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Summary
# Fonctions et explorations biochimiques du foie
Ce résumé présente les fonctions métaboliques, de synthèse, d'épuration et de sécrétion biliaire du foie, ainsi que les explorations biochimiques utilisées pour évaluer sa santé.
## 1. Les fonctions et explorations biochimiques du foie
Le bilan hépatique est prescrit pour rechercher une anomalie, en préciser la nature, la localisation, la gravité, ou pour suivre son évolution. L'interprétation de tout bilan biologique doit se faire dans un contexte clinique. Les principaux marqueurs biologiques hépatiques de routine concernent la cytolyse, la cholestase, l'insuffisance hépato-cellulaire (IHC), et les tumeurs primitives du foie. Des marqueurs plus récents permettent de diagnostiquer la fibrose et la cirrhose sans biopsie [10](#page=10) [26](#page=26) [3](#page=3).
### 1.1 Rappels sur le foie
Le foie est un organe central dans le métabolisme, recevant des nutriments via la veine porte et l'artère hépatique. Il métabolise les glucides, régule la glycémie en stockant et libérant du glycogène. Il métabolise les acides aminés (AA), synthétise des protéines plasmatiques (albumine, facteurs de coagulation) et détoxifie l'ammoniac en urée. Le foie métabolise également les lipides, le cholestérol, synthétise des lipoprotéines et conjugue la bilirubine. Il est un réservoir de vitamines (A, B12) et de fer [3](#page=3) [4](#page=4).
**En résumé, le foie assure des fonctions métaboliques intermédiaires, de synthèse, d'épuration/détoxication, et de sécrétion biliaire.** [4](#page=4).
### 1.2 Fonctions hépatiques spécifiques
#### 1.2.1 Fonctions métaboliques
Le foie est essentiel au métabolisme énergétique, stocke le glycogène pour maintenir la glycémie, synthétise des corps cétoniques, des protéines plasmatiques, et est le seul organe capable de synthétiser l'urée et d'éliminer l'ammoniac. Il métabolise également certaines vitamines et le fer, agissant comme réservoir de ferritine, fer, vitamine B12 et vitamine A [4](#page=4).
> **Tip:** Une augmentation du fer et de la ferritine ne signe pas automatiquement une hémochromatose; elle peut être due à une anomalie hépatique ou à une surcharge pondérale avec stéatose [4](#page=4) [5](#page=5).
#### 1.2.2 Fonctions de synthèse
Le foie synthétise les protéines sériques comme l'albumine (transporteur majeur) et la transferrine (transport du fer). Il est le siège de la production des protéines de la coagulation (facteurs II, VII, IX, X dépendants de la vitamine K, et facteur V indépendant). Les facteurs de coagulation ont une demi-vie courte, les rendant utiles pour évaluer la fonction hépatique. Le foie synthétise également des protéines de la phase aiguë de l'inflammation (haptoglobine, CRP, orosomucoïde) [5](#page=5).
#### 1.2.3 Fonctions d'épuration
* **Ammoniac:** Le foie transforme l'ammoniac, produit toxique du métabolisme des acides aminés, en urée, moins toxique. Une incapacité à le faire entraîne une élévation de l'ammoniac sanguin, pouvant causer une encéphalopathie hépatique. Le dosage de l'ammoniémie est effectué en cas de doute sur une confusion liée à une encéphalopathie hépatique [3](#page=3) [4](#page=4) [6](#page=6).
* **Bilirubine:** La bilirubine est le produit de la dégradation de l'hème. Elle est d'abord "libre" ou "indirecte" (liée à l'albumine) dans le plasma, puis conjuguée par l'hépatocyte avec de l'acide glucuronique, devenant "conjuguée" ou "directe", avant d'être excrétée dans la bile. L'hémoglobine issue de la lyse des globules rouges se lie à l'haptoglobine avant d'être captée par le foie pour la conjugaison de la bilirubine. La bilirubine conjuguée est transformée en urobilinogènes puis stercobilinogènes dans l'intestin, donnant leur couleur aux selles [6](#page=6).
> **Tip:** Une élévation de la bilirubine peut être due à une hémolyse (diminution de l'haptoglobine) ou à un défaut de conjugaison ou d'excrétion hépatique. L'élévation de bilirubine conjuguée conduit à des urines foncées et des selles décolorées. Le syndrome de Gilbert cause une augmentation de bilirubine non conjuguée due à un défaut de glucuronoconjugaison, sans problème hépatique significatif au quotidien [21](#page=21) [7](#page=7) [8](#page=8).
* **Xénobiotiques, alcool:** Le foie biotransforme de nombreuses molécules, médicaments et toxiques, y compris l'alcool [8](#page=8).
#### 1.2.4 Fonctions de sécrétion biliaire
Les acides biliaires, issus du cholestérol, sont sécrétés dans la bile par les hépatocytes et sont essentiels à la digestion des lipides. La majorité est réabsorbée dans un cycle entéro-hépatique. En cas de lésion hépatique, la sécrétion biliaire peut être affectée, conduisant potentiellement à une insuffisance hépato-cellulaire (IHC) [9](#page=9).
### 1.3 Explorations biochimiques hépatiques de routine
Le bilan hépatique est toujours interprété en fonction du contexte clinique, du diagnostic, du traitement, du pronostic et du suivi. Les enzymes dosées incluent les γGT, les phosphatases alcalines (PAL), les transaminases (ASAT et ALAT), ainsi que les protéines plasmatiques hépatiques et de coagulation [10](#page=10).
#### 1.3.1 Transaminases ASAT et ALAT
Ces enzymes interviennent dans le métabolisme des acides aminés [10](#page=10).
* **ALAT:** Principalement dans le foie, cytosoliques. Une lyse cellulaire hépatique entraîne une augmentation importante des ALAT (réversible) [10](#page=10).
* **ASAT:** Cytosoliques et mitochondriales (foie, cœur, muscle cardiaque). Une nécrose tissulaire irréversible entraîne une augmentation des ASAT [10](#page=10).
Les transaminases sont des enzymes intra-cellulaires non spécifiques du foie. Leur augmentation traduit une lésion hépatique, mais le contexte clinique est crucial. Une augmentation d'ASAT et ALAT est généralement réversible; une prédominance des ASAT suggère une atteinte irréversible. Le sport intense peut aussi augmenter leur taux [10](#page=10) [11](#page=11).
#### 1.3.2 Phosphatases alcalines (PAL)
Leur synthèse augmente en cas de cholestase, tant intra qu'extra-hépatique. L'activité totale mesurée provient du foie, de l'os, et du placenta (chez la femme enceinte). Il existe des variations physiologiques (enfance, grossesse) où les normes sont différentes. L'association d'une augmentation des PAL et des γGT suggère une cholestase [11](#page=11).
#### 1.3.3 γ-glutamyltransférase (γGT)
Présentes dans de nombreux tissus, particulièrement dans le foie sur les membranes hépatiques et biliaires. Elles sont sensibles aux rétentions biliaires et sont libérées dans la circulation générale lors d'une obstruction des voies biliaires (cholestase) [11](#page=11) [12](#page=12).
* Augmentation de γGT + PAL → Cholestase [12](#page=12).
* Augmentation de γGT + Transaminases → Hépatite [12](#page=12).
* Augmentation isolée de γGT: peut être due à un alcoolisme chronique, une stéatose hépatique (cause la plus fréquente), ou la prise de certains médicaments (ex: neuroleptiques) [12](#page=12).
#### 1.3.4 Protéines plasmatiques d'origine hépatique
* **Albumine:** Principale protéine synthétisée par le foie, avec une longue demi-vie (>15 jours). Une diminution de son taux sanguin indique une maladie hépatique chronique et diffuse. Son dosage est inutile dans les pathologies aiguës [12](#page=12).
* **Protéines de la phase aiguë et de la coagulation:** Le dosage de la préalbumine, de l'orosomucoïde, de l'haptoglobine, de la transferrine (Trf) renseigne sur l'insuffisance hépato-cellulaire (IHC). L'alpha-fœtoprotéine (AFP) est un marqueur de cirrhose et de cancer du foie (Carcinome Hépatocellulaire - CHC) chez l'adulte [12](#page=12).
* **Protéines de la coagulation:** Les facteurs de coagulation dépendant de la vitamine K (II, VII, X) ont une demi-vie très courte (4-6 heures). Leur diminution rapide en cas de cholestase (malabsorption de vitamine K) entraîne un trouble de la coagulation, détecté par une baisse du Temps de Prothrombine (TP) [13](#page=13).
* Le **facteur V** est indépendant de la vitamine K. Sa diminution, associée à une baisse du TP, signe une atteinte hépatique très importante (IHC) [13](#page=13) [14](#page=14).
* Le **fibrinogène** a une demi-vie longue. Sa diminution indique une cirrhose grave ou une IHC terminale [14](#page=14).
### 1.4 Tests d'exploration des syndromes hépatiques
#### 1.4.1 Test de cytolyse
Révèle la lyse des hépatocytes par l'augmentation des transaminases ALAT et ASAT [14](#page=14).
* Une augmentation < 10 fois la normale (< 10N) suggère des hépatites peu graves [14](#page=14) [17](#page=17).
* Une augmentation > 10N est très grave, souvent liée à des hépatites fulminantes [14](#page=14) [17](#page=17).
> **Tip:** La gravité d'une maladie hépatique n'est pas toujours corrélée à l'importance de la cytolyse. L'importance de l'augmentation des transaminases peut orienter vers des causes: alcoolisme, stéatose, hépatites chroniques (si < 10N); hépatites virales aiguës, médicamenteuses, ischémie hépatique (si > 10N). Une augmentation égale des ASAT et ALAT peut être un signe de gravité [14](#page=14) [16](#page=16) [17](#page=17).
#### 1.4.2 Test de cholestase
Caractérisé par un obstacle sur les voies biliaires, entraînant une rétention de bile. Il se manifeste par une augmentation des PAL, des γGT, et de la bilirubine conjuguée, avec une légère augmentation des transaminases (jusqu'à 2N). Le TP diminue par déficit en vitamine K, tandis que le facteur V reste normal. Les selles sont décolorées et le patient peut présenter un prurit [15](#page=15) [21](#page=21).
#### 1.4.3 Test d'insuffisance hépato-cellulaire (IHC)
Indique que le foie ne remplit plus ses fonctions, notamment la synthèse protéique [15](#page=15).
* **Diminution de l'albumine:** Signe tardif d'IHC chronique et diffuse [15](#page=15).
* **Facteurs de coagulation:** Une diminution du TP et du facteur V est un signe précoce et important d'IHC, le facteur V ayant une demi-vie courte [15](#page=15).
* **Fibrinogène:** Sa diminution est observée en cas d'IHC diffuse aiguë ou chronique terminale [15](#page=15).
L'IHC est retrouvée dans les hépatites fulminantes (intoxication médicamenteuse, champignons), les hépatites chroniques décompensées et les cirrhoses évoluées [15](#page=15).
### 1.5 Syndromes spécifiques
#### 1.5.1 Ascite
L'ascite est une accumulation de liquide dans la cavité péritonéale, avec trois causes principales [18](#page=18) [27](#page=27):
1. **Hypopression vasculaire / fuite d'eau:** Cirrhose (la plus fréquente), syndrome néphrotique, insuffisance cardiaque. L'ascite est pauvre en protéines [18](#page=18) [27](#page=27).
2. **Inflammation du péritoine:** Tuberculose péritonéale, carcinose. L'ascite est riche en protéines [18](#page=18) [27](#page=27).
3. **Obstacle sur l'axe porte ou cave:** Au-dessus du foie (riche en protides), dans ou sous le foie (pauvre en protides) [18](#page=18) [27](#page=27).
> **Tip:** La ponction d'ascite se fait généralement en fosse iliaque gauche. L'utilisation d'un cathlon mou plutôt qu'une aiguille réduit le risque de blesser une anse intestinale. Le drainage se fait en déclive, sans aspiration, et l'administration d'albumine est recommandée pour l'équilibre hydro-électrolytique chez les cirrhotiques [19](#page=19).
#### 1.5.2 Ictère
Coloration jaune de la peau et des muqueuses due à une hyperbilirubinémie [19](#page=19).
* **Ictère hémolytique / à bilirubine non conjuguée (BNC):** Causé par une hémolyse ou un défaut de conjugaison. BNC élevée, bilirubine conjuguée (BC) normale. Selles de coloration normale, urines claires, pas de prurit. L'haptoglobine est basse en cas d'hémolyse [21](#page=21) [7](#page=7).
* **Ictère cholestatique / à bilirubine conjuguée (BC):** Obstacle sur les voies biliaires ou dysfonctionnement hépatique. BC élevée, bilirubine non conjuguée (BNC) normale. Selles blanches, urines foncées, prurit (dû à la remontée des acides biliaires). Les PAL et γGT sont augmentées, et les facteurs de coagulation vitamine K-dépendants diminuent [15](#page=15) [21](#page=21).
* **Cholestase extra-hépatique:** Diagnostic par imagerie (cancer du pancréas, calcul du cholédoque, etc.) [21](#page=21).
* **Cholestase intra-hépatique:** Diagnostic par imagerie ou histologie (hépatites, cirrhoses, tumeurs) [21](#page=21).
> **Tip:** L'ictère du nouveau-né est physiologique si apparu quelques jours après la naissance et lié à l'immaturité enzymatique. Une augmentation de la bilirubine conjuguée est toujours pathologique chez le nouveau-né en raison de l'immaturité de la barrière hémato-encéphalique [22](#page=22).
#### 1.5.3 Cirrhose
Affection chronique diffuse du foie caractérisée par une fibrose remplaçant le tissu sain, souvent due à l'alcoolisme (50%), aux hépatites virales chroniques (B, C), ou à l'hémochromatose [22](#page=22) [27](#page=27).
* **Complications:** Hypertension portale, insuffisance hépatique, carcinome hépatocellulaire (CHC) [22](#page=22).
* **Stades:** Compensée (bilan biologique normal) ou décompensée (après une infection, par exemple) [22](#page=22).
* **Diagnostic:** Interrogatoire (alcoolisme, antécédents), examen clinique (foie ferme, dur, hépatomégalie, signes d'IHC ou d'hypertension portale), examen biologique (pas de signe spécifique si compensée; si décompensée, recherche d'IHC avec facteurs de coagulation, albumine, fibrinogène). Des marqueurs comme la γGT élevée, le volume globulaire moyen augmenté, et un rapport ASAT/ALAT > 1 peuvent orienter vers l'alcoolisme, mais ne sont pas spécifiques [23](#page=23).
* **Pronostic:** La diminution de l'albumine, du fibrinogène, du facteur V et de la pré-albumine est un signe de phase pré-terminale. La diminution de l'urée indique une phase terminale. Le risque de CHC est surveillé par le dosage de l'AFP [12](#page=12) [24](#page=24).
* **Tests non invasifs de la fibrose:** Évaluent le stade de fibrose (F0 à F4) grâce à des marqueurs sanguins (ex: Fibrotest, Actitest). Ils évitent souvent la biopsie mais peuvent avoir des limites (20% de mauvais classements). Ils sont inutiles en cas d'hépatite aiguë, de décompensation, d'infection, d'inflammation chronique ou d'ictère [24](#page=24) [25](#page=25).
### 1.6 Choix et sélection des tests
La recherche d'une cytolyse hépatique, suspectée en cas d'hépatite, repose sur l'anamnèse (facteurs de risque, mode de vie, médicaments), l'examen clinique (syndrome pseudo-grippal, ictère, urines foncées) et les signes biologiques. En cas d'hépatite virale, la cytolyse prédomine, souvent associée à une légère cholestase. L'augmentation des transaminases, leur cinétique, et la recherche de signes d'IHC guident le diagnostic et le pronostic. Pour les hépatites fulminantes, il faut rechercher des signes d'IHC sévères et d'encéphalopathie hépatique (ammoniémie élevée). Un bilan hépatique comprend principalement le dosage des transaminases, PAL, γGT, protéines plasmatiques et de coagulation, ainsi que la bilirubine [16](#page=16) [17](#page=17) [18](#page=18) [26](#page=26).
**Tableau récapitulatif des syndromes biologiques hépatiques** [27](#page=27).
| Syndrome | Test | Signes et interprétation |
|---|---|---|
| Cytolyse | Dosage des ALAT et ASAT | ↑ < 10N : hépatite peu grave
↑ > 10N : hépatite fulminante, grave
↑ molécules stockées (fer, vitB12, ferritine) | | Cholestase | Dosage des γGT, PAL, bilirubine conjuguée | ↑ γGT, PAL, BC
↓ TP (vitK-dépendant)
Selles décolorées, stéatorrhée, ↑ cholestérol | | IHC | Dosage albumine, fibrinogène, facteurs de coagulation | ↓ albumine (chronique)
↓ fibrinogène
↓ facteurs de coagulation (dont facteur V : signe de gravité) | --- # Syndromes biologiques hépatiques et leurs diagnostics Ce thème aborde les principaux syndromes biologiques révélant une atteinte hépatique : la cytolyse, la cholestase et l'insuffisance hépatocellulaire (IHC), ainsi que les tests biochimiques utilisés pour les identifier et évaluer leur gravité. ### 2.1 Principes généraux du bilan hépatique Le bilan hépatique est prescrit pour identifier, préciser la nature, la localisation ou la gravité d'une anomalie hépatique et pour suivre son évolution. Le foie, en tant que carrefour métabolique, est responsable de nombreuses fonctions essentielles, notamment la synthèse de protéines (sériques, de coagulation, inflammatoires), l'épuration de substances toxiques (ammoniac, bilirubine, alcool, xénobiotiques) et la sécrétion biliaire [26](#page=26). Les marqueurs biochimiques les plus couramment utilisés permettent de distinguer : * La cytolyse hépatique [26](#page=26). * La cholestase [26](#page=26). * L'insuffisance hépatocellulaire (IHC) [26](#page=26). * Les tumeurs primitives (non détaillé ici) Un bilan hépatique de routine comprend généralement le dosage de cinq paramètres principaux plus la bilirubine : * Les transaminases (ASAT et ALAT) [26](#page=26). * Les phosphatases alcalines (PAL) [26](#page=26). * Les gamma-glutamyltransférases (γGT) [26](#page=26). * Les protéines plasmatiques d'origine hépatique (albumine, facteurs de coagulation, fibrinogène) [26](#page=26). * La bilirubine [26](#page=26). Il est crucial d'analyser ces résultats en les rapportant toujours à la situation clinique spécifique du patient [26](#page=26). ### 2.2 Les différents syndromes biologiques hépatiques Il existe quatre types de syndromes biologiques hépatiques, dont trois sont détaillés dans ce document [26](#page=26). #### 2.2.1 Le test de cytolyse La cytolyse hépatique est caractérisée par la destruction des hépatocytes. Elle est révélée par une augmentation des activités enzymatiques des transaminases, l'ASAT (Aspartate Aminotransférase) et l'ALAT (Alanine Aminotransférase) [14](#page=14) [27](#page=27). * **Principe:** Dosage des transaminases (ASAT et ALAT) pour mettre en évidence une lyse cellulaire [14](#page=14). * **Interprétation :** * Une augmentation des transaminases de moins de 10 fois la normale (< 10N) suggère des hépatites peu graves [14](#page=14) [27](#page=27). * Une augmentation de plus de 10 fois la normale (> 10N) indique une situation très grave, souvent des hépatites fulminantes, nécessitant une prise en charge rapide et intensive [14](#page=14) [27](#page=27). * **Autres signes:** Peut s'accompagner d'une augmentation des molécules stockées dans le foie comme le fer sérique, la vitamine B12 et la ferritine [14](#page=14). * **Remarque importante:** La gravité de la maladie hépatique n'est pas toujours corrélée à l'importance de la cytolyse. Des transaminases très élevées ne signifient pas nécessairement une issue fatale, et inversement. La clinique est donc essentielle [14](#page=14). * **Dans le cas d'une hépatite virale:** La cytolyse prédomine et précède généralement la cholestase. Si ASAT et ALAT augmentent de manière égale, cela peut être un signe de gravité. Une augmentation préférentielle des ALAT indique une hépatite moins grave [16](#page=16). > **Tip:** En cas de suspicion d'hépatite, une recherche systématique des signes de cholestase et d'insuffisance hépatocellulaire doit être effectuée en parallèle [16](#page=16). #### 2.2.2 Le test de cholestase La cholestase correspond à un obstacle (comme une lithiase) sur les voies biliaires qui entraîne une rétention de la bile. La majorité des affections hépatiques présentent un certain degré de cholestase [15](#page=15). * **Principe:** Dosage des γGT, de la PAL et de la bilirubine conjuguée dans le sang [15](#page=15). * **Signes biologiques :** * Augmentation des PAL (jusqu'à 3-4 fois la normale) [15](#page=15). * Augmentation des γGT [15](#page=15). * Augmentation de la bilirubine conjuguée [15](#page=15). * Petite augmentation des transaminases (environ 2 fois la normale) [15](#page=15). * **Conséquences métaboliques :** * Diminution du Temps de Prothrombine (TP) par malabsorption de la vitamine K, entraînant une baisse des facteurs vitamine K-dépendants. Le facteur V, non vitamine K-dépendant, reste normal [15](#page=15). * Diminution de l'excrétion biliaire, pouvant mener à une augmentation de la synthèse de cholestérol, des triglycérides (TG) et des acides biliaires sériques [15](#page=15). * Stéatorrhée (malabsorption des graisses) [15](#page=15). * **Signes cliniques:** Selles décolorées [15](#page=15) [27](#page=27). * **Interprétation:** Si le facteur V diminue en cas de cholestase, cela indique un cas plus grave [26](#page=26). > **Tip:** La présence de selles décolorées est un signe d'orientation clé vers la cholestase. L'alternance de selles colorées et décolorées peut suggérer un calcul biliaire mobile [15](#page=15). #### 2.2.3 Le test d'insuffisance hépatocellulaire (IHC) L'insuffisance hépatocellulaire survient lorsque le foie ne remplit plus ses fonctions, notamment la synthèse des protéines d'origine hépatique. C'est une situation grave [15](#page=15). * **Principe:** Juger de la gravité d'une lésion hépatique et identifier les troubles de la synthèse protéique d'origine hépatique par des dosages spécifiques [15](#page=15). * **Marqueurs de synthèse protéique :** * **Albumine:** Sa diminution est un signe tardif d'IHC chronique et diffuse en raison de sa longue demi-vie. Son dosage est peu utile pour les hépatites aiguës [15](#page=15). * **Facteurs de coagulation :** * Le TP est diminué [15](#page=15). * La diminution du facteur V est un signe de gravité très précoce et important d'IHC, car il a une demi-vie très courte. C'est le reflet le plus fidèle d'une IHC [14](#page=14) [15](#page=15). * **Fibrinogène:** Son taux diminue en cas d'IHC diffuse aiguë ou chronique terminale. Il a une demi-vie longue, mais son diminution n'est observée que dans les cas très graves d'ictère ou d'IHC terminale [14](#page=14) [15](#page=15). * **Autres signes potentiels (non détaillés cette année) :** * Diminution de l'urée plasmatique au stade terminal d'IHC, car le foie ne peut plus la produire ni éliminer l'azote [15](#page=15). * **Contextes cliniques:** L'IHC est retrouvée dans les hépatites fulminantes (souvent d'origine médicamenteuse, comme le paracétamol), les hépatites chroniques (VHB, VHC), et les cirrhoses très évoluées [15](#page=15). > **Tip:** La diminution du facteur V est un signe biologique particulièrement précoce et significatif d'une atteinte hépatique sévère et d'une insuffisance hépatocellulaire [14](#page=14). ### 2.3 Exploration des syndromes biologiques hépatiques L'exploration des syndromes biologiques hépatiques suit un raisonnement basé sur l'interrogatoire, l'examen clinique et les signes biologiques [16](#page=16). #### 2.3.1 Recherche d'une cytolyse hépatique Elle est suspectée en cas d'hépatite [16](#page=16). * **Interrogatoire:** Recherche de facteurs de risque de contamination virale, antécédents personnels et familiaux, mode de vie (alcoolisme), consommation de médicaments (potentiellement hépatotoxiques, même le paracétamol ou la pilule contraceptive), exposition aux toxiques et consommation de champignons vénéneux [16](#page=16). * **Examen clinique:** Recherche d'un syndrome pseudo-grippal, fatigue, urines foncées, selles décolorées, fièvre, prurit [16](#page=16). * **Signes biologiques :** * Domination de la **cytolyse** avec augmentation des transaminases (ALAT et ASAT) pouvant aller de 2 à 100 fois la normale [16](#page=16). * Association fréquente d'une **petite cholestase** (marqueurs légèrement modifiés). La cytolyse prédomine et précède la cholestase [16](#page=16). * **Recherche de signes d'IHC** pour les cas sévères en phase aiguë, notamment par le dosage du TP et l'évaluation du facteur V. L'attention est également portée sur la quantité d'albumine non liée dans les affections aiguës [16](#page=16). * Au début d'une hépatite, on peut observer une augmentation de la bilirubine totale et des γGT, avec un taux normal de PAL. Par la suite, une augmentation de la bilirubine conjuguée et des PAL (qui restent cependant inférieures à 3 fois la normale) est constatée, avec une γGT toujours augmentée [16](#page=16). #### 2.3.2 Exploration de la cholestase Elle est recherchée parallèlement à la suspicion d'hépatite [16](#page=16). * **Signes biologiques:** Augmentation des γGT, PAL et bilirubine conjuguée [27](#page=27). * **Test de TP:** En cas de cholestase, le TP diminue en raison de la baisse des facteurs vitamine K-dépendants. Si le facteur V est normal, cela confirme un déficit en vitamine K et oriente vers une cholestase ou un problème d'absorption des graisses. Si le facteur V est diminué, cela suggère une lyse hépatique importante [13](#page=13) [14](#page=14). #### 2.3.3 Exploration de l'insuffisance hépatocellulaire (IHC) Elle est recherchée pour les cas sévères, graves et en phase aiguë [16](#page=16). * **Signes biologiques :** * Diminution du TP et du facteur V [16](#page=16). * Dosage du fibrinogène [16](#page=16). * La diminution de l'albumine est un signe tardif d'IHC chronique [15](#page=15). ### 2.4 Tableau récapitulatif des syndromes biologiques hépatiques | Syndrome | Test | Manifestations Biologiques | | :------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | | **Cytolyse** | Dosage ↑ ALAT et ASAT | - Si ↑ < 10N : hépatite peu grave
- Si ↑ > 10N : hépatite fulminante, grave
↑ molécules stockées dans le foie : fer, vitB12, ferritine | | **Cholestase** | Dosage ↑ γGT, PAL et bilirubine conjuguée | ↓ TP (vitK-dep)
Selles décolorées, stéatorrhée et ↑ cholestérol | | **IHC** | | ↓ albumine (= chronique)
↓ fibrinogène
↓ facteurs de coagulation
↓ facteur V (= lyse hépatique importante) => signe de gravité | #### 2.4.1 Informations complémentaires sur des manifestations associées * **Ascite:** Peut avoir 3 grandes causes: hypopression vasculaire/fuite d'eau (cirrhose, syndrome néphrotique, insuffisance cardiaque), inflammation du péritoine (tuberculose, carcinose), ou obstacle sur l'axe porte/cave [27](#page=27). * **Ictère:** Coloration jaune due à une hyperbilirubinémie [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC):** Hémolyse ou défaut de conjugaison. Selles normales, urines claires, pas de prurit. BNC ↑, BC normale [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine conjuguée (BC) = cholestase:** Obstacle sur les voies biliaires ou atteinte des hépatocytes. Selles blanches, urines foncées, prurit. BC ↑ [27](#page=27). * **Cirrhose:** Maladie chronique du foie caractérisée par une fibrose progressive, principalement due à l'alcoolisme, mais aussi aux hépatites virales chroniques (B, C) ou à l'hémochromatose. Elle peut nécessiter une transplantation hépatique en cas d'insuffisance hépatique sévère [27](#page=27). --- # Manifestations cliniques et leurs diagnostics différentiels Ce thème explore les présentations cliniques majeures telles que l'ascite et l'ictère, et comment les analyses biologiques permettent d'identifier leur cause sous-jacente. ### 3.1 Manifestations cliniques #### 3.1.1 Hépatite fulminante L'hépatite fulminante est une forme grave d'hépatite caractérisée par des transaminases supérieures à 10 fois la normale. Elle se manifeste par des signes prononcés d'insuffisance hépatocellulaire et d'encéphalopathie hépatique, résultant de l'incapacité du foie à éliminer l'ammoniac. Une élévation significative de l'ammoniac peut mener au coma. Dans ce cas, le taux d'urée diminue car le foie ne peut plus le transformer, tandis que la créatine augmente. Le seul traitement curatif est la transplantation hépatique. Un risque hémorragique est également présent, associé à une diminution du taux de prothrombine (TP) et du facteur V. Les causes suspectées incluent les hépatites virales A ou B, ainsi que les intoxications au paracétamol ou aux amanites phalloïdes [18](#page=18). > **Tip:** Il est important de noter que le risque de développer une sclérose en plaques suite à la vaccination contre l'hépatite B n'existe pas. De plus, le virus de l'hépatite B est plus résistant à l'air libre que le VIH [18](#page=18). #### 3.1.2 L'ascite L'ascite est la présence de liquide dans la cavité péritonéale. Les trois causes les plus fréquentes sont [18](#page=18) [27](#page=27): 1. **Hypopression vasculaire / fuite d'eau**: Elle survient en raison d'une pression insuffisante dans les vaisseaux, observée dans la cirrhose (la cause la plus fréquente), le syndrome néphrotique ou l'insuffisance cardiaque. L'ascite est alors diluée et pauvre en protides [18](#page=18) [27](#page=27). 2. **Inflammation du péritoine**: Causée par la tuberculose péritonéale ou la carcinose péritonéale. Cette inflammation entraîne le relargage de protéines dans l'ascite, la rendant riche en protides [18](#page=18) [27](#page=27). 3. **Blocage sur l'axe porte ou cave** : * Si le blocage est **au-dessus du foie**, l'ascite est riche en protides [18](#page=18) [27](#page=27). * Si le blocage est **dans ou en dessous du foie**, l'ascite est pauvre en protides [18](#page=18) [27](#page=27). L'ascite est facilement détectable par échographie [18](#page=18). ##### 3.1.2.1 Ponction d'ascite La ponction d'ascite est un élément clé du diagnostic. Avant la ponction, il est essentiel de vérifier, par percussion, que la zone n'est pas occupée par la rate ou le tube digestif, le son ne devant pas être mat. Un risque fréquent est la ponction d'une veine de dérivation pariétale, provoquant un hématome de paroi. En cas de doute sur le volume ou si la percussion est tympanique, une échographie de repérage peut être utile. L'anesthésie locale n'est généralement pas nécessaire, sauf en cas de carcinose péritonéale où la ponction d'un cancer peut être douloureuse [19](#page=19). La ponction se fait préférentiellement en fosse iliaque gauche, car à droite se trouve le foie. En cas de splénomégalie importante, un repérage échographique peut indiquer une ponction à droite. Le point de ponction est situé entre l'ombilic et l'épine iliaque antéro-supérieure (EIAS), à deux tiers vers l'ombilic et un tiers vers l'EIAS, soit au niveau du tiers externe de cette ligne [19](#page=19) [27](#page=27). > **Attention:** L'hernie ombilicale peut piéger une anse grêle. Si cette dernière n'est pas repositionnée avant la ponction, le resserrement de l'ombilic lors du drainage peut entraîner sa nécrose. Pour éviter de blesser une anse intestinale, il est recommandé d'utiliser un cathlon (tube souple) plutôt qu'une aiguille. Le drainage doit se faire en système de déclive, sans aspiration, et une perfusion d'albumine peut être administrée pour stabiliser la pression et prévenir les risques hémodynamiques chez les patients cirrhotiques [19](#page=19). #### 3.1.3 L'ictère L'ictère est une coloration jaune de la peau et des muqueuses due à une hyperbilirubinémie. Il est d'abord visible au niveau conjonctival (subictère) lorsque la bilirubinémie totale est entre 25 et 50 micromoles par litre, puis devient cutané lorsque la bilirubinémie totale dépasse 50 micromoles par litre. La bilirubine conjuguée est le pigment responsable de la couleur brune des selles [19](#page=19). ##### 3.1.3.1 Types d'ictère Il existe deux situations principales d'excès de bilirubine [21](#page=21): 1. **Ictère hémolytique / Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC)**: Causé par une hémolyse ou un défaut de conjugaison. La bilirubine non conjuguée (BNC) est augmentée, tandis que la bilirubine conjuguée (BC) est normale. Les selles sont normalement colorées, les urines claires et il n'y a pas de prurit. En cas d'hémolyse, l'haptoglobine est basse [21](#page=21) [27](#page=27). 2. **Ictère cholestatique / Ictère à bilirubine conjuguée (BC)**: Survient en cas d'obstacle en aval de la conjugaison de la bile ou de dysfonctionnement du pôle canaliculaire des hépatocytes. La bilirubine conjuguée ne rejoint pas le tube digestif, entraînant des selles blanches (décolorées). La BC est éliminée par les reins, d'où des urines foncées. Le prurit est fréquent en raison de la remontée des acides biliaires sous la peau [21](#page=21) [27](#page=27). > **Tip:** Chez le nouveau-né, un ictère physiologique est souvent présent en raison de l'immaturité enzymatique. Cependant, une élévation de la bilirubine conjuguée (BC) chez le nouveau-né est toujours considérée comme pathologique [27](#page=27). ##### 3.1.3.2 Diagnostic étiologique de l'ictère cholestatique Les signes biologiques incluent une augmentation des phosphatases alcalines (PAL) et des gamma-glutamyltransférases (γGT), ainsi qu'une baisse des facteurs de coagulation vitamine K-dépendants (le facteur V reste cependant normal). La diminution de la sécrétion biliaire est due à une cholestase, une obstruction des voies biliaires [21](#page=21) [27](#page=27). On distingue deux types de cholestases selon la localisation de l'obstacle : * **Cholestase extra-hépatique**: Le diagnostic se fait par imagerie. Les causes peuvent être néoplasiques (cancer de la tête du pancréas, ampullome vatérien, cancer des voies biliaires ou de la vésicule biliaire) ou un calcul du cholédoque [21](#page=21). * **Cholestase intra-hépatique**: Si l'atteinte concerne les gros canaux biliaires, le diagnostic est également fait par imagerie. Pour les petits ou moyens canaux biliaires, un diagnostic histologique (biopsie hépatique) est nécessaire. Les causes incluent les hépatites, les cirrhoses ou les tumeurs du foie [21](#page=21). ##### 3.1.3.3 Diagnostic différentiel de l'ictère * **Ictères hémolytiques**: Caractérisés par une destruction des hématies d'origine hématologique. Les selles sont normalement colorées, et il y a une hyperbilirubinémie libre avec une haptoglobine basse [21](#page=21). * **Syndrome de Gilbert**: Déficit en glucuronyl transférase (enzyme UGTA 1-A1) responsable de la conjugaison de la bilirubine. Ce déficit, présent chez environ 10% de la population, n'a généralement pas de retentissement quotidien. Cependant, lors d'une infection affectant le foie, les personnes atteintes peuvent présenter une légère coloration jaunâtre [21](#page=21). > **Important:** L'UGTA 1-A1 joue un rôle dans le métabolisme des médicaments. Les patients atteints du syndrome de Gilbert sont donc plus à risque de développer une toxicité médicamenteuse [21](#page=21). ### 3.2 Examens biologiques et diagnostics étiologiques Les examens biologiques jouent un rôle crucial dans l'identification de la cause des manifestations cliniques hépatiques. #### 3.2.1 Cytolyse hépatique La cytolyse, caractérisée par la lyse des hépatocytes, est réversible. Elle se manifeste par une élévation des ALAT et ASAT. Une élévation inférieure à 10 fois la normale (10N) suggère une hépatite peu grave. En revanche, une élévation supérieure à 10N indique une hépatite fulminante, grave. L'augmentation des molécules stockées dans le foie, telles que le fer, la vitamine B12 et la ferritine, peut également être observée [18](#page=18) [27](#page=27). #### 3.2.2 Cholestase La cholestase correspond à un blocage partiel ou total des voies biliaires. Les marqueurs biologiques incluent une élévation des γGT, des PAL et de la bilirubine conjuguée. On observe également une diminution du TP (dépendant de la vitamine K), une décoloration des selles, une stéatorrhée et une augmentation du cholestérol. Dans les cas de cirrhose chronique, l'albumine est diminuée. D'autres marqueurs de gravité incluent la baisse du fibrinogène, des facteurs de coagulation, et particulièrement du facteur V, qui signe une lyse hépatique importante [27](#page=27). #### 3.2.3 Cirrhose La cirrhose est une maladie chronique du foie marquée par une fibrose progressive du tissu hépatique. Ses causes principales sont l'alcoolisme (50% des cas), les hépatites virales chroniques (B et C), et les hémochromatoses. En présence d'une insuffisance hépatique sévère associée à la cirrhose, une transplantation peut être nécessaire. Divers tests non invasifs existent pour évaluer l'état de la fibrose [27](#page=27). --- # La cirrhose hépatique : diagnostic et pronostic Ce thème aborde la cirrhose hépatique, ses causes, son diagnostic, l'évaluation de la fibrose et son pronostic. ### 4.1 Définition et causes de la cirrhose La cirrhose est une affection chronique et diffuse du foie caractérisée par une fibrose progressive entourant des nodules de régénération. Elle résulte d'agressions répétées du foie qui entraînent la formation de cicatrices fibrotiques remplaçant le tissu sain sans en assurer les fonctions. Les causes les plus fréquentes incluent l'alcoolisme chronique (environ 50% des cas), les virus des hépatites B et C, les maladies métaboliques comme l'hémochromatose (surcharge en fer) et la maladie de Wilson (pathologie du cuivre) [22](#page=22) [24](#page=24) [27](#page=27). Il existe deux types morphologiques de cirrhose : * **Micronodulaire:** caractérisée par de petits nodules de régénération [22](#page=22). * **Macronodulaire:** caractérisée par de gros nodules et un foie bosselé [22](#page=22). ### 4.2 Diagnostic de la cirrhose Le diagnostic de la cirrhose peut être fortuit, découvert lors d'un bilan systématique, ou révélé par une de ses complications [23](#page=23). #### 4.2.1 Interrogatoire L'interrogatoire doit rechercher systématiquement la notion d'alcoolisme chronique, mais aussi explorer le mode de vie, les antécédents familiaux et personnels, ainsi que les facteurs de risque de contamination virale. Il est important de noter que les patients alcooliques ont tendance à sous-estimer leur consommation [23](#page=23). #### 4.2.2 Examen clinique L'examen clinique peut révéler une hépatomégalie avec une surface ferme, un bord tranchant. Les signes d'insuffisance hépatocellulaire (IHC) tels que les angiomes stellaires et l'érythrose palmaire, ainsi que les signes d'hypertension portale comme la splénomégalie et la circulation veineuse collatérale (CVC), doivent être recherchés [23](#page=23). #### 4.2.3 Examen biologique * **Cirrhose compensée:** Le bilan hépatique est généralement normal. Une légère augmentation des transaminases ou de la bilirubine peut être observée en cas de petite complication [23](#page=23). * **Cirrhose décompensée:** On observe une insuffisance hépatocellulaire. La diminution du taux d'albumine et de fibrinogène, protéines à demi-vie longue, reflète l'évolution chronique de l'atteinte hépatique. La recherche des facteurs de coagulation (facteur V, TP) est importante. Une numération formule sanguine (NFS) peut orienter vers un hypersplénisme lié à l'hypertension portale (HTP) par une diminution des plaquettes et une augmentation des polynucléaires neutrophiles (PNN) [23](#page=23). #### 4.2.4 Diagnostic étiologique L'interrogatoire et les examens biologiques aident à identifier la cause de la cirrhose [23](#page=23). * **Alcoolisme:** Des arguments incluent un taux de $\gamma$GT élevé, une augmentation du volume globulaire moyen, des transaminases avec un rapport ASAT/ALAT supérieur à 1, et un électrophorèse des protéines plasmatiques (EPP) montrant un bloc $\beta\gamma$ avec une augmentation des IgA [23](#page=23). * **Hépatites virales:** Recherche de marqueurs viraux. La positivité de l'antigène HBs signe la chronicité de l'hépatite B [23](#page=23). * **Hépatites auto-immunes:** Recherche d'anticorps anti-tissus [23](#page=23). * **Cirrhose biliaire primitive:** Recherche d'anticorps anti-mitochondries [23](#page=23). * **Hépatites médicamenteuses et toxiques:** Causes moins fréquentes [24](#page=24). * **Hépatites métaboliques :** * **Hémochromatose:** Dosages de fer, ferritine, saturation de la transferrine, et recherche de mutations du gène HFE [24](#page=24). * **Maladie de Wilson:** Cuprémie, cuprurie, céruléoplasmine [24](#page=24). ### 4.3 Évaluation de la fibrose Des tests non invasifs sont utilisés pour évaluer le stade de la fibrose (de F0 à F4) sans nécessiter de biopsie hépatique. Ces tests mesurent des marqueurs sanguins [24](#page=24). * **Marqueurs directs de la fibrose:** Acide hyaluronique et peptide NH2-terminal du procollagène de type III [24](#page=24). * **Marqueurs indirects:** ALAT, TP, plaquettes, Apo A1 [24](#page=24). #### 4.3.1 Fibrotest Ce test utilise cinq marqueurs : * Diminution de l'haptoglobine et de l'apolipoprotéine A1 [24](#page=24). * Augmentation de la $\gamma$GT, de la bilirubine totale et de l'$\alpha$2-macroglobuline en cas d'atteinte hépatique [24](#page=24). #### 4.3.2 Actitest Ce test évalue l'activité nécrotique de la fibrose [24](#page=24). > **Tip:** Il existe de nombreux tests de fibrose, dont la validation dépend de la population étudiée. Tous ne sont pas à mémoriser exhaustivement [24](#page=24). ### 4.4 Pronostic de la cirrhose Le pronostic dépend de la stabilité de la cirrhose et de l'importance de l'insuffisance hépatocellulaire (IHC) associée [24](#page=24). * **Phase pré-terminale:** Diminution de l'albumine, du fibrinogène, du facteur V et de la pré-albumine [24](#page=24). * **Phase terminale:** Diminution de l'urée, indiquant que le foie n'est plus capable d'assurer ses fonctions [24](#page=24). > **Tip:** Une cirrhose non associée à une IHC a un meilleur pronostic. L'association à une IHC sévère (<5-10% du foie fonctionnel) indique un mauvais pronostic, nécessitant souvent une transplantation [24](#page=24). La recherche de complications est cruciale pour le pronostic : * **Carcinome hépatocellulaire (CHC):** Dosage de l'$\alpha$-foetoprotéine [24](#page=24). * **Encéphalopathie hépatique hyper-ammoniaque:** Augmentation de l'ammoniac, qui est toxique et peut entraîner un coma lorsque le foie ne peut plus le métaboliser [24](#page=24). Une poursuite de l'intoxication alcoolique aggrave le pronostic et mène à des complications [24](#page=24). ### 4.5 Manifestations cliniques et biologiques associées à la cirrhose et ses complications | Syndrome | Manifestations cliniques | Examens biologiques | | :--------------- | :------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | | **Cytolyse** | Réversible, signe d'atteinte des hépatocytes | ↑ ALAT et ASAT (si > 10N : hépatite fulminante) | | **Cholestase** | Selles décolorées, stéatorrhée, augmentation du cholestérol. Prurit en cas d'ictère cholestatique. | ↑ $\gamma$GT, PAL et bilirubine conjuguée; ↓ TP (facteurs vitamine K dépendants). | [21](#page=21) [27](#page=27). | **IHC** | Chronicité de l'atteinte hépatique. Diminution du volume du foie. | ↓ albumine; ↓ fibrinogène; ↓ facteurs de coagulation; ↓ facteur V (signe de gravité). | [23](#page=23) [27](#page=27). | **Ascite** | Accumulation de liquide dans la cavité péritonéale. | Les causes principales sont l'hypopression vasculaire (cirrhose), l'inflammation du péritoine, ou un obstacle sur l'axe porte/cave. L'analyse du liquide d'ascite (ponction) est utile. | [27](#page=27). | **Ictère** | Coloration jaune due à l'hyperbilirubinémie. | Voir section "Types d'ictère". | [27](#page=27). #### 4.5.1 Types d'ictère * **Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC):** Causé par hémolyse ou défaut de conjugaison. Selles normales, urines claires, pas de prurit. BNC ↑, BC normale [21](#page=21) [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine conjuguée (BC) / Cholestase:** Obstacle sur les voies biliaires ou atteinte des hépatocytes. Selles blanches, urines foncées, prurit [21](#page=21) [27](#page=27). > **Example:** L'ictère du nouveau-né est généralement physiologique dû à l'immaturité enzymatique, mais une augmentation de la bilirubine conjuguée est toujours pathologique et grave en raison du risque d'atteinte neurologique [22](#page=22). --- # Questions d'annales et QCMs Cette section regroupe les questions d'annales et les QCMs du cours, permettant de réviser les connaissances acquises sur le bilan hépatique et les pathologies associées [28](#page=28). ### 5.1 Questions d'annales (Session 1 2025) **Q1. Syndrome de cholestase** Un homme de 61 ans consulte pour un ictère et un prurit apparus 15 jours auparavant, sans autre symptôme. Les éléments biologiques évocateurs d'un syndrome de cholestase sont : * Une augmentation de l’activité sérique des phosphatases alcalines à 2 fois la normale [28](#page=28). * Une augmentation de l'activité sérique de la gamma glutamyltransférase à 5 fois la normale [28](#page=28). Les réponses incorrectes sont: une augmentation de la bilirubine non conjuguée sérique (suggère une hémolyse ou un défaut de conjugaison) une diminution du facteur V de la coagulation plasmatique (signe de gravité d'une atteinte hépatique sévère, pas un signe précoce de cholestase) et une augmentation de l’activité sérique des transaminases à 10 fois la normale (suggère une cytolyse hépatique) [28](#page=28). **Q2. Syndrome de cholestase - Caractéristiques** Le syndrome de cholestase est caractérisé par : * Une augmentation de la bilirubine conjuguée sérique [28](#page=28). * L'association classique d'un ictère et d'un prurit [28](#page=28). * La possibilité de compliquer une hépatite virale [28](#page=28). Il ne s'agit pas nécessairement d'une origine intrahépatique exclusive, et il n'est pas caractérisé par une diminution des facteurs de coagulation vitamine K dépendants sériques dans ses formes débutantes [28](#page=28). **Q3. Évaluation de la sévérité d'une cytolyse hépatique aiguë** Les paramètres biologiques permettant d'évaluer la sévérité d'une cytolyse hépatique aiguë sont : * L’activité sérique des transaminases [28](#page=28). * La concentration plasmatique du facteur V de la coagulation [28](#page=28). L'activité sérique de la gamma glutamyltransférase reflète davantage la cholestase, le score Actitest est un outil de quantification de la stéatose, et la concentration sérique de l’albumine est un marqueur de la fonction de synthèse hépatique à plus long terme [28](#page=28). **Q4. Métabolisme de la bilirubine** Concernant le métabolisme de la bilirubine : * Sa forme circulante dans le sang est liée à l’albumine [28](#page=28). * La stercobiline est le produit final de sa dégradation dans l’intestin [28](#page=28). * Au cours de l’ictère physiologique du nouveau-né, elle est augmentée sous sa forme non conjuguée dans le sang [28](#page=28). La bilirubine provient majoritairement du catabolisme extravasculaire de l'hémoglobine, et physiologiquement, sa concentration sanguine correspond majoritairement à sa forme non conjuguée circulante, la forme conjuguée étant principalement excrétée [28](#page=28). **Q5. Diagnostic de cirrhose hépatique** Les méthodes permettant de porter le diagnostic positif d’une cirrhose hépatique sont : * Le fibroscan® (élastométrie) [28](#page=28). * La ponction biopsie hépatique [28](#page=28). Le dosage sanguin d’acide hyaluronique et l’activité sérique des transaminases sont des marqueurs d'atteinte hépatique et de fibrose, mais ne permettent pas à eux seuls le diagnostic positif de cirrhose établie [28](#page=28). **Corrections des questions d'annales :** * Q1: AC [28](#page=28). * Q2: ABDE [28](#page=28). * Q3: AE [28](#page=28). * Q4: CDE [28](#page=28). * Q5: BCE [28](#page=28). ### 5.2 QCMs des RTs **Q1. Bilan hépatique** * **Vrai:** Le foie est le seul organe capable d’éliminer l’ammoniac [29](#page=29). * **Vrai:** Lors de l’exploration biochimique, une augmentation d’ASAT plus importante que l’augmentation d’ALAT est un marqueur de nécrose irréversible [29](#page=29). **Faux :** * L'hémolyse donne environ 5% de la bilirubine totale, non 15% [29](#page=29). * Une augmentation de la bilirubine non conjuguée indique une hémolyse non physiologique ou un défaut de glucoroconjugaison, et non une obstruction des voies biliaires (qui élève la bilirubine conjuguée) [29](#page=29). * Un facteur V à activité normale n'est pas un signe précoce d'affection hépatique aiguë en cas de trouble de la coagulation; un signe de cholestase ou de problème d'absorption des graisses est plus pertinent [29](#page=29). **Réponses correctes: AD** [29](#page=29). **Q2. Foie et voies biliaires** * **Vrai:** Une ascite due à un blocage dans le foie est pauvre en protides [29](#page=29). **Faux :** * Un ictère à la naissance n'est pas physiologique. Il peut survenir physiologiquement quelques jours après la naissance en raison de l'immaturité des enzymes de conjugaison [29](#page=29). * L’hyperpression vasculaire n’est pas la cause directe de l'ascite; c'est plutôt le manque de pression dans les veines (hypopression) qui peut mener à un reflux de liquide et à une ascite [29](#page=29). * Dans le cas d’un ictère hémolytique, les selles ne sont pas blanches; ce signe clinique est présent dans le cas d’un ictère cholestatique [29](#page=29). **Réponse correcte: B** [29](#page=29). **Q3. Tests d'évaluation de la fibrose** * **Vrai:** Nous disposons de tests sanguins spécifiques pour évaluer le stade de la fibrose hépatique, comme le Fibrotest [30](#page=30). **Faux :** * La biopsie hépatique, bien qu'un examen de référence, engendre trop de désagréments pour le patient pour être utilisée comme méthode de routine pour évaluer le stade de la fibrose [30](#page=30). * Le Fibrotest a environ 80% de corrélation avec la biopsie, et non 50% [30](#page=30). * Il existe de nombreux tests de fibrose car chacun est spécifique d’une population donnée ou d’un type de lésion, et leur développement vise à améliorer la fiabilité globale plutôt qu'à avoir un seul test universel [30](#page=30). **Réponse correcte: B** [30](#page=30). > **Tip :** Les questions d'annales et les QCMs sont d'excellents outils pour cibler les points clés du cours et s'entraîner à formuler des réponses précises, en particulier sur le bilan hépatique et les pathologies associées. > **Tip :** Portez une attention particulière aux distinctions entre les types de bilirubine (conjuguée/non conjuguée) et ce qu'elles indiquent cliniquement, ainsi qu'aux marqueurs spécifiques de la cholestase, de la cytolyse, et de la fonction de synthèse hépatique. > **Tip :** Lors de la révision, notez les erreurs commises dans les QCMs pour identifier vos lacunes et y revenir spécifiquement. --- ## Erreurs courantes à éviter - Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens - Portez attention aux formules et définitions clés - Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section - Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents
↑ > 10N : hépatite fulminante, grave
↑ molécules stockées (fer, vitB12, ferritine) | | Cholestase | Dosage des γGT, PAL, bilirubine conjuguée | ↑ γGT, PAL, BC
↓ TP (vitK-dépendant)
Selles décolorées, stéatorrhée, ↑ cholestérol | | IHC | Dosage albumine, fibrinogène, facteurs de coagulation | ↓ albumine (chronique)
↓ fibrinogène
↓ facteurs de coagulation (dont facteur V : signe de gravité) | --- # Syndromes biologiques hépatiques et leurs diagnostics Ce thème aborde les principaux syndromes biologiques révélant une atteinte hépatique : la cytolyse, la cholestase et l'insuffisance hépatocellulaire (IHC), ainsi que les tests biochimiques utilisés pour les identifier et évaluer leur gravité. ### 2.1 Principes généraux du bilan hépatique Le bilan hépatique est prescrit pour identifier, préciser la nature, la localisation ou la gravité d'une anomalie hépatique et pour suivre son évolution. Le foie, en tant que carrefour métabolique, est responsable de nombreuses fonctions essentielles, notamment la synthèse de protéines (sériques, de coagulation, inflammatoires), l'épuration de substances toxiques (ammoniac, bilirubine, alcool, xénobiotiques) et la sécrétion biliaire [26](#page=26). Les marqueurs biochimiques les plus couramment utilisés permettent de distinguer : * La cytolyse hépatique [26](#page=26). * La cholestase [26](#page=26). * L'insuffisance hépatocellulaire (IHC) [26](#page=26). * Les tumeurs primitives (non détaillé ici) Un bilan hépatique de routine comprend généralement le dosage de cinq paramètres principaux plus la bilirubine : * Les transaminases (ASAT et ALAT) [26](#page=26). * Les phosphatases alcalines (PAL) [26](#page=26). * Les gamma-glutamyltransférases (γGT) [26](#page=26). * Les protéines plasmatiques d'origine hépatique (albumine, facteurs de coagulation, fibrinogène) [26](#page=26). * La bilirubine [26](#page=26). Il est crucial d'analyser ces résultats en les rapportant toujours à la situation clinique spécifique du patient [26](#page=26). ### 2.2 Les différents syndromes biologiques hépatiques Il existe quatre types de syndromes biologiques hépatiques, dont trois sont détaillés dans ce document [26](#page=26). #### 2.2.1 Le test de cytolyse La cytolyse hépatique est caractérisée par la destruction des hépatocytes. Elle est révélée par une augmentation des activités enzymatiques des transaminases, l'ASAT (Aspartate Aminotransférase) et l'ALAT (Alanine Aminotransférase) [14](#page=14) [27](#page=27). * **Principe:** Dosage des transaminases (ASAT et ALAT) pour mettre en évidence une lyse cellulaire [14](#page=14). * **Interprétation :** * Une augmentation des transaminases de moins de 10 fois la normale (< 10N) suggère des hépatites peu graves [14](#page=14) [27](#page=27). * Une augmentation de plus de 10 fois la normale (> 10N) indique une situation très grave, souvent des hépatites fulminantes, nécessitant une prise en charge rapide et intensive [14](#page=14) [27](#page=27). * **Autres signes:** Peut s'accompagner d'une augmentation des molécules stockées dans le foie comme le fer sérique, la vitamine B12 et la ferritine [14](#page=14). * **Remarque importante:** La gravité de la maladie hépatique n'est pas toujours corrélée à l'importance de la cytolyse. Des transaminases très élevées ne signifient pas nécessairement une issue fatale, et inversement. La clinique est donc essentielle [14](#page=14). * **Dans le cas d'une hépatite virale:** La cytolyse prédomine et précède généralement la cholestase. Si ASAT et ALAT augmentent de manière égale, cela peut être un signe de gravité. Une augmentation préférentielle des ALAT indique une hépatite moins grave [16](#page=16). > **Tip:** En cas de suspicion d'hépatite, une recherche systématique des signes de cholestase et d'insuffisance hépatocellulaire doit être effectuée en parallèle [16](#page=16). #### 2.2.2 Le test de cholestase La cholestase correspond à un obstacle (comme une lithiase) sur les voies biliaires qui entraîne une rétention de la bile. La majorité des affections hépatiques présentent un certain degré de cholestase [15](#page=15). * **Principe:** Dosage des γGT, de la PAL et de la bilirubine conjuguée dans le sang [15](#page=15). * **Signes biologiques :** * Augmentation des PAL (jusqu'à 3-4 fois la normale) [15](#page=15). * Augmentation des γGT [15](#page=15). * Augmentation de la bilirubine conjuguée [15](#page=15). * Petite augmentation des transaminases (environ 2 fois la normale) [15](#page=15). * **Conséquences métaboliques :** * Diminution du Temps de Prothrombine (TP) par malabsorption de la vitamine K, entraînant une baisse des facteurs vitamine K-dépendants. Le facteur V, non vitamine K-dépendant, reste normal [15](#page=15). * Diminution de l'excrétion biliaire, pouvant mener à une augmentation de la synthèse de cholestérol, des triglycérides (TG) et des acides biliaires sériques [15](#page=15). * Stéatorrhée (malabsorption des graisses) [15](#page=15). * **Signes cliniques:** Selles décolorées [15](#page=15) [27](#page=27). * **Interprétation:** Si le facteur V diminue en cas de cholestase, cela indique un cas plus grave [26](#page=26). > **Tip:** La présence de selles décolorées est un signe d'orientation clé vers la cholestase. L'alternance de selles colorées et décolorées peut suggérer un calcul biliaire mobile [15](#page=15). #### 2.2.3 Le test d'insuffisance hépatocellulaire (IHC) L'insuffisance hépatocellulaire survient lorsque le foie ne remplit plus ses fonctions, notamment la synthèse des protéines d'origine hépatique. C'est une situation grave [15](#page=15). * **Principe:** Juger de la gravité d'une lésion hépatique et identifier les troubles de la synthèse protéique d'origine hépatique par des dosages spécifiques [15](#page=15). * **Marqueurs de synthèse protéique :** * **Albumine:** Sa diminution est un signe tardif d'IHC chronique et diffuse en raison de sa longue demi-vie. Son dosage est peu utile pour les hépatites aiguës [15](#page=15). * **Facteurs de coagulation :** * Le TP est diminué [15](#page=15). * La diminution du facteur V est un signe de gravité très précoce et important d'IHC, car il a une demi-vie très courte. C'est le reflet le plus fidèle d'une IHC [14](#page=14) [15](#page=15). * **Fibrinogène:** Son taux diminue en cas d'IHC diffuse aiguë ou chronique terminale. Il a une demi-vie longue, mais son diminution n'est observée que dans les cas très graves d'ictère ou d'IHC terminale [14](#page=14) [15](#page=15). * **Autres signes potentiels (non détaillés cette année) :** * Diminution de l'urée plasmatique au stade terminal d'IHC, car le foie ne peut plus la produire ni éliminer l'azote [15](#page=15). * **Contextes cliniques:** L'IHC est retrouvée dans les hépatites fulminantes (souvent d'origine médicamenteuse, comme le paracétamol), les hépatites chroniques (VHB, VHC), et les cirrhoses très évoluées [15](#page=15). > **Tip:** La diminution du facteur V est un signe biologique particulièrement précoce et significatif d'une atteinte hépatique sévère et d'une insuffisance hépatocellulaire [14](#page=14). ### 2.3 Exploration des syndromes biologiques hépatiques L'exploration des syndromes biologiques hépatiques suit un raisonnement basé sur l'interrogatoire, l'examen clinique et les signes biologiques [16](#page=16). #### 2.3.1 Recherche d'une cytolyse hépatique Elle est suspectée en cas d'hépatite [16](#page=16). * **Interrogatoire:** Recherche de facteurs de risque de contamination virale, antécédents personnels et familiaux, mode de vie (alcoolisme), consommation de médicaments (potentiellement hépatotoxiques, même le paracétamol ou la pilule contraceptive), exposition aux toxiques et consommation de champignons vénéneux [16](#page=16). * **Examen clinique:** Recherche d'un syndrome pseudo-grippal, fatigue, urines foncées, selles décolorées, fièvre, prurit [16](#page=16). * **Signes biologiques :** * Domination de la **cytolyse** avec augmentation des transaminases (ALAT et ASAT) pouvant aller de 2 à 100 fois la normale [16](#page=16). * Association fréquente d'une **petite cholestase** (marqueurs légèrement modifiés). La cytolyse prédomine et précède la cholestase [16](#page=16). * **Recherche de signes d'IHC** pour les cas sévères en phase aiguë, notamment par le dosage du TP et l'évaluation du facteur V. L'attention est également portée sur la quantité d'albumine non liée dans les affections aiguës [16](#page=16). * Au début d'une hépatite, on peut observer une augmentation de la bilirubine totale et des γGT, avec un taux normal de PAL. Par la suite, une augmentation de la bilirubine conjuguée et des PAL (qui restent cependant inférieures à 3 fois la normale) est constatée, avec une γGT toujours augmentée [16](#page=16). #### 2.3.2 Exploration de la cholestase Elle est recherchée parallèlement à la suspicion d'hépatite [16](#page=16). * **Signes biologiques:** Augmentation des γGT, PAL et bilirubine conjuguée [27](#page=27). * **Test de TP:** En cas de cholestase, le TP diminue en raison de la baisse des facteurs vitamine K-dépendants. Si le facteur V est normal, cela confirme un déficit en vitamine K et oriente vers une cholestase ou un problème d'absorption des graisses. Si le facteur V est diminué, cela suggère une lyse hépatique importante [13](#page=13) [14](#page=14). #### 2.3.3 Exploration de l'insuffisance hépatocellulaire (IHC) Elle est recherchée pour les cas sévères, graves et en phase aiguë [16](#page=16). * **Signes biologiques :** * Diminution du TP et du facteur V [16](#page=16). * Dosage du fibrinogène [16](#page=16). * La diminution de l'albumine est un signe tardif d'IHC chronique [15](#page=15). ### 2.4 Tableau récapitulatif des syndromes biologiques hépatiques | Syndrome | Test | Manifestations Biologiques | | :------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | | **Cytolyse** | Dosage ↑ ALAT et ASAT | - Si ↑ < 10N : hépatite peu grave
- Si ↑ > 10N : hépatite fulminante, grave
↑ molécules stockées dans le foie : fer, vitB12, ferritine | | **Cholestase** | Dosage ↑ γGT, PAL et bilirubine conjuguée | ↓ TP (vitK-dep)
Selles décolorées, stéatorrhée et ↑ cholestérol | | **IHC** | | ↓ albumine (= chronique)
↓ fibrinogène
↓ facteurs de coagulation
↓ facteur V (= lyse hépatique importante) => signe de gravité | #### 2.4.1 Informations complémentaires sur des manifestations associées * **Ascite:** Peut avoir 3 grandes causes: hypopression vasculaire/fuite d'eau (cirrhose, syndrome néphrotique, insuffisance cardiaque), inflammation du péritoine (tuberculose, carcinose), ou obstacle sur l'axe porte/cave [27](#page=27). * **Ictère:** Coloration jaune due à une hyperbilirubinémie [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC):** Hémolyse ou défaut de conjugaison. Selles normales, urines claires, pas de prurit. BNC ↑, BC normale [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine conjuguée (BC) = cholestase:** Obstacle sur les voies biliaires ou atteinte des hépatocytes. Selles blanches, urines foncées, prurit. BC ↑ [27](#page=27). * **Cirrhose:** Maladie chronique du foie caractérisée par une fibrose progressive, principalement due à l'alcoolisme, mais aussi aux hépatites virales chroniques (B, C) ou à l'hémochromatose. Elle peut nécessiter une transplantation hépatique en cas d'insuffisance hépatique sévère [27](#page=27). --- # Manifestations cliniques et leurs diagnostics différentiels Ce thème explore les présentations cliniques majeures telles que l'ascite et l'ictère, et comment les analyses biologiques permettent d'identifier leur cause sous-jacente. ### 3.1 Manifestations cliniques #### 3.1.1 Hépatite fulminante L'hépatite fulminante est une forme grave d'hépatite caractérisée par des transaminases supérieures à 10 fois la normale. Elle se manifeste par des signes prononcés d'insuffisance hépatocellulaire et d'encéphalopathie hépatique, résultant de l'incapacité du foie à éliminer l'ammoniac. Une élévation significative de l'ammoniac peut mener au coma. Dans ce cas, le taux d'urée diminue car le foie ne peut plus le transformer, tandis que la créatine augmente. Le seul traitement curatif est la transplantation hépatique. Un risque hémorragique est également présent, associé à une diminution du taux de prothrombine (TP) et du facteur V. Les causes suspectées incluent les hépatites virales A ou B, ainsi que les intoxications au paracétamol ou aux amanites phalloïdes [18](#page=18). > **Tip:** Il est important de noter que le risque de développer une sclérose en plaques suite à la vaccination contre l'hépatite B n'existe pas. De plus, le virus de l'hépatite B est plus résistant à l'air libre que le VIH [18](#page=18). #### 3.1.2 L'ascite L'ascite est la présence de liquide dans la cavité péritonéale. Les trois causes les plus fréquentes sont [18](#page=18) [27](#page=27): 1. **Hypopression vasculaire / fuite d'eau**: Elle survient en raison d'une pression insuffisante dans les vaisseaux, observée dans la cirrhose (la cause la plus fréquente), le syndrome néphrotique ou l'insuffisance cardiaque. L'ascite est alors diluée et pauvre en protides [18](#page=18) [27](#page=27). 2. **Inflammation du péritoine**: Causée par la tuberculose péritonéale ou la carcinose péritonéale. Cette inflammation entraîne le relargage de protéines dans l'ascite, la rendant riche en protides [18](#page=18) [27](#page=27). 3. **Blocage sur l'axe porte ou cave** : * Si le blocage est **au-dessus du foie**, l'ascite est riche en protides [18](#page=18) [27](#page=27). * Si le blocage est **dans ou en dessous du foie**, l'ascite est pauvre en protides [18](#page=18) [27](#page=27). L'ascite est facilement détectable par échographie [18](#page=18). ##### 3.1.2.1 Ponction d'ascite La ponction d'ascite est un élément clé du diagnostic. Avant la ponction, il est essentiel de vérifier, par percussion, que la zone n'est pas occupée par la rate ou le tube digestif, le son ne devant pas être mat. Un risque fréquent est la ponction d'une veine de dérivation pariétale, provoquant un hématome de paroi. En cas de doute sur le volume ou si la percussion est tympanique, une échographie de repérage peut être utile. L'anesthésie locale n'est généralement pas nécessaire, sauf en cas de carcinose péritonéale où la ponction d'un cancer peut être douloureuse [19](#page=19). La ponction se fait préférentiellement en fosse iliaque gauche, car à droite se trouve le foie. En cas de splénomégalie importante, un repérage échographique peut indiquer une ponction à droite. Le point de ponction est situé entre l'ombilic et l'épine iliaque antéro-supérieure (EIAS), à deux tiers vers l'ombilic et un tiers vers l'EIAS, soit au niveau du tiers externe de cette ligne [19](#page=19) [27](#page=27). > **Attention:** L'hernie ombilicale peut piéger une anse grêle. Si cette dernière n'est pas repositionnée avant la ponction, le resserrement de l'ombilic lors du drainage peut entraîner sa nécrose. Pour éviter de blesser une anse intestinale, il est recommandé d'utiliser un cathlon (tube souple) plutôt qu'une aiguille. Le drainage doit se faire en système de déclive, sans aspiration, et une perfusion d'albumine peut être administrée pour stabiliser la pression et prévenir les risques hémodynamiques chez les patients cirrhotiques [19](#page=19). #### 3.1.3 L'ictère L'ictère est une coloration jaune de la peau et des muqueuses due à une hyperbilirubinémie. Il est d'abord visible au niveau conjonctival (subictère) lorsque la bilirubinémie totale est entre 25 et 50 micromoles par litre, puis devient cutané lorsque la bilirubinémie totale dépasse 50 micromoles par litre. La bilirubine conjuguée est le pigment responsable de la couleur brune des selles [19](#page=19). ##### 3.1.3.1 Types d'ictère Il existe deux situations principales d'excès de bilirubine [21](#page=21): 1. **Ictère hémolytique / Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC)**: Causé par une hémolyse ou un défaut de conjugaison. La bilirubine non conjuguée (BNC) est augmentée, tandis que la bilirubine conjuguée (BC) est normale. Les selles sont normalement colorées, les urines claires et il n'y a pas de prurit. En cas d'hémolyse, l'haptoglobine est basse [21](#page=21) [27](#page=27). 2. **Ictère cholestatique / Ictère à bilirubine conjuguée (BC)**: Survient en cas d'obstacle en aval de la conjugaison de la bile ou de dysfonctionnement du pôle canaliculaire des hépatocytes. La bilirubine conjuguée ne rejoint pas le tube digestif, entraînant des selles blanches (décolorées). La BC est éliminée par les reins, d'où des urines foncées. Le prurit est fréquent en raison de la remontée des acides biliaires sous la peau [21](#page=21) [27](#page=27). > **Tip:** Chez le nouveau-né, un ictère physiologique est souvent présent en raison de l'immaturité enzymatique. Cependant, une élévation de la bilirubine conjuguée (BC) chez le nouveau-né est toujours considérée comme pathologique [27](#page=27). ##### 3.1.3.2 Diagnostic étiologique de l'ictère cholestatique Les signes biologiques incluent une augmentation des phosphatases alcalines (PAL) et des gamma-glutamyltransférases (γGT), ainsi qu'une baisse des facteurs de coagulation vitamine K-dépendants (le facteur V reste cependant normal). La diminution de la sécrétion biliaire est due à une cholestase, une obstruction des voies biliaires [21](#page=21) [27](#page=27). On distingue deux types de cholestases selon la localisation de l'obstacle : * **Cholestase extra-hépatique**: Le diagnostic se fait par imagerie. Les causes peuvent être néoplasiques (cancer de la tête du pancréas, ampullome vatérien, cancer des voies biliaires ou de la vésicule biliaire) ou un calcul du cholédoque [21](#page=21). * **Cholestase intra-hépatique**: Si l'atteinte concerne les gros canaux biliaires, le diagnostic est également fait par imagerie. Pour les petits ou moyens canaux biliaires, un diagnostic histologique (biopsie hépatique) est nécessaire. Les causes incluent les hépatites, les cirrhoses ou les tumeurs du foie [21](#page=21). ##### 3.1.3.3 Diagnostic différentiel de l'ictère * **Ictères hémolytiques**: Caractérisés par une destruction des hématies d'origine hématologique. Les selles sont normalement colorées, et il y a une hyperbilirubinémie libre avec une haptoglobine basse [21](#page=21). * **Syndrome de Gilbert**: Déficit en glucuronyl transférase (enzyme UGTA 1-A1) responsable de la conjugaison de la bilirubine. Ce déficit, présent chez environ 10% de la population, n'a généralement pas de retentissement quotidien. Cependant, lors d'une infection affectant le foie, les personnes atteintes peuvent présenter une légère coloration jaunâtre [21](#page=21). > **Important:** L'UGTA 1-A1 joue un rôle dans le métabolisme des médicaments. Les patients atteints du syndrome de Gilbert sont donc plus à risque de développer une toxicité médicamenteuse [21](#page=21). ### 3.2 Examens biologiques et diagnostics étiologiques Les examens biologiques jouent un rôle crucial dans l'identification de la cause des manifestations cliniques hépatiques. #### 3.2.1 Cytolyse hépatique La cytolyse, caractérisée par la lyse des hépatocytes, est réversible. Elle se manifeste par une élévation des ALAT et ASAT. Une élévation inférieure à 10 fois la normale (10N) suggère une hépatite peu grave. En revanche, une élévation supérieure à 10N indique une hépatite fulminante, grave. L'augmentation des molécules stockées dans le foie, telles que le fer, la vitamine B12 et la ferritine, peut également être observée [18](#page=18) [27](#page=27). #### 3.2.2 Cholestase La cholestase correspond à un blocage partiel ou total des voies biliaires. Les marqueurs biologiques incluent une élévation des γGT, des PAL et de la bilirubine conjuguée. On observe également une diminution du TP (dépendant de la vitamine K), une décoloration des selles, une stéatorrhée et une augmentation du cholestérol. Dans les cas de cirrhose chronique, l'albumine est diminuée. D'autres marqueurs de gravité incluent la baisse du fibrinogène, des facteurs de coagulation, et particulièrement du facteur V, qui signe une lyse hépatique importante [27](#page=27). #### 3.2.3 Cirrhose La cirrhose est une maladie chronique du foie marquée par une fibrose progressive du tissu hépatique. Ses causes principales sont l'alcoolisme (50% des cas), les hépatites virales chroniques (B et C), et les hémochromatoses. En présence d'une insuffisance hépatique sévère associée à la cirrhose, une transplantation peut être nécessaire. Divers tests non invasifs existent pour évaluer l'état de la fibrose [27](#page=27). --- # La cirrhose hépatique : diagnostic et pronostic Ce thème aborde la cirrhose hépatique, ses causes, son diagnostic, l'évaluation de la fibrose et son pronostic. ### 4.1 Définition et causes de la cirrhose La cirrhose est une affection chronique et diffuse du foie caractérisée par une fibrose progressive entourant des nodules de régénération. Elle résulte d'agressions répétées du foie qui entraînent la formation de cicatrices fibrotiques remplaçant le tissu sain sans en assurer les fonctions. Les causes les plus fréquentes incluent l'alcoolisme chronique (environ 50% des cas), les virus des hépatites B et C, les maladies métaboliques comme l'hémochromatose (surcharge en fer) et la maladie de Wilson (pathologie du cuivre) [22](#page=22) [24](#page=24) [27](#page=27). Il existe deux types morphologiques de cirrhose : * **Micronodulaire:** caractérisée par de petits nodules de régénération [22](#page=22). * **Macronodulaire:** caractérisée par de gros nodules et un foie bosselé [22](#page=22). ### 4.2 Diagnostic de la cirrhose Le diagnostic de la cirrhose peut être fortuit, découvert lors d'un bilan systématique, ou révélé par une de ses complications [23](#page=23). #### 4.2.1 Interrogatoire L'interrogatoire doit rechercher systématiquement la notion d'alcoolisme chronique, mais aussi explorer le mode de vie, les antécédents familiaux et personnels, ainsi que les facteurs de risque de contamination virale. Il est important de noter que les patients alcooliques ont tendance à sous-estimer leur consommation [23](#page=23). #### 4.2.2 Examen clinique L'examen clinique peut révéler une hépatomégalie avec une surface ferme, un bord tranchant. Les signes d'insuffisance hépatocellulaire (IHC) tels que les angiomes stellaires et l'érythrose palmaire, ainsi que les signes d'hypertension portale comme la splénomégalie et la circulation veineuse collatérale (CVC), doivent être recherchés [23](#page=23). #### 4.2.3 Examen biologique * **Cirrhose compensée:** Le bilan hépatique est généralement normal. Une légère augmentation des transaminases ou de la bilirubine peut être observée en cas de petite complication [23](#page=23). * **Cirrhose décompensée:** On observe une insuffisance hépatocellulaire. La diminution du taux d'albumine et de fibrinogène, protéines à demi-vie longue, reflète l'évolution chronique de l'atteinte hépatique. La recherche des facteurs de coagulation (facteur V, TP) est importante. Une numération formule sanguine (NFS) peut orienter vers un hypersplénisme lié à l'hypertension portale (HTP) par une diminution des plaquettes et une augmentation des polynucléaires neutrophiles (PNN) [23](#page=23). #### 4.2.4 Diagnostic étiologique L'interrogatoire et les examens biologiques aident à identifier la cause de la cirrhose [23](#page=23). * **Alcoolisme:** Des arguments incluent un taux de $\gamma$GT élevé, une augmentation du volume globulaire moyen, des transaminases avec un rapport ASAT/ALAT supérieur à 1, et un électrophorèse des protéines plasmatiques (EPP) montrant un bloc $\beta\gamma$ avec une augmentation des IgA [23](#page=23). * **Hépatites virales:** Recherche de marqueurs viraux. La positivité de l'antigène HBs signe la chronicité de l'hépatite B [23](#page=23). * **Hépatites auto-immunes:** Recherche d'anticorps anti-tissus [23](#page=23). * **Cirrhose biliaire primitive:** Recherche d'anticorps anti-mitochondries [23](#page=23). * **Hépatites médicamenteuses et toxiques:** Causes moins fréquentes [24](#page=24). * **Hépatites métaboliques :** * **Hémochromatose:** Dosages de fer, ferritine, saturation de la transferrine, et recherche de mutations du gène HFE [24](#page=24). * **Maladie de Wilson:** Cuprémie, cuprurie, céruléoplasmine [24](#page=24). ### 4.3 Évaluation de la fibrose Des tests non invasifs sont utilisés pour évaluer le stade de la fibrose (de F0 à F4) sans nécessiter de biopsie hépatique. Ces tests mesurent des marqueurs sanguins [24](#page=24). * **Marqueurs directs de la fibrose:** Acide hyaluronique et peptide NH2-terminal du procollagène de type III [24](#page=24). * **Marqueurs indirects:** ALAT, TP, plaquettes, Apo A1 [24](#page=24). #### 4.3.1 Fibrotest Ce test utilise cinq marqueurs : * Diminution de l'haptoglobine et de l'apolipoprotéine A1 [24](#page=24). * Augmentation de la $\gamma$GT, de la bilirubine totale et de l'$\alpha$2-macroglobuline en cas d'atteinte hépatique [24](#page=24). #### 4.3.2 Actitest Ce test évalue l'activité nécrotique de la fibrose [24](#page=24). > **Tip:** Il existe de nombreux tests de fibrose, dont la validation dépend de la population étudiée. Tous ne sont pas à mémoriser exhaustivement [24](#page=24). ### 4.4 Pronostic de la cirrhose Le pronostic dépend de la stabilité de la cirrhose et de l'importance de l'insuffisance hépatocellulaire (IHC) associée [24](#page=24). * **Phase pré-terminale:** Diminution de l'albumine, du fibrinogène, du facteur V et de la pré-albumine [24](#page=24). * **Phase terminale:** Diminution de l'urée, indiquant que le foie n'est plus capable d'assurer ses fonctions [24](#page=24). > **Tip:** Une cirrhose non associée à une IHC a un meilleur pronostic. L'association à une IHC sévère (<5-10% du foie fonctionnel) indique un mauvais pronostic, nécessitant souvent une transplantation [24](#page=24). La recherche de complications est cruciale pour le pronostic : * **Carcinome hépatocellulaire (CHC):** Dosage de l'$\alpha$-foetoprotéine [24](#page=24). * **Encéphalopathie hépatique hyper-ammoniaque:** Augmentation de l'ammoniac, qui est toxique et peut entraîner un coma lorsque le foie ne peut plus le métaboliser [24](#page=24). Une poursuite de l'intoxication alcoolique aggrave le pronostic et mène à des complications [24](#page=24). ### 4.5 Manifestations cliniques et biologiques associées à la cirrhose et ses complications | Syndrome | Manifestations cliniques | Examens biologiques | | :--------------- | :------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | | **Cytolyse** | Réversible, signe d'atteinte des hépatocytes | ↑ ALAT et ASAT (si > 10N : hépatite fulminante) | | **Cholestase** | Selles décolorées, stéatorrhée, augmentation du cholestérol. Prurit en cas d'ictère cholestatique. | ↑ $\gamma$GT, PAL et bilirubine conjuguée; ↓ TP (facteurs vitamine K dépendants). | [21](#page=21) [27](#page=27). | **IHC** | Chronicité de l'atteinte hépatique. Diminution du volume du foie. | ↓ albumine; ↓ fibrinogène; ↓ facteurs de coagulation; ↓ facteur V (signe de gravité). | [23](#page=23) [27](#page=27). | **Ascite** | Accumulation de liquide dans la cavité péritonéale. | Les causes principales sont l'hypopression vasculaire (cirrhose), l'inflammation du péritoine, ou un obstacle sur l'axe porte/cave. L'analyse du liquide d'ascite (ponction) est utile. | [27](#page=27). | **Ictère** | Coloration jaune due à l'hyperbilirubinémie. | Voir section "Types d'ictère". | [27](#page=27). #### 4.5.1 Types d'ictère * **Ictère à bilirubine non conjuguée (BNC):** Causé par hémolyse ou défaut de conjugaison. Selles normales, urines claires, pas de prurit. BNC ↑, BC normale [21](#page=21) [27](#page=27). * **Ictère à bilirubine conjuguée (BC) / Cholestase:** Obstacle sur les voies biliaires ou atteinte des hépatocytes. Selles blanches, urines foncées, prurit [21](#page=21) [27](#page=27). > **Example:** L'ictère du nouveau-né est généralement physiologique dû à l'immaturité enzymatique, mais une augmentation de la bilirubine conjuguée est toujours pathologique et grave en raison du risque d'atteinte neurologique [22](#page=22). --- # Questions d'annales et QCMs Cette section regroupe les questions d'annales et les QCMs du cours, permettant de réviser les connaissances acquises sur le bilan hépatique et les pathologies associées [28](#page=28). ### 5.1 Questions d'annales (Session 1 2025) **Q1. Syndrome de cholestase** Un homme de 61 ans consulte pour un ictère et un prurit apparus 15 jours auparavant, sans autre symptôme. Les éléments biologiques évocateurs d'un syndrome de cholestase sont : * Une augmentation de l’activité sérique des phosphatases alcalines à 2 fois la normale [28](#page=28). * Une augmentation de l'activité sérique de la gamma glutamyltransférase à 5 fois la normale [28](#page=28). Les réponses incorrectes sont: une augmentation de la bilirubine non conjuguée sérique (suggère une hémolyse ou un défaut de conjugaison) une diminution du facteur V de la coagulation plasmatique (signe de gravité d'une atteinte hépatique sévère, pas un signe précoce de cholestase) et une augmentation de l’activité sérique des transaminases à 10 fois la normale (suggère une cytolyse hépatique) [28](#page=28). **Q2. Syndrome de cholestase - Caractéristiques** Le syndrome de cholestase est caractérisé par : * Une augmentation de la bilirubine conjuguée sérique [28](#page=28). * L'association classique d'un ictère et d'un prurit [28](#page=28). * La possibilité de compliquer une hépatite virale [28](#page=28). Il ne s'agit pas nécessairement d'une origine intrahépatique exclusive, et il n'est pas caractérisé par une diminution des facteurs de coagulation vitamine K dépendants sériques dans ses formes débutantes [28](#page=28). **Q3. Évaluation de la sévérité d'une cytolyse hépatique aiguë** Les paramètres biologiques permettant d'évaluer la sévérité d'une cytolyse hépatique aiguë sont : * L’activité sérique des transaminases [28](#page=28). * La concentration plasmatique du facteur V de la coagulation [28](#page=28). L'activité sérique de la gamma glutamyltransférase reflète davantage la cholestase, le score Actitest est un outil de quantification de la stéatose, et la concentration sérique de l’albumine est un marqueur de la fonction de synthèse hépatique à plus long terme [28](#page=28). **Q4. Métabolisme de la bilirubine** Concernant le métabolisme de la bilirubine : * Sa forme circulante dans le sang est liée à l’albumine [28](#page=28). * La stercobiline est le produit final de sa dégradation dans l’intestin [28](#page=28). * Au cours de l’ictère physiologique du nouveau-né, elle est augmentée sous sa forme non conjuguée dans le sang [28](#page=28). La bilirubine provient majoritairement du catabolisme extravasculaire de l'hémoglobine, et physiologiquement, sa concentration sanguine correspond majoritairement à sa forme non conjuguée circulante, la forme conjuguée étant principalement excrétée [28](#page=28). **Q5. Diagnostic de cirrhose hépatique** Les méthodes permettant de porter le diagnostic positif d’une cirrhose hépatique sont : * Le fibroscan® (élastométrie) [28](#page=28). * La ponction biopsie hépatique [28](#page=28). Le dosage sanguin d’acide hyaluronique et l’activité sérique des transaminases sont des marqueurs d'atteinte hépatique et de fibrose, mais ne permettent pas à eux seuls le diagnostic positif de cirrhose établie [28](#page=28). **Corrections des questions d'annales :** * Q1: AC [28](#page=28). * Q2: ABDE [28](#page=28). * Q3: AE [28](#page=28). * Q4: CDE [28](#page=28). * Q5: BCE [28](#page=28). ### 5.2 QCMs des RTs **Q1. Bilan hépatique** * **Vrai:** Le foie est le seul organe capable d’éliminer l’ammoniac [29](#page=29). * **Vrai:** Lors de l’exploration biochimique, une augmentation d’ASAT plus importante que l’augmentation d’ALAT est un marqueur de nécrose irréversible [29](#page=29). **Faux :** * L'hémolyse donne environ 5% de la bilirubine totale, non 15% [29](#page=29). * Une augmentation de la bilirubine non conjuguée indique une hémolyse non physiologique ou un défaut de glucoroconjugaison, et non une obstruction des voies biliaires (qui élève la bilirubine conjuguée) [29](#page=29). * Un facteur V à activité normale n'est pas un signe précoce d'affection hépatique aiguë en cas de trouble de la coagulation; un signe de cholestase ou de problème d'absorption des graisses est plus pertinent [29](#page=29). **Réponses correctes: AD** [29](#page=29). **Q2. Foie et voies biliaires** * **Vrai:** Une ascite due à un blocage dans le foie est pauvre en protides [29](#page=29). **Faux :** * Un ictère à la naissance n'est pas physiologique. Il peut survenir physiologiquement quelques jours après la naissance en raison de l'immaturité des enzymes de conjugaison [29](#page=29). * L’hyperpression vasculaire n’est pas la cause directe de l'ascite; c'est plutôt le manque de pression dans les veines (hypopression) qui peut mener à un reflux de liquide et à une ascite [29](#page=29). * Dans le cas d’un ictère hémolytique, les selles ne sont pas blanches; ce signe clinique est présent dans le cas d’un ictère cholestatique [29](#page=29). **Réponse correcte: B** [29](#page=29). **Q3. Tests d'évaluation de la fibrose** * **Vrai:** Nous disposons de tests sanguins spécifiques pour évaluer le stade de la fibrose hépatique, comme le Fibrotest [30](#page=30). **Faux :** * La biopsie hépatique, bien qu'un examen de référence, engendre trop de désagréments pour le patient pour être utilisée comme méthode de routine pour évaluer le stade de la fibrose [30](#page=30). * Le Fibrotest a environ 80% de corrélation avec la biopsie, et non 50% [30](#page=30). * Il existe de nombreux tests de fibrose car chacun est spécifique d’une population donnée ou d’un type de lésion, et leur développement vise à améliorer la fiabilité globale plutôt qu'à avoir un seul test universel [30](#page=30). **Réponse correcte: B** [30](#page=30). > **Tip :** Les questions d'annales et les QCMs sont d'excellents outils pour cibler les points clés du cours et s'entraîner à formuler des réponses précises, en particulier sur le bilan hépatique et les pathologies associées. > **Tip :** Portez une attention particulière aux distinctions entre les types de bilirubine (conjuguée/non conjuguée) et ce qu'elles indiquent cliniquement, ainsi qu'aux marqueurs spécifiques de la cholestase, de la cytolyse, et de la fonction de synthèse hépatique. > **Tip :** Lors de la révision, notez les erreurs commises dans les QCMs pour identifier vos lacunes et y revenir spécifiquement. --- ## Erreurs courantes à éviter - Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens - Portez attention aux formules et définitions clés - Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section - Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents
Glossary
| Term | Definition |
|------|------------|
| Foie | Organe situé dans la partie supérieure droite de l'abdomen, essentiel à de nombreuses fonctions métaboliques, de synthèse, d'épuration et de sécrétion biliaire. |
| Bilan hépatique | Ensemble d'examens biologiques réalisés pour évaluer la fonction et l'état de santé du foie, incluant le dosage d'enzymes, de protéines et de bilirubine. |
| Cytolyse hépatique | Destruction des cellules hépatiques (hépatocytes), souvent révélée par une augmentation des transaminases sériques (ASAT et ALAT). |
| Cholestase | Ralentissement ou arrêt du flux biliaire, généralement dû à un obstacle sur les voies biliaires, entraînant une accumulation de bile et une augmentation des phosphatases alcalines (PAL) et des gamma-GT (γGT). |
| Insuffisance hépato-cellulaire (IHC) | État dans lequel les cellules du foie ne parviennent plus à assurer leurs fonctions essentielles de synthèse, d'épuration ou de métabolisme. |
| Transaminases (ASAT et ALAT) | Enzymes intracellulaires impliquées dans le métabolisme des acides aminés. Leur augmentation dans le sang indique une lésion des cellules hépatiques. Les ALAT sont plus spécifiques du foie. |
| Phosphatases alcalines (PAL) | Enzymes présentes dans divers tissus, notamment le foie et l'os. Leur augmentation est un marqueur de cholestase, mais peut aussi être due à des causes osseuses ou placentaires. |
| Gamma-glutamyltransférase (γGT) | Enzyme membranaire principalement retrouvée au niveau du foie. Son augmentation est un signe sensible de cholestase et peut aussi être observée dans l'alcoolisme chronique et la stéatose hépatique. |
| Protéines plasmatiques d'origine hépatique | Protéines synthétisées par le foie, dont l'albumine (transporteur majeur) et les facteurs de coagulation, dont les taux peuvent indiquer une altération de la fonction hépatique. |
| Albumine | Protéine plasmatique majeure synthétisée par le foie, jouant un rôle dans la pression oncotique et le transport de nombreuses substances. Sa diminution est un signe tardif d'insuffisance hépatique chronique. |
| Facteurs de coagulation | Protéines produites par le foie nécessaires à la formation du caillot sanguin. Leur dosage, notamment le Temps de Prothrombine (TP), est essentiel pour évaluer la fonction hépatique et la présence d'une carence en vitamine K. |
| Vitamine K | Vitamine liposoluble indispensable à la synthèse de certains facteurs de coagulation hépatiques. Une malabsorption peut entraîner des troubles de la coagulation. |
| Facteur V | Facteur de coagulation non dépendant de la vitamine K. Sa diminution est un signe précoce et important de gravité d'une insuffisance hépato-cellulaire. |
| Fibrinogène | Facteur de coagulation avec une demi-vie longue. Sa diminution est observée dans les atteintes hépatiques chroniques terminales ou les ictères très graves. |
| Bilirubine | Pigment jaune issu de la dégradation de l'hème. Elle existe sous deux formes : non conjuguée (libre) et conjuguée. Son taux élevé dans le sang (hyperbilirubinémie) cause l'ictère. |
| Ictère | Coloration jaune de la peau et des muqueuses due à une hyperbilirubinémie. Il peut être à bilirubine non conjuguée (hémolytique) ou à bilirubine conjuguée (cholestatique). |
| Ascite | Accumulation anormale de liquide dans la cavité péritonéale, souvent associée à une cirrhose, une insuffisance cardiaque ou des pathologies péritonéales. |
| Cirrhose | Affection chronique et diffuse du foie caractérisée par une fibrose progressive et la formation de nodules de régénération, conduisant à une altération de la fonction hépatique. |
| Fibrose hépatique | Processus de cicatrisation du foie caractérisé par une accumulation de tissu conjonctif, qui peut évoluer vers la cirrhose. |
| Tests non invasifs de la fibrose | Examens sanguins (comme le Fibrotest) permettant d'évaluer le degré de fibrose hépatique sans recourir à une biopsie. |
| Hépatite | Inflammation du foie, souvent causée par des virus (hépatites A, B, C...), des toxiques (médicaments, alcool) ou des mécanismes auto-immuns. |
| Hépatite fulminante | Forme rare et grave d'hépatite aiguë entraînant une nécrose massive du foie et une insuffisance hépato-cellulaire sévère. |