs facteurs déterminants :
1. **Un marché intérieur de grande taille:** Stimulé par une politique migratoire accueillante, les États-Unis ont attiré des millions de migrants, principalement des îles britanniques et d'Allemagne. Cette main-d'œuvre abondante a été un moteur essentiel de la croissance industrielle et économique. La population est passée de 4 millions en 1790 à plus de 31 millions en 1860, incluant 10% d'esclaves [3](#page=3).
2. **Une politique d'indépendance économique:** Un fort désir d'autonomie a guidé la politique d'industrialisation, visant à réduire la dépendance vis-à-vis des puissances étrangères, notamment l'Angleterre [3](#page=3).
* **La Doctrine Monroe:** Édictée par le président Monroe, elle a affirmé que le continent américain était désormais fermé à toute nouvelle colonisation européenne et a orienté la politique étrangère américaine vers l'Amérique latine. Cette doctrine a également contribué à un certain isolationnisme américain avant la Première Guerre mondiale, centré sur le continent [3](#page=3).
* **Le protectionnisme:** Défendu par des figures comme Alexander Hamilton, le protectionnisme visait à favoriser l'industrialisation par des tarifs douaniers élevés (40-50%) pour protéger les industries naissantes de la concurrence européenne. Hamilton prônait une économie diversifiée, combinant agriculture, commerce et industrie, pour assurer dynamisme et stabilité [4](#page=4).
3. **Une industrialisation rapide (à partir de 1840):** Les États-Unis ont rattrapé leur retard industriel grâce à l'accumulation de capitaux, l'afflux de main-d'œuvre immigrée, et l'exploitation des abondantes matières premières. L'agriculture s'est modernisée avec l'adoption et le perfectionnement de machines venues d'Europe. Le développement industriel s'est d'abord concentré dans les États du Nord, touchant des secteurs comme le textile, la filature et la sidérurgie. Cette période a vu l'émergence d'une classe de chefs d'entreprise et d'un capitalisme industriel distinct [4](#page=4).
#### 1.2.2 La guerre civile et ses conséquences
La guerre civile (1861-1865) a été un point tournant crucial, notamment en raison de la question de l'esclavage, critiquée par le Nord et influencée par des mouvements abolitionnistes européens. La victoire des États du Nord en 1865 a marqué la fin de l'esclavage et a consolidé l'opposition économique entre le Nord industrialisé et le Sud agraire [3](#page=3) [4](#page=4).
### 1.3 L'exploitation de la main-d'œuvre et la croissance inégale
L'industrialisation rapide s'est accompagnée d'une exploitation significative de la main-d'œuvre. Au-delà de l'esclavage, les conditions de travail dans les usines du Nord étaient difficiles, avec de longues heures, de bas salaires, et l'embauche d'enfants dans la Nouvelle-Angleterre. Les migrants vivaient souvent dans des taudis urbains, rendant la période 1860-1870 particulièrement éprouvante pour l'histoire ouvrière américaine [5](#page=5).
#### 1.3.1 Montée en puissance économique et inégalités
Malgré ces difficultés, la fin du 19e siècle a vu la naissance des syndicats de travailleurs, luttant pour l'obtention de droits et d'avantages. La période 1850-1910 a connu une forte croissance démographique et une augmentation de la richesse produite. En 1910, le niveau d'industrialisation des États-Unis dépassait celui du Royaume-Uni de 10%, faisant d'eux des créanciers de l'Europe. Cependant, cette montée en richesse s'est accompagnée d'inégalités criantes: en 1919, 1/5 de la population détenait la quasi-totalité des richesses. Le revenu par habitant était environ trois fois plus élevé qu'en Europe, mais cela n'éradiquait pas les disparités. L'agriculture s'est intensifiée, les méthodes de production ont évolué avec le perfectionnement de l'outillage, le travail à la chaîne et le taylorisme, menant à une production de masse d'articles standardisés à bas prix. Ces avancées ont favorisé la concentration industrielle et des entreprises d'envergure [5](#page=5).
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# L'économie de l'Amérique latine : du colonialisme à la dépendance
Ce sujet examine la trajectoire économique de l'Amérique latine, de la période coloniale centrée sur l'exploitation des ressources et l'établissement de sociétés multiraciales, à son intégration déséquilibrée dans l'économie mondiale [6](#page=6).
### 2.1 L'héritage colonial et la structuration économique
La période coloniale, s'étendant du XVIe siècle à l'indépendance, a profondément marqué la trajectoire économique et industrielle de l'Amérique latine [6](#page=6).
#### 2.1.1 L'économie du pillage et de l'exploitation
La recherche de métaux précieux, tels que l'or, a été un moteur principal de la colonisation espagnole. Ces richesses permettaient aux colons d'acquérir un statut social et de satisfaire les exigences des couronnes européennes, qui y voyaient un lien direct avec la puissance commerciale et politique. La mise en place de systèmes tels que l'encomienda a entraîné le travail forcé des populations autochtones sur des terres qui ne leur appartenaient pas, sapant leur autonomie. Cette période fut caractérisée par la destruction des empires préexistants et un effondrement démographique majeur, attribué aux maladies introduites et aux violences coloniales [7](#page=7).
> **Tip:** Il est crucial de comprendre que l'idéologie, le système social et l'économie des populations autochtones ont été déstructurés, conduisant à un effondrement démographique [7](#page=7).
La colonisation a engendré la création d'une société multiraciale et fortement hiérarchisée, où la race déterminait les droits, les devoirs et l'accès aux positions sociales et économiques. Les populations européennes, initialement minoritaires, sont devenues majoritaires au fil du temps, tandis que les populations autochtones ont vu leur nombre drastiquement réduit. Les Européens nés sur place (Créoles) et les Afro-descendants, issus de la traite négrière, constituaient d'autres groupes importants. Les "castes" témoignaient de la complexité des mélanges raciaux et régulaient la société coloniale, le racisme étant intrinsèque à ce système. Le système capitaliste s'est imposé en reproduisant et en exploitant ces différences raciales [7](#page=7) [8](#page=8).
La couronne espagnole a instauré un monopole commercial bilatéral par le biais du "pacte colonial", contrôlant strictement les entrées de marchandises et les taxes. Ce système a favorisé un "échange inégal", où les transferts de richesse étaient massivement déséquilibrés en faveur de la métropole. Les colonies envoyaient des matières premières (or, teintures) vers l'Espagne, qui recevait des produits à faible coût, tout en renvoyant des biens manufacturés dont la production était restreinte dans les colonies [9](#page=9).
#### 2.1.2 La naissance du Brésil et de son économie
La colonisation du Brésil par le Portugal a débuté plus tardivement, en 1500. L'économie brésilienne s'est construite autour de cycles de production spécifiques, passant du bois aux pierres précieuses, puis au coton, au cacao, et plus tard au café. La découverte de mines de diamants a provoqué un boom économique lié aux métaux précieux jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. Le pacte colonial a cependant limité le développement, le Portugal échangeant des produits miniers contre des biens manufacturés, un besoin que le Portugal peinait à satisfaire en raison de sa dépendance économique vis-à-vis de l'Angleterre. L'Angleterre, profitant de la faiblesse portugaise, a investi le marché brésilien, un tournant qui a, paradoxalement, préparé le terrain pour l'indépendance économique du Brésil. Dès 1530, la culture de la canne à sucre s'est développée, soutenue par l'esclavage [10](#page=10).
> **Example:** Les cycles économiques au Brésil ont été variés: sucre, or et diamant, coton, cacao, cuir, café, caoutchouc, puis de nouveau café jusqu'aux années 1930, période où le Brésil représentait 60% de la production mondiale de café [10](#page=10).
Le traité Luso-britannique de 1810 a accentué la domination commerciale anglaise sur le Portugal et le Brésil [10](#page=10).
### 2.2 Des indépendances à l'âge d'or des exportations (1870-1914)
Autour des années 1820, la plupart des nations latino-américaines accèdent à l'indépendance politique. Cependant, ces nouvelles nations étaient principalement agraires, avec une industrialisation limitée et une forte dépendance envers les métropoles pour les produits manufacturés. Les indépendances ont été motivées par diverses raisons, notamment la frustration des élites créoles désireuses d'accéder au pouvoir, les revendications des communautés autochtones pour la terre, et l'affaiblissement de l'Espagne suite aux guerres napoléoniennes. L'Angleterre a joué un rôle clé en trouvant de nouveaux débouchés pour ses produits manufacturés dans le Nouveau Monde, générant des conflits locaux [11](#page=11).
Entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle (jusqu'en 1929), l'Amérique latine a connu un "âge d'or des exportations". Cette période a vu une forte intégration à l'économie mondiale, avec une région particulièrement dynamique. Cependant, cette intégration s'est faite par une spécialisation dans les matières premières, ce qui a freiné le développement industriel et rendu ces économies vulnérables aux fluctuations du marché mondial. La crise de 1929 a mis un frein brutal à ces échanges [11](#page=11).
> **Tip:** La spécialisation dans les matières premières a défini les contours de l'insertion de l'Amérique latine dans la division internationale du travail, posant un obstacle au développement industriel. L'Argentine, autrefois dixième économie mondiale, s'est effondrée après 1929 [11](#page=11).
L'influence de l'Angleterre puis des États-Unis s'est accrue. Les États-Unis ont étendu leur sphère d'influence, tant sur le plan politique que économique, soutenant des coups d'État et contrôlant des entreprises comme la United Fruit Company, qui détenait un monopole sur les fruits exotiques et était impliquée dans des actions contre-insurrectionnelles [12](#page=12).
L'abolition progressive de l'esclavage, effective au Brésil en 1888 (après l'interdiction de la traite en 1815), a entraîné une augmentation des coûts de production. Pour pallier le manque de main-d'œuvre, les pays latino-américains ont encouragé l'immigration européenne [12](#page=12).
> **Example:** La United Fruit Company, dès 1870, a exercé une influence considérable, notamment dans des épisodes comme la contre-insurrection au Guatemala, illustrant l'emprise des entreprises étrangères [12](#page=12).
### 2.3 Bilan : un développement capitaliste fondé sur de profonds déséquilibres
La période précédant le XXe siècle a été marquée par une insertion dans les échanges internationaux, une ruée vers les matières premières, un afflux d'individus avides d'enrichissement, et la difficulté à rompre les liens avec les pays européens. L'Amérique latine n'a pas pu se développer pleinement en raison du pacte colonial et de l'absence d'une économie locale forte. Contrairement aux États-Unis, où un marché local dynamique a soutenu l'industrialisation, les économies latino-américaines ne consommaient pas largement les produits qu'elles exportaient (comme le café), ce qui limitait la possibilité de développer un marché intérieur autonome [12](#page=12).
Au XIXe siècle, plusieurs pays ont tenté une "industrialisation par substitution aux exportations", mais la demande locale trop faible n'a pas incité à l'investissement ou à l'innovation. Il y a eu peu d'industrialisation [12](#page=12) [13](#page=13).
L'"école de la dépendance" attribue ces difficultés aux métropoles et à l'absence d'alliances de classes internes. La bourgeoisie locale, souvent alignée sur les intérêts étrangers, a profité de sa situation de privilège sans jouer un rôle moteur dans le développement du pays, contrairement à ce qui s'est passé aux États-Unis [13](#page=13).
Le crack boursier de 1929 aux États-Unis a eu des répercussions mondiales, entraînant l'effondrement du commerce international et une diminution de la demande pour les produits latino-américains. Ces difficultés ont contribué à l'émergence de dictatures dans la région. Les déséquilibres structurels initiaux ont perduré dans la période contemporaine [13](#page=13) [6](#page=6).
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# L'industrialisation de l'Asie : le cas de l'Inde et l'exception japonaise
L'étude de l'industrialisation en Asie révèle deux trajectoires radicalement différentes: la désindustrialisation forcée de l'Inde sous domination britannique et l'industrialisation rapide et autonome du Japon, soulignant leurs différences fondamentales [14](#page=14).
### 3.1 La désindustrialisation forcée de l'Inde sous domination britannique
#### 3.1.1 Le contexte pré-colonial et le basculement vers la colonisation
Avant le XVIIIe siècle, l'Inde était un producteur textile de premier plan sur la scène mondiale, avec une industrie paysanne florissante. Cependant, le début de la colonisation directe par l'Angleterre à partir de 1757, suite à la bataille de Plassey, a radicalement modifié la trajectoire économique de l'Inde. La Compagnie des Indes orientales a obtenu un quasi-monopole, orientant les flux commerciaux vers le Royaume-Uni et privant l'Inde de son autonomie économique [14](#page=14) [15](#page=15).
#### 3.1.2 Les mécanismes de la désindustrialisation
La Révolution Industrielle anglaise, avec sa capacité à produire à bas prix grâce à la mécanisation, a joué un rôle central. L'Angleterre a imposé l'interdiction ou une taxation forte des textiles indiens en Europe, tout en ouvrant de force le marché indien aux textiles britanniques bon marché. Cette politique a entraîné l'effondrement de l'industrie textile indienne et la perte d'activité de millions d'artisans, un phénomène qualifié de "désindustrialisation coloniale". La fin du monopole de la Compagnie des Indes en 1813 a consolidé le statut de l'Inde comme un marché captif pour l'industrie anglaise [15](#page=15).
La domination britannique s'est déroulée en deux phases principales :
* **1760-1858: Domination commerciale** via la Compagnie des Indes, axée sur le contrôle des ports, du commerce et des taxes, entraînant une extraction de ressources et la destruction des concurrents industriels, sans administration directe du territoire [15](#page=15).
* **1858-1947: Colonisation politique** officielle suite à la révolte des Cipayes, le contrôle s'exerçant par le biais des élites locales [15](#page=15).
#### 3.1.3 Les conséquences économiques et à long terme
Les conséquences économiques de cette domination incluent la priorité donnée au commerce d'exportation (coton, opium, thé), l'absence d'investissement dans l'industrie locale, et une dépendance économique accrue envers le Royaume-Uni. L'État colonial n'a pas investi dans l'éducation, la technologie ou les infrastructures industrielles, et la concurrence textile indienne a été intentionnellement détruite, entraînant une perte de savoir-faire et une paupérisation des artisans. L'Inde a subi une intégration forcée à l'économie mondiale, devenant dépendante des marchés et des capitaux britanniques [16](#page=16).
Les conséquences à long terme sont un retard industriel majeur, un tissu industriel faible au moment de l'indépendance en 1947, et une dépendance prolongée aux importations. La part de l'Inde dans la production industrielle mondiale a chuté de 20 % à 1 % en 1913 [16](#page=16) [17](#page=17).
> **Tip:** Il est crucial de comprendre que l'Inde n'a pas choisi son insertion dans la globalisation ; elle l'a subie, ce qui a eu des effets dévastateurs sur son développement industriel.
#### 3.1.4 Une ré-industrialisation modeste et limitée
Une ré-industrialisation a timidement démarré entre 1860 et 1870, avec l'apparition de filatures de coton et d'une sidérurgie naissante, mais reposant sur des machines anciennes et peu performantes. Une partie de l'élite commerçante indienne, notamment les Parsis, a lancé les premières industries modernes en combinant capitaux locaux et techniques étrangères, mais ce développement est resté fragile et dépendant des technologies importées [18](#page=18).
La sidérurgie moderne n'a décollé que tardivement, avec la création de Tata Steel en 1907, mais cela n'était pas lié à la construction des chemins de fer, qui utilisaient des matériaux et bases européens, limitant la stimulation de la sidérurgie locale. En 1913, l'Inde ne représentait que 0,1 % de la production mondiale d'acier, malgré une main-d'œuvre abondante et peu chère. Cette main-d'œuvre à bas salaires n'a pas favorisé une industrialisation intensive ou technologique [18](#page=18) [19](#page=19).
La ré-industrialisation de l'Inde est donc restée tardive, limitée, et dépendante de technologies étrangères, l'économie indienne conservant les caractéristiques d'un pays sous-développé: forte dépendance aux exportations de matières premières, faible diversification industrielle et absence d'effets d'entraînement des infrastructures [19](#page=19).
### 3.2 L'exception japonaise : une industrialisation autonome et rapide
#### 3.2.1 Le contexte pré-ouverture et la prise de conscience
Le Japon constitue un cas unique: malgré un manque de ressources naturelles, il fut le premier pays non-européen à s'industrialiser à la fin du XIXe siècle, sans jamais avoir été colonisé. Avant la Révolution Meiji, le Japon était très fermé au monde, avec un pouvoir centralisé entre les mains du shogun et une société rigide. La politique de fermeture des Tokugawa (1640-1853) limitait drastiquement les connexions avec l'extérieur [20](#page=20).
Le traité de Kangawa en 1853, imposé par les États-Unis sous le commandement de Perry, a brutalement révélé le retard technologique et militaire du Japon. La démonstration de la supériorité technique américaine a convaincu les élites japonaises que le pays risquait d'être colonisé s'il ne se modernisait pas [20](#page=20).
#### 3.2.2 La Révolution Meiji: le tournant décisif .
Cette prise de conscience a conduit à la chute du shogun et à la restauration de l'autorité de l'empereur Meiji, marquant une révolution politique majeure. La Révolution Meiji de 1868 a entraîné [21](#page=21):
* La fin du système féodal et la suppression des privilèges des samouraïs et des seigneurs [21](#page=21).
* Une modernisation économique par l'importation de machines occidentales, la construction d'usines d'État et le développement du textile et de la sidérurgie [21](#page=21).
* La mise en place d'une éducation moderne pour former une main-d'œuvre qualifiée [21](#page=21).
* Une ouverture contrôlée au commerce international [21](#page=21).
* La centralisation de l'État avec la création d'un gouvernement fort et stable [21](#page=21).
#### 3.2.3 La stratégie de démarrage du Japon (1868–1910)
La stratégie japonaise pour rattraper rapidement les puissances occidentales reposait sur un État très actif [22](#page=22):
1. **Un État centralisé et unifié:** Le pouvoir a été consolidé sous l'empereur Meiji, les gouverneurs régionaux étant nommés par lui, favorisant l'unité du pays. La liberté de circulation a permis aux élites d'acquérir des technologies et savoir-faire à l'étranger [22](#page=22).
2. **Une réforme agraire décisive:** Une taxe agricole fixe a encouragé les paysans à produire davantage, fournissant les surplus nécessaires à l'industrialisation [22](#page=22).
3. **Une industrialisation dirigée par l'État:** La baisse des tarifs douaniers a facilité l'importation de machines. L'État a créé des entreprises dans des secteurs clés (textile, chantiers navals, arsenaux) avant de les revendre au secteur privé [22](#page=22).
4. **Révolution éducative:** La mise en place d'un système éducatif national moderne et obligatoire, avec la création d'universités comme celle de Tokyo, a formé les ingénieurs, fonctionnaires et techniciens nécessaires à la modernisation [22](#page=22).
> **Tip:** La combinaison d'un État fort initiateur et d'un secteur privé dynamique est une clé de voûte du succès industriel japonais.
#### 3.2.4 Le décollage rapide et la politique expansionniste
Grâce à ces éléments, le Japon est devenu une puissance industrielle notable vers 1910, se classant entre la 14e et la 18e place mondiale. Pour sécuriser ses matières premières et ses marchés, le Japon a adopté une politique expansionniste, menant des guerres contre la Chine et la Russie (1904-1905), et annexionnant la Corée (1905-1910) [23](#page=23).
En conclusion, le modèle japonais, caractérisé par un État fort, une réforme agraire efficace, des importations massives de technologies occidentales, un système éducatif national et une industrialisation pilotée par l'État, a permis au Japon de devenir, en quelques décennies, la première puissance industrielle non occidentale et d'adopter une politique impérialiste en Asie [23](#page=23).
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# La colonisation européenne de l'Afrique subsaharienne
La colonisation européenne de l'Afrique subsaharienne a été un processus tardif, influencé par des facteurs géographiques, économiques et politiques, culminant avec le partage du continent lors de la Conférence de Berlin.
### 4.1 L'abolition de la traite et de l'esclavage et ses conséquences
L'abolition de la traite négrière, c'est-à-dire le commerce des êtres humains, a marqué un tournant dans les relations européennes avec l'Afrique.
* **Chronologie de l'abolition de la traite :**
* Danemark: 1792 [24](#page=24).
* Angleterre: 1807 [24](#page=24).
* Traité de Vienne: 1815 [24](#page=24).
Ces dates reflètent la diffusion des idées libérales en Europe, qui ont conduit à l'interdiction de l'esclavage sur le continent [24](#page=24).
* **Chronologie de l'abolition de l'esclavage dans les colonies :**
Bien que l'esclavage ait continué d'exister, son abolition a marqué une chute drastique :
* Haïti: 1793 [24](#page=24).
* Angleterre: 1833 [24](#page=24).
* France: 1848 (avant cette date, des restrictions sur les conditions de travail des esclaves étaient imposées, comme la nécessité de les nourrir et de leur accorder du repos ) [24](#page=24).
* Pays-Bas: 1863 [24](#page=24).
* États-Unis: 1865 [24](#page=24).
* Brésil et Cuba: années 1880 [24](#page=24).
* **Les raisons de l'abolitionnisme britannique :**
Plusieurs facteurs expliquent l'engagement britannique dans l'abolitionnisme :
* Interprétation juridique: des affaires juridiques ont permis d'affirmer l'illégalité de l'esclavage dans tout l'empire, alors que la loi ne visait initialement que la métropole, accélérant ainsi les revendications abolitionnistes [24](#page=24).
* Idéologie libérale et industrialisation: ces courants de pensée ont favorisé le mouvement abolitionniste [24](#page=24).
* Intérêt politique: l'Angleterre cherchait à se positionner comme un "sauveur" et à justifier sa domination par le biais de ses industries [24](#page=24).
* **Impact sur l'Afrique :**
L'impact de l'abolition sur l'Afrique reste difficile à évaluer avec précision. Il est complexe de quantifier le déficit démographique ou la taille des populations africaines touchées, en raison des décès survenus durant le trajet et la traversée. La traite elle-même opérait une sélection, emportant principalement les individus les plus jeunes et les plus vulnérables. Les entreprises les plus puissantes ont bénéficié de cette traite [24](#page=24).
### 4.2 Le caractère tardif de la colonisation européenne en Afrique
La colonisation européenne de l'Afrique subsaharienne s'est déroulée plus tardivement que d'autres entreprises coloniales, principalement en raison d'obstacles géographiques, d'un intérêt économique initial limité et d'une concurrence accrue entre puissances européennes.
* **Facteurs expliquant la lenteur de la colonisation :**
* **Géographie et climat:** L'accès à l'intérieur des terres africaines était rendu difficile par les maladies (comme le paludisme), la géographie (forêts denses) et le climat. L'intérêt pour l'exploration des terres intérieures était faible, et l'on se contentait d'accoster sur les côtes [25](#page=25).
* **Faible intérêt économique initial:** Les produits exportés par l'Afrique, tels que l'huile de palme, n'offraient pas un intérêt économique suffisant pour justifier une colonisation en profondeur. Cet intérêt a considérablement augmenté à partir de la fin du 19ème siècle avec la découverte de richesses telles que l'or et le diamant [25](#page=25).
* **Concurrence accrue entre puissances européennes:** La montée des nationalismes européens a intensifié la rivalité entre les grandes puissances, désireuses de prouver leur puissance en acquérant des territoires. La colonisation est ainsi devenue un enjeu politique et stratégique majeur [25](#page=25).
* **La Conférence de Berlin (1884-1885) :**
Cette conférence a été un événement déterminant dans le partage de l'Afrique.
* **Objectif:** Éviter les conflits entre les puissances européennes [25](#page=25).
* **Décision:** Le continent africain a été partagé en zones d'influence [25](#page=25).
* **Conséquences:** Ce découpage a été réalisé sans tenir compte des peuples africains, entraînant la création de frontières artificielles. Chaque puissance devait prouver une occupation réelle de son territoire, ce qui a marqué le début des conquêtes militaires [25](#page=25).
* **Exception notable:** L'Éthiopie est parvenue à échapper à la colonisation [25](#page=25).
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## Erreurs courantes à éviter
- Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens
- Portez attention aux formules et définitions clés
- Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section
- Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents
Glossary
| Term | Definition |
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| Colonie | Territoire sous la domination politique et économique d'une puissance étrangère, souvent exploité pour ses ressources et sa main-d'œuvre. |
| Métropole | Le pays qui exerce une domination politique et économique sur une ou plusieurs colonies. |
| Chartes royales | Documents officiels émis par le monarque accordant des droits et des privilèges à des individus, des groupes ou des colonies, régulant ainsi leurs relations avec la couronne. |
| Industrie | Ensemble des activités économiques liées à la production de biens manufacturés à grande échelle, souvent grâce à l'utilisation de machines et de procédés industriels. |
| Esclavage | Système social et économique dans lequel des êtres humains sont considérés comme la propriété d'autres personnes, privés de leur liberté et contraints au travail forcé. |
| Guerre civile (sécession) | Conflit armé opposant des factions au sein d'un même pays, souvent motivé par des divergences politiques, économiques ou sociales profondes, comme la sécession d'une partie du territoire. |
| Protectionnisme | Politique économique visant à protéger les industries nationales de la concurrence étrangère par le biais de mesures telles que les droits de douane élevés, les subventions et les quotas. |
| Tarifs douaniers | Impôts prélevés sur les biens importés ou exportés, utilisés pour générer des revenus pour l'État et pour protéger les industries nationales. |
| Doctrine Monroe | Principe de politique étrangère américaine énoncé en 1823, affirmant que les continents américains sont fermés à toute nouvelle colonisation européenne et que les États-Unis s'opposeraient à toute intervention européenne dans les affaires des nations américaines. |
| Industrialisation | Processus par lequel une société passe d'une économie principalement agraire à une économie basée sur la production industrielle, caractérisée par l'utilisation de machines et de usines. |
| Pacte colonial | Ensemble de règles et de restrictions imposées par une métropole à ses colonies, visant à assurer l'exclusivité commerciale et à orienter l'économie coloniale au profit de la métropole. |
| Économie extractiviste | Modèle économique axé sur l'extraction et l'exportation de matières premières non transformées, souvent au détriment du développement industriel local et de la diversification économique. |
| Désindustrialisation | Processus de déclin de l'industrie manufacturière dans une région ou un pays, souvent causé par la concurrence étrangère, la perte de marchés ou des politiques économiques défavorables. |
| Révolution Meiji | Période de réformes politiques, sociales et économiques au Japon (1868-1912) qui a conduit à la modernisation rapide du pays, à son industrialisation et à son émergence en tant que puissance mondiale. |
| Traité de Kangawa | Accord de 1854 imposé par les États-Unis au Japon, qui a contraint ce dernier à s'ouvrir au commerce extérieur et a marqué le début de sa modernisation forcée. |
| Taylorisme | Méthode d'organisation du travail visant à améliorer l'efficacité en décomposant les tâches en éléments simples et en optimisant les gestes et les mouvements des ouvriers, popularisée par Frederick Winslow Taylor. |
| Conférence de Berlin | Réunion des puissances européennes en 1884-1885 pour réglementer la colonisation de l'Afrique, aboutissant au partage du continent en zones d'influence et à l'établissement de frontières artificielles. |