Droit des libertés fondamentales 2.pdf
Summary
# La notion de libertés fondamentales et les droits de l'homme
Voici un résumé de cours détaillé sur la notion de libertés fondamentales et les droits de l'homme, basé sur les pages 1 à 4 du document fourni.
## 1. La notion de libertés fondamentales et les droits de l'homme
Ce sujet explore les définitions, distinctions et origines des droits de l'homme, des libertés publiques, des droits fondamentaux et des libertés fondamentales.
### 1.1 Précisions conceptuelles et terminologiques
#### 1.1.1 Droits de l'homme, libertés publiques, droits fondamentaux et libertés fondamentales
En droit positif français, les termes "libertés fondamentales" et "libertés publiques" sont souvent utilisés de manière interchangeable. L'article 34 de la Constitution française indique que les droits civiques liés à l'exercice des libertés publiques relèvent du domaine de la loi [1](#page=1).
La liberté juridique, selon le professeur Morange, implique la capacité d'agir sans contrainte et à l'abri des pressions extérieures, grâce à la reconnaissance d'un droit par l'État. Elle est intrinsèquement liée à l'autonomie individuelle vis-à-vis de l'État. L'article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789 énonce que le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme, parmi lesquels figurent la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression. Ces droits sont considérés comme inhérents à l'être humain, antérieurs à l'État, et naturels. L'article 4 de la DDHC définit la liberté comme le pouvoir de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, et stipule que seules les actions nuisibles à la société peuvent être interdites par la loi [1](#page=1) .
Les libertés publiques, mentionnées à l'article 34 de la Constitution, sont réglementées par le législateur. Selon le professeur Wachsmann, le terme "public" ne vise pas à les opposer aux libertés privées, mais souligne l'origine de la contrainte sociale qui les encadre, c'est-à-dire l'État. L'article 12 de la DDHC mentionne la nécessité d'une force publique pour garantir les droits de l'homme, cette force étant instituée pour le bénéfice de tous [1](#page=1).
Sous la IIIe République, une place prépondérante était accordée à la loi dans la hiérarchie des normes, marquant ainsi "l'âge d'or" des libertés publiques. Morange souligne que ces libertés fonctionnent sans contraintes extérieures, mais que l'État doit créer les conditions de leur réalisation [2](#page=2).
Wachsmann distingue les libertés publiques des droits fondamentaux, ces derniers s'étant développés plus tardivement dans les démocraties européennes (à partir des années 1970). Les droits fondamentaux constituent ainsi une partie des libertés publiques. En Allemagne, par exemple, les droits fondamentaux sont inscrits dans la Loi fondamentale et occupent une place centrale dans la hiérarchie des normes [2](#page=2).
L'expression "droits de l'homme" a parfois été critiquée pour sa connotation de droit naturel, non ancrée dans le droit positif, bien que certains auteurs soutiennent que ces droits sont désormais intégrés au droit positif. La Convention européenne des droits de l'homme reconnaît des libertés fondamentales, et la Loi fondamentale allemande garantit des droits inviolables et inaliénables similaires à ceux de la DDHC de 1789. Les droits fondamentaux, selon Peces-Barba, possèdent des dimensions éthiques et juridiques, distinctes du droit naturel, sans ambiguïté. Pour Wachsmann, le caractère "fondamental" renvoie à une conception axiologique des droits, valorisant des principes essentiels à l'humanité, indépendamment de la hiérarchie des normes. Le droit de ne pas être soumis à la torture est un exemple de droit fondamental [2](#page=2).
La constitutionnalisation est souvent associée aux droits fondamentaux, mais ne s'y limite pas. La décision du Conseil constitutionnel de 1971 sur la liberté d'association a marqué un tournant dans la protection des droits fondamentaux en France, renforcée par l'introduction de la Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) en 2008 [2](#page=2).
Il existe une distinction entre les droits civils et politiques (droits-libertés) et les droits économiques et sociaux (droits-créances). Les libertés publiques sont vues comme des facultés individuelles pour exercer des activités sans pression extérieure, les qualifiant de droits fondamentaux. Les droits publics individuels, quant à eux, permettent aux citoyens d'exiger de l'État des prestations nécessaires à la jouissance de ces libertés, illustrant leur interdépendance [2](#page=2).
Les penseurs marxistes ont critiqué les libertés "bourgeoises", opposant les droits de l'homme de 1789 aux droits des citoyens, jugeant ces derniers trop individualistes et occultant les inégalités sociales. La DDHC de 1793 a montré une préoccupation accrue pour les inégalités de revenu et de statut social. La question des droits sociaux a émergé avec la condition ouvrière, particulièrement après la Seconde Guerre mondiale, la Constitution de 1946 reconnaissant l'importance des droits sociaux et économiques, tels que la sécurité sociale, le préambule de 1946 étant intégré à la hiérarchie des normes par la décision du Conseil constitutionnel de 1971 [2](#page=2).
On distingue généralement plusieurs générations de droits: la première génération concerne les droits politiques, la deuxième les droits économiques et sociaux, et une troisième génération émerge avec les droits environnementaux. Sur le plan international, l'Organisation Internationale du Travail (OIT), créée par le traité de Versailles en 1919, a développé le droit du travail. La Charte des Nations Unies de 1948 fait référence aux droits fondamentaux de l'homme et consacre la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, qui inclut des droits civils, politiques, économiques et sociaux [3](#page=3).
Les droits sociaux sont souvent qualifiés de "droits créances", car leur réalisation nécessite une prestation de l'État. Les droits environnementaux sont considérés comme des "sorties de solidarité". Historiquement, les droits civils et politiques étaient jugés "exigibles" ou "justiciables", tandis que les droits sociaux ne l'étaient pas. Cependant, il existe une relativisation dans la réalisation des droits sociaux et économiques par rapport aux droits politiques, comme en témoigne la Charte sociale européenne qui est "à la carte", permettant aux États de choisir un minimum de droits auxquels s'engager. L'indivisibilité, l'interdépendance et l'universalité des droits de l'homme sont des principes fondamentaux. La jurisprudence du Conseil constitutionnel exprime la distinction entre la justiciabilité des droits sociaux/économiques et des droits politiques/civils, bien que leur valeur juridique soit la même, leur portée diffère [3](#page=3).
#### 1.1.2 Distinction entre droits absolus et droits non-absolus
Un droit absolu est un droit qui ne connaît aucune limitation, exception ou dérogation. La dérogation, en droit français, consiste à ajouter une exception, tandis qu'au niveau européen, elle permet de suspendre temporairement l'application de certains droits et libertés en cas de circonstances exceptionnelles. Cette dérogation doit être strictement encadrée et limitée dans le temps [3](#page=3) [4](#page=4).
Une limitation peut être appliquée même sans état d'exception, contrairement à une dérogation qui est liée à un état d'urgence. Certains droits sont non-dérogeants, comme l'interdiction de la torture, qui ne peut être ni dérogée, ni limitée, ni restreinte. La liberté d'exception peut connaître des restrictions en temps ordinaire et des dérogations en temps extraordinaire. Le droit à la vie n'est pas absolu, car il peut y avoir des exceptions, comme la légitime défense [3](#page=3).
> **Tip:** Il est crucial de distinguer une limitation, qui peut s'appliquer en temps normal, d'une dérogation, réservée aux situations d'urgence et strictement encadrée [3](#page=3).
> **Tip:** Les droits absolus ne tolèrent aucune restriction, exception ou dérogation [4](#page=4).
#### 1.1.3 Les titulaires des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Il faut distinguer le "droit de l'homme" du "droit du citoyen". Le droit de vote, par exemple, est un droit du citoyen, bien qu'il existe des exceptions pour les élections municipales ou européennes où la nationalité n'est pas toujours requise. Le titulaire des droits de l'homme est l'individu, indépendamment de sa nationalité; ainsi, le droit de ne pas être soumis à la torture n'est pas réservé aux citoyens français [4](#page=4).
#### 1.1.4 Le triptyque droits de l'homme, démocratie etQprominence du droit (État de droit)
Les droits de l'homme n'ont de sens que dans une démocratie libérale. Leur protection dépend du caractère libéral du régime et du développement d'un État de droit substantiel, où la garantie juridictionnelle joue un rôle important. Selon Jacques Chevalier, la construction de l'État de droit n'est pas le fruit du hasard. Il ne peut y avoir de garantie pour les droits de l'homme sans démocratie, État de droit et protection juridique [4](#page=4).
Dans un modèle substantiel de l'État de droit, il faut que la souveraineté ne soit pas absolue, afin de ne pas altérer les droits de l'homme. Le Conseil d'État a progressivement limité l'arbitraire de l'autorité administrative, en lien avec le préambule de la DDHC. L'action du législateur est mesurée à l'aune de ces droits, ce qui implique un contrôle de constitutionnalité. La démocratie apparaît comme le seul modèle compatible avec les droits de l'homme [4](#page=4).
### 1.2 Dérogations, circonstances exceptionnelles et régimes d'exception
#### 1.2.1 La notion de dérogation
La dérogation permet aux États de suspendre temporairement l'application de certains droits et libertés garantis par des traités européens, notamment dans des situations exceptionnelles. Cette mesure doit être strictement encadrée et limitée dans le temps [3](#page=3).
#### 1.2.2 Les régimes d'exception français
##### 1.2.2.1 Une théorie prétorienne ancienne : la théorie des circonstances exceptionnelles
##### 1.2.2.2 Les régimes d'exception prévus par la Constitution
###### 1.2.2.2.1 Les pouvoirs exceptionnels de l'article 16 de la Constitution
###### 1.2.2.2.2 L'état de siège
##### 1.2.2.3 Les régimes d'exception non prévus par la Constitution et établis par une loi
###### 1.2.2.3.1 L'état d'urgence
###### 1.2.2.3.2 L'état d'urgence sanitaire
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# Les sources internationales et supranationales des droits de l'homme
Cette section analyse la manière dont les traités internationaux et supranationaux, tels que ceux des Nations Unies et la Convention européenne des droits de l'homme, façonnent la protection des droits fondamentaux [5](#page=5).
### 2.1 La primauté des traités internationaux en droit français
L'article 55 de la Constitution française établit la supériorité des traités régulièrement ratifiés ou approuvés sur les lois, dès leur publication. Cette primauté a été reconnue par le Conseil constitutionnel, notamment dans l'arrêt *Jacques Vabre* de 1975, qui a permis aux juridictions judiciaires de contrôler la conventionalité des lois et d'écarter une disposition législative contraire à un traité international au profit de ce dernier. L'arrêt *Nicolo* du Conseil d'État en 1989 a consacré la suprématie pleine et entière des traités sur les lois, les plaçant dans la hiérarchie des normes à une valeur supra-législative mais infra-constitutionnelle [5](#page=5).
> **Tip:** La réciprocité, condition de l'application de l'article 55, est généralement écartée pour les traités de protection des droits de l'homme, car ceux-ci accordent des droits aux individus à la charge des États [5](#page=5).
#### 2.1.1 L'effet direct et l'invocabilité des traités
L'**effet direct** d'une norme de droit international confère à son destinataire la capacité de s'en prévaloir devant les autorités nationales, y compris les juridictions. L'**invocabilité** est la caractéristique d'une convention internationale autorisant un sujet de droit à en revendiquer le bénéfice à l'égard des tiers. On parle d'**invocabilité d'exclusion** lorsqu'un justiciable utilise une disposition conventionnelle pour écarter l'application d'une loi qui lui est contraire [5](#page=5).
Le Conseil d'État, dans son arrêt *GISTI* de 2012, a précisé que l'effet direct conditionne l'invocabilité, et que le juge administratif doit reconnaître cet effet direct en considérant l'intention des parties, l'économie générale du traité, ainsi que son contenu et ses termes. Une disposition conventionnelle est considérée comme ayant un effet direct si elle ne vise pas exclusivement à régler les relations entre États et ne requiert aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers. L'effet direct s'apprécie disposition par disposition [5](#page=5).
> **Tip:** L'effet direct d'une disposition conventionnelle est reconnu si elle n'a pas pour objet exclusif de régler les relations entre États et ne nécessite aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers [5](#page=5).
### 2.2 Les principaux traités internationaux : le cadre onusien
Les Nations Unies ont élaboré deux pactes majeurs en 1966 : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
#### 2.2.1 Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP)
Entré en vigueur le 23 mars 1976, le PIDCP compte 173 États parties. Il énonce un ensemble de droits civils et politiques, tels que le droit à la vie, l'interdiction de la torture, l'interdiction de l'esclavage, le droit à la dignité humaine, l'interdiction de l'emprisonnement pour dettes et le principe d'égalité devant la loi. En droit français, l'ensemble de ces droits est considéré comme ayant un effet direct devant le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel [6](#page=6).
#### 2.2.2 Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC)
Le PIDESC stipule que les efforts doivent être réalisés au maximum des ressources disponibles. Il prévoit une exception pour les pays en développement, qui peuvent limiter certains droits en fonction de leur situation économique, voire ne pas en faire bénéficier les étrangers en cas de difficultés. Ce pacte ne contient pas le droit de propriété, mais inclut des droits culturels comme le droit à l'éducation. L'enseignement primaire y est présenté comme devant être obligatoire et gratuit, et l'enseignement secondaire comme généralisé [6](#page=6).
Les deux pactes incluent un article commun sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et à déterminer librement leur statut politique, principe conventionnel parmi les plus ratifiés au monde [6](#page=6).
En droit français, l'effet direct du PIDESC est moins évident et est reconnu de manière sélective par les juridictions. Le Conseil constitutionnel a écarté l'effet direct de l'article 11 relatif au droit à un niveau de vie suffisant. Le Conseil d'État reconnaît un effet direct plus restreint, souvent en raison de la question des ressources nécessaires à la réalisation de ces droits, craignant de s'immiscer dans la détermination des politiques publiques. Cette distinction reflète une différence entre la démocratie sociale et la démocratie politique [6](#page=6).
### 2.3 Les sources européennes
Les sources européennes des droits de l'homme émanent principalement du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne.
#### 2.3.1 La Convention européenne des droits de l'homme (CEDH)
Adoptée en 1950 et entrée en vigueur en 1953, la CEDH est le texte phare de la protection des droits de l'homme sur le continent européen, comptant 46 États parties. Elle garantit quasi exclusivement des droits sociaux et politiques, visant à protéger le régime démocratique [6](#page=6) [7](#page=7).
Des protocoles additionnels complètent la Convention, énonçant de nouveaux droits sans l'amender. Le Protocole additionnel n°1 porte sur le droit de propriété. Le Protocole n°4 concerne la liberté de circulation et interdit l'expulsion des ressortissants, ainsi que l'expulsion des étrangers. Le Protocole n°7, adopté en 1984, garantit le droit à indemnisation, des garanties procédurales dans l'expulsion des étrangers, et l'égalité de responsabilité des époux [7](#page=7).
Il est à noter qu'il est impossible de devenir membre du Conseil de l'Europe sans ratifier la CEDH. Le Protocole n°6 et le Protocole n°13 abolissent la peine de mort, d'abord son abolition puis son abolition en toutes circonstances. Le Protocole n°12 interdit la discrimination [7](#page=7).
En droit français, la CEDH, étant un traité, a une valeur supra-législative et infra-constitutionnelle. La France a ratifié la Convention en 1974, et sa portée est particulièrement importante, notamment grâce à son système de contrôle juridictionnel unique. Ce système requiert l'épuisement des voies de recours internes avant de saisir la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Les arrêts de la Cour ont l'autorité de la chose jugée, et le système de surveillance par les États conduit souvent à des réformes législatives anticipées pour éviter de futurs contentieux. La Cour peut ordonner des mesures d'ordre général, étendant la portée de la Convention au-delà de sa valeur intrinsèque. La CEDH est directement invocable devant les juges français, ce qui lui confère une portée considérable [7](#page=7).
#### 2.3.2 La Charte sociale européenne
La Charte sociale européenne, adoptée à Turin en 1961 et entrée en vigueur en 1965, complète la CEDH dans le domaine des droits économiques et sociaux. Elle énonce des droits considérés comme essentiels, d'abord sous forme de principes puis sous forme de droits dont le contenu est précisé [7](#page=7).
La Charte sociale de 1961 établit un système de contrôle impliquant le Comité européen des droits sociaux, qui reçoit les rapports des États sur la mise en œuvre de leurs obligations et peut recevoir des réclamations collectives. Ce comité statue comme une juridiction, respectant le principe contradictoire, mais ses décisions n'ont pas l'autorité de la chose jugée, le qualifiant de "quasi-juridiction" dont le contrôle est limité malgré son indépendance, son impartialité et sa motivation en droit [7](#page=7).
La Charte sociale révisée de 1996, entrée en vigueur en 1999, intègre de nouveaux droits, élargissant la portée des droits sociaux, qui étaient à l'origine centrés sur le travail [7](#page=7).
Le système de contrôle de la Charte sociale européenne est moins accessible que celui de la CEDH, la première étant directement accessible aux individus. Le Comité européen des droits sociaux est un organe quasi-juridictionnel accessible par réclamation collective, à condition que l'État ait accepté ces réclamations. Le Comité statue en droit selon une procédure contradictoire, mais ses décisions n'ont pas l'autorité de la chose jugée, bien que leur interprétation soit opposable à l'État [8](#page=8).
La France a ratifié la Charte sociale initiale en 1973 et la Charte révisée en 1999, adhérant à l'ensemble de ses articles. Un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 14 avril 2010 a statué sur un moyen de non-conformité à la Charte. Le Conseil d'État a reconnu pour la première fois l'effet direct de certaines dispositions de la Charte dans l'arrêt *Fisher* de 2014, notamment l'article 24 (droit à la protection en cas de licenciement) et l'article 5 (droit syndical). Le droit à des conditions de travail équitables a fait l'objet d'un refus d'effet direct [8](#page=8).
La Cour de cassation n'admet pas toujours l'effet direct de certains droits de la Charte, affirmant parfois la non-incompatibilité entre droit français et droit européen sans se prononcer sur l'effet direct. La chambre sociale de la Cour de cassation a également jugé que les dispositions de l'article 24 de la Charte ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers (effet horizontal) [8](#page=8).
> **Tip:** Bien que les décisions du Comité européen des droits sociaux n'aient pas l'autorité de la chose jugée, leur interprétation est opposable à l'État, soulignant leur importance dans l'application de la Charte sociale européenne [8](#page=8).
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# Les sources nationales des droits de l'homme
Voici une synthèse détaillée et complète sur les sources nationales des droits de l'homme, prête pour vos révisions d'examen.
## 3. Les sources nationales des droits de l'homme
Ce thème explore les fondements du droit interne français en matière de droits et libertés fondamentaux, en détaillant les normes constitutionnelles et législatives qui les consacrent et les protègent.
### 3.1 Les normes de rang constitutionnel
La Constitution française, et particulièrement son préambule, ainsi que des textes antérieurs dont la valeur a été reconnue, constituent le socle des droits fondamentaux au niveau national.
#### 3.1.1 L'article 66 de la Constitution
L'article 66 de la Constitution dispose que "nul ne peut être arbitrairement détenu; l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi". Historiquement, cet article englobait un large spectre de libertés, telles que la liberté d'aller et venir ou le mariage. Cependant, la jurisprudence constitutionnelle a progressivement détaché ces libertés de l'article 66 pour leur conférer d'autres fondements. Par conséquent, l'office du juge judiciaire en matière de libertés s'est vu restreint, tandis que la compétence du juge administratif s'est élargie. Le Conseil constitutionnel a ainsi stabilisé une définition plus étroite de la liberté individuelle, centrée sur le principe de non-détention arbitraire, reléguant d'autres libertés à des sphères de protection distinctes [8](#page=8).
#### 3.1.2 La valeur constitutionnelle du préambule de 1946
Le préambule de la Constitution de 1946 a acquis une valeur constitutionnelle grâce à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. La décision fondamentale "Liberté d'association" du 16 juillet 1971 est particulièrement marquante, car elle a élevé au rang constitutionnel les Principes Fondamentaux Reconnus par les Lois de la République (PFRLR) mentionnés dans ce préambule [8](#page=8).
##### 3.1.2.1 Les PFRLR
Les PFRLR constituent des principes ayant une valeur constitutionnelle. Leur identification par la doctrine et le Conseil constitutionnel obéit à des critères précis :
* Le principe doit être consacré par une loi [9](#page=9).
* La loi adoptant ce principe doit avoir été promulguée sous un régime républicain [9](#page=9).
* Le principe doit avoir été appliqué de manière constante, sans qu'aucune loi n'y ait dérogé [9](#page=9).
* Le principe doit intéresser le droit fondamental, la souveraineté nationale ou l'organisation des pouvoirs publics [9](#page=9).
* Il doit être substantiellement constitutionnel [9](#page=9).
Il est important de noter que le Conseil constitutionnel a, suite à des critiques, semblé limiter son pouvoir créateur dans ce domaine. Les principes énoncés par le préambule de 1946, qu'ils soient politiques, économiques ou sociaux, sont rarement contestés dans leur principe même par le Conseil constitutionnel. Toutefois, lorsqu'ils sont confrontés à d'autres principes constitutionnels, les droits issus de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 tendent à avoir une portée supérieure, comme l'illustre une décision de 1982 [9](#page=9).
#### 3.1.3 Le bloc de constitutionnalité
Le bloc de constitutionnalité, concept jurisprudentiel, regroupe les normes qui ont valeur constitutionnelle et servent de référence au contrôle de constitutionnalité des lois. Il comprend [9](#page=9):
* La Constitution de 1958 [9](#page=9).
* Le préambule de 1946 [9](#page=9).
* La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (DDHC) [9](#page=9).
* La Charte de l'environnement de 2004 [9](#page=9).
La portée du préambule de 1946 peut être limitée par rapport au droit commun, à l'exception des dispositions de la DDHC [9](#page=9).
#### 3.1.4 La Charte de l'environnement de 2004
La Charte de l'environnement, intégrée au bloc de constitutionnalité, établit un catalogue de droits et devoirs constitutionnels relatifs à l'environnement. Elle trouve son origine dans la Convention d'Aarhus de 2001. Parmi ses principes clés figurent le principe du pollueur-payeur, ainsi que les principes de précaution et de prévention. L'ensemble du texte, y compris son préambule, a une valeur constitutionnelle [9](#page=9).
#### 3.1.5 Le contrôle de constitutionnalité et la QPC
La Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC), introduite par l'article 61-1 de la Constitution, permet un contrôle *a posteriori* de la constitutionnalité des lois. Les articles 1, 2, 3 et 4 de la Charte de l'environnement peuvent être invoqués dans le cadre d'une QPC. Le Conseil constitutionnel a admis, dans une décision de 2013, le contrôle du principe de précaution (art. 5 de la Charte) au titre des droits et libertés garantis par la Constitution. Ce contrôle *a posteriori* reste cependant limité dans sa portée [9](#page=9).
### 3.2 La loi
L'article 34 de la Constitution confère au législateur la compétence pour fixer les règles relatives aux droits et libertés fondamentaux des citoyens, ainsi que pour garantir leur exercice. Le législateur peut donc énoncer des droits et encadrer leur exercice, une compétence qui demeure sous la surveillance du Conseil constitutionnel [10](#page=10).
#### 3.2.1 L'incompétence négative
Le Conseil constitutionnel peut sanctionner une "incompétence négative" du législateur, c'est-à-dire lorsque ce dernier n'a pas utilisé sa compétence dans sa plénitude, renvoyant par exemple au pouvoir réglementaire des pans de procédures qui auraient dû être définis par la loi [10](#page=10).
#### 3.2.2 Les régimes d'exercice des droits et libertés
La loi institue deux types principaux de régimes pour l'exercice des droits et libertés :
* **Régime répressif:** Il permet l'exercice d'une liberté sans nécessiter d'autorisation préalable. La loi de 1981 sur la liberté de la presse en est un exemple, stipulant que tout journal peut être publié sans déclaration préalable ni dépôt de cautionnement [10](#page=10).
* **Régime préventif:** Ce régime impose une autorisation ou une déclaration préalable avant l'exercice d'une activité. Il ne peut être mis en place que par une loi. L'exemple d'un visa d'exploitation pour la projection d'un film illustre la nécessité d'une autorisation préalable. De même, l'article L211-1 du Code de sécurité intérieure impose une obligation de déclaration préalable pour les manifestations afin d'évaluer les risques de troubles à l'ordre public, pouvant aboutir à une interdiction [10](#page=10).
### 3.3 La jurisprudence des juridictions judiciaires
L'autorité judiciaire joue un rôle crucial en tant que gardienne de la liberté individuelle.
#### 3.3.1 La théorie de la voie de fait
La théorie de la voie de fait a été élaborée par le Tribunal des Conflits (TC) pour sanctionner les agissements de l'administration qui porteraient atteinte aux libertés et droits des individus.
* **Arrêt Action Française du 8 avril 1935:** Cet arrêt fondamental consacre la théorie de la voie de fait. Elle couvre deux situations principales [10](#page=10):
1. Une décision administrative manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration, et qui porte atteinte à une liberté ou au droit de propriété [10](#page=10).
2. L'administration procède à l'exécution forcée d'une décision dans des conditions irrégulières, portant atteinte à une liberté ou au droit de propriété [10](#page=10).
Dans ces cas, l'action de l'administration est considérée comme se plaçant "hors du droit". Le juge judiciaire est alors seul compétent pour constater la voie de fait, ordonner qu'elle cesse, et réparer les préjudices subis [10](#page=10).
* **Évolution de la notion: Arrêt Bergoend contre société EDF du 17 juin 2013:** Dans cette affaire, la Cour de cassation a renvoyé l'affaire devant le TC suite à la demande d'une famille dont la propriété avait été occupée par EDF. Le TC a estimé qu'il ne s'agissait pas d'une voie de fait, marquant une évolution dans la définition de cette théorie [10](#page=10).
> **Tip:** Bien que la DDHC ait une portée importante, n'oubliez pas que le préambule de 1946 et la Charte de l'environnement sont également des éléments essentiels du bloc de constitutionnalité et doivent être considérés dans leur spécificité.
> **Tip:** Le contrôle de constitutionnalité, notamment via la QPC, est un outil dynamique qui permet de faire évoluer l'interprétation et la portée des normes constitutionnelles et des libertés garanties.
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# Les régimes d'exception et la protection des libertés fondamentales
Ce sujet explore les différents cadres juridiques permettant de déroger aux règles normales en période de crise, ainsi que l'impact de ces dérogations sur les droits et libertés fondamentaux.
### 4.1 Le cadre général des dérogations et régimes d'exception
#### 4.1.1 Distinction entre droits de l'homme et droits du citoyen
Il est essentiel de distinguer un droit de l'homme, qui protège l'individu en tant que tel, d'un droit du citoyen, qui est lié à la qualité de ressortissant d'un État et peut être soumis à des conditions de nationalité. Par exemple, le droit de vote est généralement un droit du citoyen, tandis que le droit de ne pas être soumis à la torture est un droit de l'homme [4](#page=4).
#### 4.1.2 Droits de l'homme, démocratie et État de droit
La protection des droits de l'homme est intrinsèquement liée à l'existence d'un régime démocratique et au développement d'un État de droit substantiel, caractérisé par une garantie juridictionnelle effective. Dans un tel État, la souveraineté n'est pas absolue, et les pouvoirs publics sont soumis à des limites visant à prévenir l'arbitraire [4](#page=4).
#### 4.1.3 Dérogations, circonstances exceptionnelles et régimes d'exception
Les régimes d'exception sont des dispositifs juridiques qui permettent de déroger aux garanties habituelles des libertés fondamentales face à des situations de crise. Ils peuvent être d'origine prétorienne (théorie des circonstances exceptionnelles) ou prévus par la Constitution ou par la loi [4](#page=4).
> **Tip:** La notion de "droit absolu" signifie qu'il ne tolère aucune restriction, exception ou dérogation [4](#page=4).
### 4.2 La théorie prétorienne des circonstances exceptionnelles
Cette théorie, née de la jurisprudence administrative française, autorise l'administration à s'affranchir de certaines règles de forme et de fond en cas de "circonstances exceptionnelles" pour assurer la continuité des services publics [14](#page=14).
#### 4.2.1 Origines et évolution
Elle trouve son origine dans la jurisprudence du Conseil d'État (CE) durant la Première Guerre mondiale (CE, Heyries, 1918). Le CE a admis que l'administration pouvait prendre des mesures dérogatoires, sous réserve d'un contrôle juridictionnel. Les conditions de mise en œuvre ont été résumées par le commissaire du gouvernement Letourneur dans l'affaire CE, Logier: une situation anormale, l'impossibilité d'agir légalement, et des effets limités à la durée de la situation anormale [14](#page=14) .
Des arrêts comme CE, Dame Dol et Laurent ont montré que les pouvoirs de police pouvaient être étendus en temps de guerre, la notion d'ordre public devenant plus large. Après la Seconde Guerre mondiale, la théorie a été appliquée de manière plus restrictive, comme dans CE, Canal Robin et Godeault concernant la création de tribunaux militaires. Plus récemment, des décrets exceptionnels liés au COVID-19 ont été fondés sur cette théorie avant la loi sur l'état d'urgence sanitaire. L'affaire CE, commune de Thio a illustré l'application de cette théorie pour dissoudre un conseil municipal en Nouvelle-Calédonie face à de violents affrontements [14](#page=14) [15](#page=15) .
#### 4.2.2 Relation avec les régimes d'exception
La théorie des circonstances exceptionnelles peut coexister avec des régimes d'exception prévus par la loi, comme l'état d'urgence. Par exemple, un arrêté de référé liberté a été fondé sur cette théorie pour suspendre TikTok lors d'émeutes en Nouvelle-Calédonie [15](#page=15).
### 4.3 Les régimes d'exception prévus par la loi
#### 4.3.1 L'état d'urgence
Institué par la loi du 3 avril 1955, initialement pour faire face à l'insurrection algérienne l'état d'urgence est un régime législatif de crise qui ne trouve pas directement sa base dans la Constitution. Il vise à permettre le rétablissement de l'ordre public par des mesures préventives [15](#page=15) [16](#page=16).
* **Déclaration et durée:** Il est décidé par décret en Conseil des ministres et peut être déclaré sur tout ou partie du territoire en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, ou de calamité publique. Sa durée initiale est de 12 jours, mais il peut être prolongé par une loi du Parlement, offrant ainsi un contrôle parlementaire [16](#page=16).
* **Mesures:** Il permet l'extension des pouvoirs de police administrative, conférant aux préfets des pouvoirs accrus pour prévenir les troubles à l'ordre public, limiter la circulation, ou prononcer des assignations à résidence (compétence du Ministre de l'Intérieur). Ces mesures ont un caractère préventif et visent la sûreté et l'ordre public. La loi du 20 novembre 2015 a modifié le régime, notamment en créant l'article 6 §1 [16](#page=16).
* **Contrôle:**
* **Juridictionnel:** Les mesures peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge administratif, notamment via le référé suspension (article L. 521-1 du Code de justice administrative) ou le référé liberté (article L. 521-2 du Code de justice administrative), qui impose un délai de jugement de 48 heures. Le contrôle du juge des référés est restreint sur la légalité du décret déclarant l'état d'urgence, compte tenu du pouvoir d'appréciation étendu du Président de la République [17](#page=17).
* **Parlementaire:** Initialement absent, le contrôle parlementaire s'est développé avec la loi de prorogation et, depuis 2015, l'obligation pour le gouvernement d'informer sans délai les chambres parlementaires des mesures prises [18](#page=18).
* **Constitutionnel:** Le Conseil constitutionnel peut contrôler la constitutionnalité des lois de prorogation. Il exerce un contrôle restreint sur les circonstances de déclenchement, considérant qu'il ne doit pas se substituer au législateur [17](#page=17).
* **Exemples:** La guerre d'indépendance (avril 1961), les émeutes urbaines et les attentats terroristes (2015-2017) [16](#page=16) .
#### 4.3.2 L'état d'urgence sanitaire
Ce régime, introduit par la loi du 23 mars 2020 dans le Code de la santé publique, est un régime d'exception qui peut être déclaré en cas de catastrophe sanitaire menaçant la santé de la population. Il était initialement prévu pour une durée de 12 jours, prorogeable par la loi. Les mesures prises l'étaient par décret du Premier Ministre, dans le seul but de garantir la santé publique. Ce régime a pris fin le 1er juin 2021, mais certaines dispositions ont perduré dans un cadre transitoire [18](#page=18) [20](#page=20).
#### 4.3.3 La sortie de l'état d'urgence et la loi SILT
La loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (SILT) a intégré dans le droit commun certaines mesures dérogatoires de l'état d'urgence, spécifiquement pour la lutte contre le terrorisme. Ces mesures, initialement temporaires, sont devenues permanentes et ont brouillé la distinction entre police administrative et judiciaire [18](#page=18) [19](#page=19).
* **Mesures phares:** Elles incluent la possibilité pour les préfets d'instaurer des périmètres de sécurité (art. L226-1 du Code de la sécurité intérieure), la fermeture de lieux de culte, les visites domiciliaires administratives (perquisitions administratives), et les assignations à résidence [19](#page=19).
* **Brouillage des compétences:** La loi SILT crée une police administrative spéciale en matière de terrorisme, avec des pouvoirs qui s'apparentent à ceux de la police judiciaire, tout en agissant de manière préventive [20](#page=20).
> **Tip:** Les régimes d'exception, même une fois levés, laissent souvent des traces dans le droit commun, modifiant durablement l'équilibre entre sécurité et libertés [20](#page=20).
### 4.4 Les régimes d'exception prévus par la Constitution
#### 4.4.1 Les pouvoirs exceptionnels de l'article 16 de la Constitution
L'article 16 confère au Président de la République des pouvoirs propres pour faire face à une menace grave et immédiate sur les institutions, l'indépendance ou l'intégrité de la nation, lorsque le fonctionnement régulier des pouvoirs publics est interrompu [21](#page=21).
* **Conditions:**
1. Menace grave et immédiate sur les institutions, l'indépendance ou l'intégrité de la nation, ou les engagements internationaux [21](#page=21).
2. Interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics [21](#page=21).
* **Pouvoirs:** Le Président peut adopter toute mesure réglementaire ou législative dans tous les domaines. Il doit consulter le Premier Ministre et les Présidents des assemblées, mais leurs avis sont simples [21](#page=21).
* **Contrôle:** Les mesures prises ne peuvent faire l'objet d'aucun recours juridictionnel, à l'exception de celles qui relèveraient normalement des autorités administratives. La révision constitutionnelle de 2008 a renforcé le contrôle: le Parlement se réunit de plein droit, l'Assemblée nationale ne peut être dissoute, et le Conseil constitutionnel peut être saisi après 30 jours pour vérifier si les conditions de l'alinéa 1 de l'article 16 sont réunies. Ces contrôles sont facultatifs [21](#page=21).
#### 4.4.2 L'état de siège
Ce régime, prévu par l'article 36 de la Constitution, est également un régime d'exception constitutionnel. Il est décidé en Conseil des ministres et il transfère les pouvoirs de police à l'autorité militaire [Non spécifié dans les pages fournies, mais mentionné dans le sommaire de la page 4.
### 4.5 La protection des libertés fondamentales face aux régimes d'exception
Les régimes d'exception, par nature, impliquent des restrictions aux libertés fondamentales. Cependant, plusieurs mécanismes visent à encadrer et contrôler ces dérogations :
* **Le principe de proportionnalité et de nécessité:** Les mesures prises doivent être strictement nécessaires et proportionnées à la situation de crise [17](#page=17) [20](#page=20).
* **Le contrôle juridictionnel:** Les juges administratifs et judiciaires jouent un rôle crucial dans le contrôle des mesures individuelles et des actes réglementaires pris dans le cadre de ces régimes. Le référé liberté est un outil particulièrement important pour sauvegarder des libertés fondamentales dans un délai bref [13](#page=13) [17](#page=17).
* **Le contrôle parlementaire:** Le Parlement a un rôle à jouer, notamment par le vote des lois de prorogation ou par l'information et la saisine du gouvernement [16](#page=16) [18](#page=18).
* **Le contrôle du Conseil constitutionnel:** Il peut se prononcer sur la constitutionnalité des lois qui fondent ou prolongent ces régimes [17](#page=17).
> **Example:** L'arrêt du Conseil d'État de 2015 concernant les migrants à Calais, où le juge des référés a ordonné des améliorations des conditions de vie, illustre comment le juge peut agir pour sauvegarder des droits fondamentaux même en période de tensions [13](#page=13).
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# Le droit à la liberté et à la sûreté
Voici une synthèse détaillée du droit à la liberté et à la sûreté, basée sur les pages fournies.
## 5. Le droit à la liberté et à la sûreté
Le droit à la liberté et à la sûreté, consacré par les ordres constitutionnel français et européen, vise à protéger les individus contre toute privation arbitraire de leur liberté physique.
### 5.1 Le statut du droit et les finalités
Le droit à la liberté et à la sûreté est un droit de valeur constitutionnelle en droit français, affirmé par l'article 66 de la Constitution et l'article 7 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC). Au niveau européen, il est garanti par l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). La Cour de cassation a confirmé en 2010 que l'interdiction de toute détention arbitraire, fondée sur l'article 66 de la Constitution, peut être invoquée dans le cadre d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) [22](#page=22).
L'objectif principal de l'article 5 de la CEDH est de protéger l'individu contre l'arbitraire. Il impose non seulement à l'État de s'abstenir de porter atteinte aux droits fondamentaux, mais aussi de prendre des mesures effectives pour protéger les personnes vulnérables contre toute atteinte illégale à leurs droits, dès lors que l'État a connaissance de la situation. La responsabilité de l'État peut être engagée s'il collabore activement avec un particulier qui prive une personne de sa liberté [23](#page=23) [28](#page=28).
> **Tip:** Le droit à la liberté et à la sûreté, tel qu'entendu par la Cour européenne des droits de l'homme, est une notion autonome. Son interprétation ne dépend pas des qualifications internes des États membres, assurant ainsi une application uniforme à travers l'Europe [23](#page=23).
### 5.2 La notion de privation de liberté
#### 5.2.1 Définition et critères d'identification
La notion de "privation de liberté" au sens de l'article 5 de la CEDH est appréciée en partant de la situation concrète de la personne, en prenant en compte une combinaison de critères. Il ne s'agit pas d'une notion qui dépend d'une définition rigide ou de la qualification interne [23](#page=23) [27](#page=27).
Les critères dégagés par la jurisprudence de la CEDH, notamment dans l'arrêt *Engel et autres c. Pays-Bas*, incluent la **nature, la durée, les effets et les modalités d'exécution** de la mesure. L'arrêt *Storck c. Allemagne* a précisé deux critères clés pour identifier une privation de liberté [23](#page=23) [27](#page=27):
* **Critère objectif:** L'internement d'une personne dans un espace restreint pendant un temps non négligeable. Cela implique un contrôle exercé sur les déplacements de la personne, les possibilités de contact social offertes, et le niveau de surveillance [23](#page=23) [28](#page=28).
* **Critère subjectif:** Une personne ne peut être considérée comme privée de sa liberté que si elle n'a pas valablement consenti à son internement. Le consentement n'est pas valable si la personne est juridiquement incapable de consentir ou de s'opposer à la mesure [24](#page=24) [28](#page=28) [29](#page=29).
L'existence d'un élément de coercition est un indicateur de privation de liberté, même si les mesures sont brèves et qu'il n'y a pas eu de contrainte physique explicite. La Cour de cassation française a également eu l'occasion de se prononcer sur la notion de privation de liberté dans le cadre d'une QPC de décembre 2017, concernant l'assignation à résidence avec astreinte à domicile [26](#page=26) [29](#page=29).
> **Exemple:** Dans l'affaire *Rantsev c. Chypre et Russie*, une jeune femme retenue pendant deux heures à un commissariat, puis remise à son employeur qui l'a séquestrée, a vu sa détention prolongée au commissariat considérée comme une privation de liberté en raison de la collaboration active des autorités, même si la séquestration avait lieu après [23](#page=23) [28](#page=28).
#### 5.2.2 Distinction entre privation et restriction de liberté
La distinction entre privation de liberté et restriction à la liberté de circulation est cruciale. La liberté d'aller et venir, garantie par l'article 66 de la Constitution française et la liberté de circulation, consacrée par l'article 2 du Protocole n°4 de la CEDH, sont distinctes de la liberté physique protégée par l'article 5 de la CEDH [24](#page=24) [29](#page=29).
Il est essentiel de noter qu'il n'y a qu'une **différence de degré ou d'intensité, et non de nature ou d'essence**, entre la privation de liberté et la restriction à la liberté de circulation. Pour déterminer si un individu est privé de sa liberté, il faut considérer sa situation concrète et l'ensemble des critères mentionnés précédemment (genre, durée, effets, modalités d'exécution) [23](#page=23) [24](#page=24) [25](#page=25) [29](#page=29).
> **Exemple:** L'assignation à résidence, comme dans l'affaire *De Tommaso c. Italie*, où le requérant avait des restrictions de sortie la nuit mais pouvait circuler le jour et avoir une vie sociale, a été qualifiée de restriction à la liberté de circulation et non de privation de liberté au sens de l'article 5. En revanche, une assignation à domicile stricte, où la personne ne peut pas quitter son domicile, peut s'analyser comme une privation de liberté si l'intensité et le contrôle sont suffisants, comme dans l'affaire *Guzzardi c. Italie* où le confinement sur une île avec surveillance stricte a été considéré comme une privation de liberté [25](#page=25) [26](#page=26) [29](#page=29).
En droit français, le Conseil constitutionnel a précisé que si une mesure d'assignation à résidence inclut une astreinte à domicile, sa plage horaire ne peut dépasser douze heures par jour sans être considérée comme une mesure privative de liberté, contraire à l'article 66 de la Constitution, car elle n'est pas soumise au contrôle du juge judiciaire [26](#page=26).
La technique de la "nasse" (kettling), utilisée lors du maintien de l'ordre, a été jugée par la CEDH dans l'affaire *Austin et autres c. Royaume-Uni* comme constituant une restriction de la liberté de circuler plutôt qu'une privation de liberté, notamment parce que la police n'avait pas eu le but de retenir les manifestants indéfiniment et que des possibilités de sortie étaient envisagées [30](#page=30).
### 5.3 Les hypothèses admises de privation de liberté
L'article 5, paragraphe 1, de la CEDH énumère de manière exhaustive les cas dans lesquels une personne peut être privée de sa liberté. Ces exceptions appellent une interprétation stricte [31](#page=31) [32](#page=32):
* **a) Détention régulière après condamnation par un tribunal compétent:** C'est le cas classique de l'emprisonnement suite à une décision de justice [32](#page=32).
* **b) Arrestation ou détention régulière pour insoumission à une ordonnance judiciaire ou pour garantir l'exécution d'une obligation légale:** Cela concerne par exemple le non-respect d'une décision de justice obligeant à une action ou à une abstention [32](#page=32).
* **c) Arrestation et détention en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente:** Cela s'applique lorsqu'il existe des raisons plausibles de soupçonner la commission d'une infraction, ou des motifs raisonnables de croire à la nécessité d'empêcher la commission d'une infraction ou la fuite après son accomplissement. Ceci est lié aux garanties de la garde à vue et de la détention provisoire en droit français [32](#page=32) [33](#page=33).
* **d) Détention régulière d'un mineur pour son éducation surveillée ou pour le traduire devant l'autorité compétente:** Mesures spécifiques à la protection de l'enfance [32](#page=32).
* **e) Détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond:** Ces privations de liberté visent à protéger la santé publique et la société [32](#page=32).
* **f) Arrestation ou détention régulière pour empêcher une entrée irrégulière sur le territoire ou dans le cadre d'une procédure d'expulsion ou d'extradition:** Il s'agit des mesures liées à la politique migratoire [32](#page=32).
La Cour européenne des droits de l'homme a ajouté une hypothèse de privation de liberté non expressément mentionnée dans l'article 5, issue de l'arrêt *Hassan c. Royaume-Uni*: la **détention administrative dans un conflit armé** [32](#page=32).
### 5.4 Les conditions de régularité et de légalité d'une privation de liberté
Pour qu'une privation de liberté soit régulière, elle doit non seulement relever d'un des motifs prévus par l'article 5 de la CEDH, mais aussi être conforme au droit national et à la Convention [32](#page=32).
* **Conformité au droit national:** La privation de liberté doit respecter la législation nationale, tant sur le fond que sur la forme [32](#page=32).
* **Conformité à la Convention européenne:** L'application de la législation nationale ne suffit pas; celle-ci doit également respecter les exigences de la Convention. La Cour européenne exerce un contrôle sur cette conformité [32](#page=32).
* **Qualité de la loi:** La loi nationale doit avoir une "qualité", c'est-à-dire que les conditions de privation de liberté doivent être clairement définies et la loi doit être prévisible dans son application [33](#page=33).
* **Principe de proportionnalité:** La privation de liberté est une mesure grave qui ne se justifie qu'en dernier recours, lorsque d'autres mesures moins sévères se sont avérées insuffisantes. Il faut vérifier que le but poursuivi par la privation de liberté correspond à la situation de la personne et que la loi nationale a été respectée [33](#page=33).
* **Absence d'arbitraire:** Les motifs de privation de liberté doivent être "nécessaires" pour atteindre le but déclaré. La privation de liberté doit être indispensable aux circonstances [33](#page=33).
### 5.5 Les garanties pour les personnes privées de liberté
L'article 5 de la CEDH prévoit plusieurs garanties essentielles pour les personnes privées de liberté :
* **Information sur les motifs de l'arrestation (Article 5 §2):** Toute personne arrêtée doit être informée, dans les plus brefs délais et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation. La Cour interprète "plus brefs délais" comme se faisant dans les heures qui suivent l'arrestation [33](#page=33).
* **Présentation à une autorité judiciaire (Article 5 §1 c et §3):** Toute personne privée de liberté doit être présentée "aussitôt" devant une personne exerçant des fonctions judiciaires (un juge). "Aussitôt" signifie sans délai et sans marge de manœuvre. La Cour de cassation a admis un délai de 48 heures pour la garde à vue, mais des délais inférieurs à quatre jours peuvent contrevenir à l'exigence de célérité s'ils ne sont pas justifiés. Le but de cette présentation est de permettre la détection d'éventuels mauvais traitements et de réduire au minimum toute atteinte injustifiée à la liberté individuelle [33](#page=33).
> **Tip:** L'interprétation de la notion de privation de liberté par la Cour européenne est autonome. Cela signifie que même si le droit national ne qualifie pas une situation de privation de liberté, la Cour peut le faire si les faits concrets le justifient [23](#page=23) [27](#page=27).
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# Liberté de conscience, liberté religieuse et liberté d'association
Voici une synthèse détaillée sur la liberté de conscience, la liberté religieuse et la liberté d'association, basée sur les pages fournies.
## 6. Liberté de conscience, liberté religieuse et liberté d'association
Ce thème explore les fondements, le contenu, les restrictions et les garanties juridiques de la liberté de conscience, de la liberté religieuse et de la liberté d'association.
### 6.1 La liberté de conscience et la liberté religieuse
La liberté de conscience, dans son acception la plus large, englobe la liberté de croire ou de ne pas croire, ainsi que la liberté de manifester ses convictions religieuses ou philosophiques. En droit français, elle trouve ses racines dans la Constitution et des textes fondamentaux [34](#page=34) [36](#page=36).
#### 6.1.1 Fondements juridiques en droit français
* **Constitution du 4 octobre 1958 :**
* L'article 1er énonce le principe d'égalité des citoyens devant la loi sans distinction d'origine, de race ou de religion, et proclame que la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale [34](#page=34).
* L'article 10 dispose que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi » [34](#page=34).
* **Préambule de la Constitution de 1946 :**
* L'alinéa 5 garantit que « chacun a le droit de travailler, d'obtenir un emploi et nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances » [34](#page=34).
* **Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État :**
* Elle assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes, sous les seules restrictions nécessaires à l'intérêt de l'ordre public [34](#page=34).
* Cette loi constitue le socle de la laïcité française, dont deux piliers sont la liberté de conscience et religieuse, et la séparation de l'Église et de l'État [34](#page=34).
#### 6.1.2 Le principe de laïcité et ses implications
Le principe de laïcité, inscrit à l'article 1er de la Constitution, découle de la neutralité de l'État [35](#page=35).
* **Neutralité de l'État:** L'État ne reconnaît aucun culte, ne salarie aucun culte et garantit la libre expression de toutes les croyances [35](#page=35).
* **Égalité des citoyens:** Tous les citoyens sont égaux devant la loi, sans distinction de religion [35](#page=35).
* **Interdiction de se prévaloir de ses croyances:** Le principe constitutionnel de laïcité interdit à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre les collectivités publiques et les particuliers [35](#page=35).
* **Financement des cultes:** La loi de 1905 ne reconnaît ni ne salarie de culte. Cependant, la jurisprudence, notamment celle du Conseil constitutionnel, admet des exceptions pour des motifs d'intérêt général, comme la restauration du patrimoine immobilier religieux public, sans que cela ne constitue une subvention directe. Le Conseil d'État a également précisé que la laïcité n'interdit pas l'octroi de subventions à des organismes ayant des activités culturelles, dans l'intérêt général et dans les conditions prévues par la loi [35](#page=35).
#### 6.1.3 Le contenu de la liberté de conscience et de la liberté religieuse selon la CEDH
L'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) garantit la liberté de pensée, de conscience et de religion [36](#page=36).
* **Liberté de pensée, de conscience et de religion :**
* Ce droit inclut la liberté de changer de religion ou de conviction [36](#page=36).
* Il englobe la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites [36](#page=36).
* **Restrictions à la manifestation de la religion:** La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet que de restrictions prévues par la loi, qui sont nécessaires dans une société démocratique à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Ces restrictions doivent remplir trois conditions cumulatives: être prévues par la loi, poursuivre un but légitime, et être nécessaires dans une société démocratique [36](#page=36) [39](#page=39).
* **La notion de conviction:** Une conviction doit atteindre un certain degré de force, de sérieux, de cohérence et d'importance pour être protégée. L'État n'a pas le pouvoir d'évaluer la légitimité des convictions religieuses. Les convictions peuvent être religieuses ou philosophiques [36](#page=36).
* **Aspects de la liberté de conscience :**
* **Droit d'avoir ou de ne pas avoir une conviction:** Ce droit est absolu et inconditionnel. Il inclut le droit de ne pas révéler ses convictions [37](#page=37).
* **Droit de ne pas agir contre ses convictions:** Cela se traduit par la reconnaissance de clauses de conscience, par exemple pour le personnel médical concernant l'IVG. Ces clauses ne doivent cependant pas entraver le droit fondamental de la personne concernée [37](#page=37).
#### 6.1.4 La liberté de manifester sa religion ou sa conviction
Cette liberté est plus large que la simple liberté de culte et présente une nature duale [38](#page=38).
* **Dimension individuelle et collective:** La manifestation peut être individuelle ou collective. La participation à la vie d'une communauté religieuse organisée est une manifestation de la religion protégée par l'article 9 de la CEDH. L'autonomie des communautés religieuses est essentielle au pluralisme [38](#page=38).
* **Exercice public et privé:** La liberté s'exerce aussi bien en public qu'en privé. Les cérémonies religieuses dans les lieux de culte sont publiques et dispensées de certaines formalités, mais restent sous surveillance pour l'ordre public. L'exercice sur la voie publique relève de la liberté de manifestation, soumise à déclaration [38](#page=38).
#### 6.1.5 Restrictions spécifiques à l'exercice de la liberté de manifester sa religion
Des restrictions peuvent être imposées, notamment vestimentaires ou concernant la dissimulation du visage.
* **Restrictions vestimentaires pour les agents du service public:** Le principe de neutralité et de laïcité s'applique aux fonctionnaires et agents exerçant une mission de service public. L'interdiction du port de signes religieux ostentatoires pour ces agents est jugée proportionnée et conforme à l'article 9 de la CEDH, dans le but de garantir la neutralité du service public et de protéger les sentiments religieux des enfants [40](#page=40).
* **Restrictions pour les élèves des établissements publics:** La loi de 2004 interdit le port de signes manifestant ostensiblement une appartenance religieuse dans les établissements scolaires publics. Si la CEDH considère cette restriction comme légitime pour la protection de l'ordre et des droits d'autrui, le Comité des droits de l'homme de l'ONU peut estimer qu'une exclusion est disproportionnée si le signe religieux ne pose pas de problème particulier [41](#page=41).
* **Dissimulation du visage dans l'espace public:** La loi de 2010 interdit la dissimulation du visage dans l'espace public. La CEDH l'a jugée conforme à la liberté religieuse si elle est justifiée par le "vivre ensemble", avec une marge d'appréciation pour les États. Le Comité des droits de l'homme a une approche plus stricte, considérant cette interdiction comme une violation disproportionnée si le droit d'autrui n'est pas clairement identifié [41](#page=41).
* **Fermeture de lieux de culte:** La fermeture de lieux de culte peut être ordonnée pour des motifs de sécurité publique, notamment en cas de provocation à la haine, à la violence ou à la commission d'actes de terrorisme. La loi de 2021 a renforcé ces dispositions avec une finalité plus large que le terrorisme, avec une durée de fermeture maximale de deux mois. Ces mesures font l'objet d'un contrôle de proportionnalité et de respect des procédures contradictoires [42](#page=42) [43](#page=43).
### 6.2 La liberté d'association
La liberté d'association est un principe fondamental en droit français et international, permettant aux individus de se regrouper pour défendre leurs intérêts et poursuivre des objectifs communs [43](#page=43) [44](#page=44).
#### 6.2.1 Sources de la liberté d'association
* **Sources internes :**
* La loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, qualifiée de loi libérale, est le texte fondateur [43](#page=43).
* La jurisprudence administrative (Conseil d'État) et judiciaire (Cour de cassation) ont précisé son contenu [44](#page=44).
* Le Conseil constitutionnel a reconnu la liberté d'association comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) [43](#page=43).
* **Sources internationales :**
* **CEDH:** L'article 11 garantit le droit à la réunion pacifique et le droit à la liberté d'association [44](#page=44).
* **Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP):** L'article 22 consacre la liberté d'association, y compris la création de syndicats [44](#page=44).
* Ces droits ne sont pas absolus et peuvent faire l'objet de restrictions prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique pour protéger l'ordre public [44](#page=44).
#### 6.2.2 La notion d'association
* **Définition légale (Article 1er de la loi de 1901):** Une association est une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, de manière permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que le partage de bénéfices [44](#page=44).
* **But non lucratif:** Cela signifie que les revenus générés ne doivent pas être partagés entre les membres [44](#page=44).
* **Portée autonome:** La notion d'association a une portée autonome en droit européen; la qualification nationale n'est qu'un point de départ [44](#page=44).
* **Permanence:** Le lien qui réunit les membres doit être durable [45](#page=45).
* **Variété des associations:** Elles peuvent avoir des objets très variés et certaines peuvent être reconnues d'utilité publique, leur conférant une capacité juridique étendue. Les associations cultuelles sont soumises à des règles spécifiques en vertu de la loi de 1905 [45](#page=45).
#### 6.2.3 Le type et l'étendue de la liberté d'association
La liberté d'association protège à la fois l'individu et l'association elle-même [45](#page=45).
* **Liberté individuelle:** Chacun est libre de fonder une association, de s'en retirer et d'en déterminer le fonctionnement. Le droit de ne pas adhérer à une association est également protégé (droit négatif) [45](#page=45).
* **Liberté collective:** L'association en tant que telle est titulaire de la liberté d'association, lui permettant de se développer sans ingérence arbitraire de l'État [45](#page=45).
#### 6.2.4 Le régime de création des associations
* **Liberté de principe:** La création d'associations et de groupements de fait est libre et ne nécessite aucune autorisation préalable [46](#page=46).
* **Acquisition de la personnalité juridique:** L'acquisition de la personnalité morale est subordonnée à une déclaration préalable en préfecture. Cette déclaration a un but de publicité et est une condition de capacité juridique, mais l'administration ne peut pas vérifier la conformité de l'objet de l'association à la loi [46](#page=46).
* **Groupements de fait:** Les associations non déclarées sont des groupements de fait. Bien qu'ils n'aient pas la personnalité juridique, leur existence en tant que telle n'est pas illicite [46](#page=46).
* **Associations cultuelles:** Elles doivent faire une double déclaration: une déclaration de qualité cultuelle en plus de la déclaration prévue par la loi de 1901. Le représentant de l'État peut s'opposer à la reconnaissance de cette qualité pour des motifs d'ordre public [46](#page=46).
#### 6.2.5 Le financement des associations
* **Cotisations, activités lucratives, libéralités:** Les associations peuvent être financées par les cotisations de leurs membres, des appels à la générosité publique (soumis à déclaration). Elles peuvent également mener des activités lucratives, ce qui est compatible avec leur but non lucratif. Les associations d'utilité publique peuvent accepter des libéralités [47](#page=47).
* **Subventions publiques:** L'attribution de subventions est discrétionnaire pour l'administration, avec un contrôle restreint du juge administratif. La loi de 2021 impose la souscription d'un "contrat d'engagement républicain" pour bénéficier de subventions. Le non-respect de ce contrat peut entraîner le retrait de la subvention, mais la restitution des subventions antérieures au manquement est interdite si elle porte une atteinte disproportionnée à la liberté d'association [47](#page=47).
* **Financement étranger:** La loi de 2021 renforce le contrôle du soutien reçu par les associations cultuelles, avec un système déclaratif pour les financements étrangers supérieurs à 10 000 euros [48](#page=48).
#### 6.2.6 La dissolution des associations
* **Dissolution judiciaire:** Elle peut être prononcée si l'objet de l'association est illicite [48](#page=48).
* **Dissolution administrative:** Le Code de sécurité intérieure permet la dissolution d'associations ou de groupements de fait dont les membres commettent certains actes, notamment s'ils provoquent à la haine ou à la violence, et si les dirigeants ont été informés sans réagir [48](#page=48).
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# Libertés de réunion et de manifestation
Ce chapitre analyse les libertés de réunion et de manifestation, leurs fondements juridiques, les conditions de leur exercice, et les restrictions possibles.
### 7.1 Fondements juridiques
La liberté de réunion pacifique et la liberté d'association sont des droits fondamentaux reconnus internationalement.
#### 7.1.1 Textes internationaux
* **Article 11 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH)**:
* Garantit le droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association [49](#page=49).
* Les restrictions à ces droits doivent être prévues par la loi, nécessaires dans une société démocratique, et viser à protéger la sécurité nationale, la sûreté publique, la défense de l'ordre, la prévention du crime, la santé ou la morale publique, ou les droits et libertés d'autrui [49](#page=49).
* Aucune disposition ne peut être interprétée comme permettant une activité visant à la destruction des droits et libertés reconnus par la Convention (article 17 CEDH, interdiction de l'abus de droit). La CEDH a implicitement validé la légalité de restrictions basées sur l'ordre public, comme dans l'affaire Ayoub c/ France [49](#page=49).
* **Article 21 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques**:
* Reconnaît le droit de réunion pacifique [49](#page=49).
* Les restrictions doivent être prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique pour des motifs similaires à ceux de l'article 11 CEDH [49](#page=49).
#### 7.1.2 Droit français
* Le droit français n'a pas de définition autonome pour la liberté de manifestation, la considérant comme une expression collective des idées et des opinions [50](#page=50).
* Le Conseil constitutionnel rattache la liberté de réunion à l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 [50](#page=50).
* Le Conseil d'État, notamment dans l'arrêt "Ce benjamin" de 1933, reconnaît et donne toute sa portée à la liberté de réunion, consacrée par les lois des 30 juin 1881 et 28 mars 1907 [50](#page=50).
* Ces libertés sont invocables dans le cadre d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) [50](#page=50).
### 7.2 La liberté de réunion
La liberté de réunion est un droit fondamental et ne doit pas faire l'objet d'une interprétation restrictive. Elle est considérée comme une liberté individuelle exercée collectivement [50](#page=50).
#### 7.2.1 Champ d'application
* Protège les réunions pacifiques, qu'elles soient intérieures, extérieures ou en ligne [50](#page=50).
* Le droit français distingue entre réunion (intérieure) et manifestation (extérieure) [50](#page=50).
* Peut prendre de nombreuses formes: protestations, défilés, etc. [50](#page=50).
* Peut être statistique ou mobile [50](#page=50).
#### 7.2.2 Définition et distinction
* Selon le commissaire du gouvernement Michel dans l'affaire CE Benjamin une réunion est un "mouvement momentané formé en vu d’entendre l’exposé d’idée ou d’opinion ou de se concerter pour la défense d’intérêt" [50](#page=50).
* La réunion se distingue d'une association qui nécessite un lien permanent [50](#page=50).
* Il existe une distinction entre réunion privée et publique [50](#page=50):
* **Réunion privée**: les participants sont invités nominativement et personnellement [50](#page=50).
* **Réunion publique**: se tient sans invitation spécifique. Un lieu privé peut accueillir une réunion publique [50](#page=50).
#### 7.2.3 Cadre législatif
* Les réunions publiques sont libres sans déclaration préalable ni autorisation, conformément à la loi de 1881. Les lois de 1881 et 1907 ne définissent pas explicitement la liberté de réunion mais encadrent son exercice [50](#page=50).
### 7.3 La liberté de manifestation
La liberté de manifestation est intrinsèquement liée à la liberté de réunion et implique une expression collective des idées et opinions. Elle se déroule sur la voie publique [50](#page=50).
#### 7.3.1 Définition
* La Cour de cassation, dans un arrêt de 2016, définit une manifestation comme "tout rassemblement statique ou mobile sur la voie publique sur un groupe organisé de personne pour exprimer un point ou une volonté commune" [51](#page=51).
#### 7.3.2 Cadre législatif
* Les cortèges, défilés et rassemblements de personnes, ainsi que toutes manifestations sur la voie publique, sont soumis à une déclaration préalable [50](#page=50) [51](#page=51).
* Sont dispensées de déclaration les sorties conformes aux usages locaux [51](#page=51).
* Les réunions publiques sont régies par l'article 6 de la loi du 30 juin 1881 [51](#page=51).
#### 7.3.3 Procédure de déclaration
* La déclaration doit être faite à la mairie ou aux mairies concernées, entre trois jours francs minimum et quinze jours francs maximum avant la manifestation [51](#page=51).
* À Paris, la déclaration est adressée à la préfecture de police. Dans les communes avec police d'État, elle est faite au représentant de l'État dans le département [51](#page=51).
* Le maire transmet la déclaration au représentant de l'État dans les vingt-quatre heures, accompagné de son arrêté d'interdiction le cas échéant [51](#page=51).
#### 7.3.4 Interdiction des manifestations
* L'autorité investie des pouvoirs de police peut interdire une manifestation si elle estime qu'elle est de nature à troubler l'ordre public. L'interdiction est notifiée aux signataires de la déclaration [51](#page=51).
* Le représentant de l'État dans le département peut prononcer une interdiction si le maire compétent s'est abstenu de le faire [51](#page=51).
* Le juge administratif (JA) contrôle l'appréciation de la réalité et de l'imminence des troubles à l'ordre public par l'autorité préfectorale. Cette appréciation doit être concrète et in concreto [51](#page=51).
* Il n'est pas possible d'interdire une manifestation sous prétexte qu'elle n'a pas de motif légal [51](#page=51).
* Une interdiction ne doit être prononcée que si d'autres mesures (juridiques, humaines, matérielles) ne suffisent pas à prévenir les troubles à l'ordre public [51](#page=51).
> **Tip:** Le droit de manifestation, bien que fondamental, peut être soumis à des restrictions pour préserver l'ordre public, mais ces restrictions doivent être proportionnées et nécessaires [49](#page=49) [51](#page=51).
> **Example:** La dissolution d'un groupement comme "Les Soulèvements de la Terre" a été jugée disproportionnée par le Conseil d'État, même si des provocations à la violence contre les biens étaient imputables, car il n'y avait pas de preuves de provocations explicites à la violence contre les personnes. De même, une interdiction absolue de manifester pour des raisons sanitaires (comme lors de la pandémie de COVID-19) est soumise au contrôle du juge [49](#page=49) [51](#page=51).
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## Erreurs courantes à éviter
- Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens
- Portez attention aux formules et définitions clés
- Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section
- Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents
Glossary
| Term | Definition |
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| Terme | Définition |
| Droits de l'homme | Concepts considérés comme naturels et imprescriptibles, inhérents à l'être humain et antérieurs à l'État. Ils affirment que les individus naissent et demeurent libres et égaux en droits, le but de toute association politique étant leur conservation. |
| Libertés publiques | Facultés reconnues aux individus, réglementées juridiquement par l'État, qui leur permettent d'exercer certaines activités sans pression extérieure. Elles sont qualifiées de "publiques" en raison de l'origine de la contrainte sociale et non pour les opposer aux libertés privées. |
| Droits fondamentaux | Ensemble de droits qui sont le fondement de toute communauté humaine, considérés comme des valeurs essentielles, indépendamment de la hiérarchie des normes. Ils sont souvent associés à la constitutionnalisation et possèdent des dimensions éthiques et juridiques distinctes du droit naturel. |
| Libertés fondamentales | Terme utilisé en droit positif français, souvent de manière interchangeable avec "référé liberté", faisant référence aux libertés reconnues aux individus pour agir sans contrainte extérieure et sans devoir faire preuve d'héroïsme, impliquant une autonomie vis-à-vis de l'État. |
| Liberté juridique | Capacité reconnue à un individu par l'État d'exercer une activité déterminée à l'abri des pressions extérieures, impliquant un lien entre l'État, le droit, l'individu et son autonomie. |
| Droits absolus | Droits qui ne tolèrent aucune limitation, exception ou dérogation. Ils ne peuvent être suspendus ni restreints, même en cas de circonstances particulières ou d'état d'urgence, comme l'interdiction de la torture. |
| Droits non-absolus | Droits qui peuvent connaître des limitations, des exceptions ou des dérogations. La dérogation, notamment en droit européen, permet une suspension temporaire en cas de situations exceptionnelles, tandis que la limitation peut s'appliquer même sans état d'exception. |
| Droits civils et politiques (droits-libertés) | Catégorie de droits qui garantissent les libertés individuelles et la participation à la vie politique, tels que la liberté d'expression et le droit de vote. Ces droits sont souvent considérés comme directement exigibles devant les tribunaux. |
| Droits économiques et sociaux (droits-créances) | Catégorie de droits qui visent à assurer des conditions de vie dignes et à garantir un certain niveau de bien-être social, tels que le droit au travail et le droit à la sécurité sociale. Leur réalisation nécessite souvent une prestation active de l'État. |
| Dérogation (en droit européen) | Possibilité offerte aux États membres de suspendre temporairement l'application de certains droits et libertés garantis par des traités européens, en réponse à des situations exceptionnelles et dans un cadre strictement encadré. |
| Limitation (d'un droit) | Restriction ou encadrement d'un droit qui peut être appliqué en temps ordinaire, sans qu'il soit nécessaire de recourir à un état d'exception. Elle vise à concilier l'exercice du droit avec d'autres intérêts légitimes. |
| Titulaire des droits de l'homme | L'individu en tant que tel, indépendamment de sa nationalité ou de son statut de citoyen. Les droits de l'homme sont universels et ne sont pas réservés aux citoyens d'un État particulier, à l'exception de certains droits purement politiques comme le droit de vote. |
| État de droit | Système juridique dans lequel les gouvernants et les gouvernés sont soumis au droit, garantissant la protection des droits de l'homme et limitant l'arbitraire du pouvoir. Il implique une prééminence du droit et une garantie juridictionnelle des droits. |
| Traité | Accord international conclu par écrit entre États et régi par le droit international, qu'il soit codifié dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa dénomination particulière. Il a une autorité supérieure à celle des lois nationales dès sa publication, sous réserve de réciprocité. |
| Contrôle de conventionnalité | Faculté reconnue au juge judiciaire, depuis l'arrêt Jacques Vabre, d'écarter une disposition législative nationale qu'il estime contraire à un traité international en vigueur et d'appliquer directement le traité. |
| Suprématie des traités | Principe selon lequel les traités internationaux, dans la hiérarchie des normes, occupent une position supérieure aux lois internes, mais restent inférieurs à la Constitution. |
| Effet direct | Caractéristique d'une norme de droit international qui confère à son destinataire, particulier ou juridiction, le droit de s'en prévaloir directement devant les autorités internes, sans nécessité d'un acte législatif national complémentaire. |
| Invocation (ou invocabilité) | Capacité d'un sujet de droit à se prévaloir d'une disposition d'un traité international pour en revendiquer le bénéfice à l'égard de tiers ou pour écarter l'application d'une disposition législative contraire. |
| Invocation d'exclusion | Situation où un justiciable utilise une disposition d'un traité international pour écarter l'application d'une loi nationale qui lui est contraire et à laquelle le traité est supérieur. |
| Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) | Traité international entré en vigueur en 1976, qui énonce un ensemble de droits civils et politiques fondamentaux, tels que le droit à la vie, l'interdiction de la torture et le droit à un procès équitable. |
| Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) | Traité international qui consacre les droits économiques, sociaux et culturels, tels que le droit à l'éducation, le droit au travail et le droit à un niveau de vie suffisant, dont la réalisation dépend des ressources disponibles de l'État. |
| Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) | Traité international du Conseil de l'Europe, adopté en 1950, qui constitue le texte fondamental de la protection des droits de l'homme en Europe, couvrant principalement les droits civils et politiques. |
| Protocole additionnel | Instrument juridique qui complète ou modifie un traité existant, sans pour autant en altérer la nature fondamentale. Les protocoles à la CEDH ajoutent des droits ou précisent des garanties sans amender la convention elle-même. |
| Charte sociale européenne (CSE) | Traité du Conseil de l'Europe, adopté en 1961 (et révisé en 1996), qui établit un ensemble de droits économiques et sociaux fondamentaux, tels que le droit au travail, à la santé et à l'éducation. |
| Comité européen des droits sociaux | Organe de contrôle de la Charte sociale européenne, chargé d'examiner les rapports présentés par les États sur la mise en œuvre de leurs obligations et de recevoir des réclamations collectives, statuant comme une quasi-juridiction. |
| Bloc de constitutionnalité | Ensemble des normes qui ont valeur constitutionnelle et qui s'imposent à la loi, incluant la Constitution de 1958, le préambule de 1946, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, et la Charte de l'environnement de 2004. |
| Constitution | Loi fondamentale d'un État qui définit l'organisation des pouvoirs publics, les droits et libertés fondamentaux des citoyens, et qui sert de fondement à l'ensemble du système juridique. |
| Contrôle de constitutionnalité | Procédure par laquelle une juridiction vérifie la conformité d'une loi ou d'un acte réglementaire aux dispositions de la Constitution. |
| Loi | Règle générale et impersonnelle, élaborée par le pouvoir législatif, qui fixe les règles relatives aux droits fondamentaux et garantit l'exercice des libertés par les citoyens. |
| Préambule de 1946 | Texte annexé à la Constitution de 1946, qui énonce des principes politiques, économiques et sociaux considérés comme fondamentaux et ayant valeur constitutionnelle. |
| Principes Fondamentaux des Lois de la République (PFRLR) | Principes non codifiés, découverts par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui trouvent leur source dans des lois adoptées sous un régime républicain et appliquées de manière constante. |
| Protocole de réclamation collective | Procédure permettant à des individus ou à des groupes de porter des violations de droits devant un organe international ou quasi-juridictionnel, après avoir épuisé les voies de recours internes. |
| Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) | Dispositif introduit dans le droit français permettant, lors d'une instance judiciaire ou administrative, de contester la conformité d'une disposition législative à des droits et libertés garantis par la Constitution. |
| Voie de fait | Concept élaboré par le Tribunal des conflits, désignant une action de l'administration qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir légal ou qui est exécutée dans des conditions irrégulières, portant atteinte à une liberté fondamentale ou au droit de propriété. |
| Circonstances exceptionnelles | Situation anormale, imprévue et grave qui peut autoriser, dans une certaine mesure et sous contrôle, l'administration à s'écarter temporairement de règles de droit commun pour assurer la continuité des services publics et la sauvegarde de l'ordre public. |
| Référé liberté | Procédure d'urgence devant le juge administratif visant à obtenir la suspension ou l'annulation d'une décision administrative portant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, requérant une intervention rapide pour sauvegarder le droit concerné. |
| Liberté fondamentale | Droit intrinsèque et inaliénable de la personne humaine, reconnu par le droit national et international, et dont la protection constitue un objectif primordial des régimes démocratiques, pouvant faire l'objet de restrictions dans des conditions très strictes. |
| État d'urgence | Régime d'exception législatif déclaré par décret en conseil des ministres, permettant de renforcer les pouvoirs des autorités civiles et de restreindre certaines libertés publiques en cas de péril imminent menaçant gravement l'ordre public ou en cas de calamité publique. |
| État d'urgence sanitaire | Régime d'exception temporaire, fondé sur le code de la santé publique, activé en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril la santé de la population, permettant la prise de mesures restrictives pour garantir la santé publique. |
| Pouvoirs exceptionnels (Art. 16) | Pouvoir propre du chef de l'État lui permettant d'adopter toute mesure législative ou réglementaire nécessaire au bon fonctionnement des pouvoirs publics lorsque les institutions, l'indépendance ou l'intégrité de la nation, ou ses engagements internationaux sont gravement menacés et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics est interrompu. |
| Police administrative | Activité de service public visant à prévenir les atteintes à l'ordre public et à la sécurité publique, par le biais d'interdictions, d'obligations ou de sanctions, dont les mesures doivent être adaptées et proportionnées aux risques. |
| Police judiciaire | Activité visant à rechercher les infractions pénales, à en identifier les auteurs et à recueillir les preuves nécessaires à leur jugement, intervenant généralement après la commission d'une infraction. |
| Loi SILT (Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme) | Loi qui a intégré dans le droit commun certaines mesures issues de l'état d'urgence, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, avec l'objectif de pérenniser des dispositifs préventifs et de sécurité tout en renforçant les contrôles parlementaires. |
| Assignation à résidence | Mesure de police administrative privant une personne de sa liberté de circulation, la contraignant à demeurer dans un lieu déterminé, souvent utilisée dans le cadre de régimes d'exception pour prévenir des menaces graves à la sécurité publique. |
| Droit à la liberté et à la sûreté | Ce droit fondamental, consacré par l'article 5 de la CEDH et l'article 66 de la Constitution française, garantit que nul ne peut être privé de sa liberté de manière arbitraire et doit être détenu conformément aux formes prescrites par la loi, protégeant ainsi l'individu contre les abus de pouvoir étatique. |
| Privation de liberté | Il s'agit d'une situation où une personne est soumise à une contrainte physique importante, impliquant un enfermement dans un espace restreint pendant une durée non négligeable, et où l'individu ne peut valablement consentir à cette mesure, indépendamment de sa qualification en droit interne. |
| Restriction de liberté de circulation | Cette notion se distingue de la privation de liberté par une différence de degré ou d'intensité, et non de nature. Elle concerne des limitations imposées aux mouvements d'une personne, comme un couvre-feu ou des interdictions de fréquenter certains lieux, sans pour autant qu'elle soit privée de sa liberté physique fondamentale. |
| Détention provisoire | Mesure de contrainte exceptionnelle prise à l'encontre d'une personne mise en examen, lorsque les obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence ne suffisent pas à atteindre les objectifs de la procédure pénale, garantissant ainsi la présomption d'innocence avant condamnation. |
| Garde à vue | Il s'agit d'une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous contrôle judiciaire, maintenant une personne à la disposition des enquêteurs dès lors qu'il existe des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir commis un crime ou un délit passible d'emprisonnement. |
| Notion autonome (CEDH) | Terme utilisé par la Cour européenne des droits de l'homme pour qualifier des notions clés de la Convention, dont l'interprétation est indépendante des qualifications internes des États membres. Cette approche permet une application uniforme du droit conventionnel, notamment pour la notion de "privation de liberté". |
| Critère objectif (privation de liberté) | Se rapporte à l'enfermement d'une personne dans un espace restreint pendant une période de temps significative, indépendamment de sa volonté, comme élément déterminant pour établir une privation de liberté au sens de l'article 5 de la CEDH. |
| Critère subjectif (privation de liberté) | Se réfère à l'absence de consentement valable de la personne à son internement. Une personne ne peut être considérée comme privée de sa liberté si elle a valablement accepté sa mise en détention ou si elle est juridiquement incapable de s'y opposer ou d'y consentir. |
| Prééminence du droit | Principe fondamental selon lequel toute action ou décision de l'État, y compris la privation de liberté, doit être conforme au droit et aux normes juridiques supérieures, garantissant ainsi que les exceptions à la liberté soient interprétées strictement et appliquées avec rigueur. |
| Sécurité juridique | Implique que toute mesure privant une personne de liberté ait une base légale interne claire et prévisible, et que cette législation nationale soit elle-même conforme aux exigences de la Convention européenne des droits de l'homme, assurant ainsi une prévisibilité des conséquences juridiques. |
| Liberté de conscience | La liberté de conscience est le droit de chaque individu d'avoir ou de ne pas avoir de convictions personnelles, qu'elles soient religieuses, philosophiques ou morales, et de pouvoir les changer sans contrainte ni discrimination. |
| Liberté religieuse | La liberté religieuse englobe la liberté de croire ou de ne pas croire, de changer de religion, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites. |
| Liberté d'association | La liberté d'association est le droit fondamental de toute personne de créer et de rejoindre des associations pour la poursuite de buts licites, sans autorisation préalable contraignante, et de participer à leur fonctionnement. |
| Laïcité | La laïcité est un principe constitutionnel qui garantit la neutralité de l'État à l'égard des religions, assure la liberté de conscience et le libre exercice des cultes, et impose l'égalité de tous les citoyens devant la loi, indépendamment de leurs croyances. |
| Manifestation des convictions | La manifestation des convictions, qu'elles soient religieuses ou philosophiques, désigne les actes extérieurs par lesquels une personne exprime ses croyances, que ce soit par le culte, l'enseignement, les pratiques ou les rites, individuellement ou collectivement. |
| Ingérence de l'État | L'ingérence de l'État fait référence à toute intervention des autorités publiques qui limite l'exercice d'un droit fondamental, tel que la liberté de religion ou d'association, et qui doit être prévue par la loi, poursuivre un but légitime et être nécessaire dans une société démocratique. |
| Groupement de fait | Un groupement de fait est une association ou un collectif qui n'a pas fait l'objet d'une déclaration officielle et n'a donc pas acquis la personnalité juridique, ce qui limite sa capacité à agir en justice ou à posséder des biens. |
| Association cultuelle | Une association cultuelle est une association dont l'objet exclusif est de subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte, et qui doit être constituée conformément à la loi de 1901 tout en respectant les dispositions de la loi de 1905. |
| Contrat d'engagement républicain | Le contrat d'engagement républicain est un engagement souscrit par les associations recevant des subventions publiques, qui les oblige à respecter les principes de liberté, d'égalité, de fraternité, de dignité humaine et la neutralité de la République. |
| Neutralité du service public | La neutralité du service public implique que les agents du service public doivent traiter toutes les personnes de manière égale, respecter leur liberté de conscience et s'abstenir de toute manifestation de leurs convictions personnelles dans l'exercice de leurs fonctions. |
| Clause de conscience | Une clause de conscience est une disposition qui permet à un professionnel, notamment dans le domaine médical, de refuser d'accomplir un acte professionnel s'il estime qu'il est contraire à ses convictions personnelles, tout en informant la personne concernée et en l'orientant vers un autre praticien. |
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| Liberté de réunion pacifique | Il s'agit d'un droit fondamental, individuel mais exercé collectivement, qui protège les rassemblements temporaires de personnes visant à exprimer des idées, des opinions ou à se concerter pour la défense d'intérêts communs. Ce droit s'applique aux réunions à l'intérieur, à l'extérieur et en ligne, et ne doit pas faire l'objet d'une interprétation restrictive dans une société démocratique. |
| Liberté de manifestation | Cette liberté, indissociable de la liberté d'opinion et de réunion, concerne spécifiquement les rassemblements statiques ou mobiles sur la voie publique. Elle implique le droit de participer à des cortèges, défilés ou autres regroupements de personnes ayant un objectif commun. Son exercice peut être soumis à des restrictions légales nécessaires pour préserver l'ordre public. |
| Ordre public | Le concept d'ordre public, dans le cadre des libertés de réunion et de manifestation, renvoie à la nécessité de prévenir les troubles graves susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre, à la prévention du crime, ainsi qu'à la protection de la santé, de la morale ou des droits et libertés d'autrui. L'appréciation de son atteinte est souvent in concreto par les autorités judiciaires. |
| Restriction légitime | Les restrictions à la liberté de réunion et de manifestation ne peuvent être imposées que si elles sont prévues par la loi, nécessaires dans une société démocratique, et proportionnées à l'objectif poursuivi. Elles visent à garantir la sécurité nationale, la sûreté publique, la défense de l'ordre, la prévention du crime, ou la protection de la santé, de la morale ou des droits d'autrui. |
| Provocation à la violence contre les biens | Il s'agit d'actes ou de déclarations, explicites ou implicites, qui incitent à causer des dégradations matérielles ou des dommages à des propriétés. Bien que de telles provocations puissent être imputées à un groupement, leur portée et leurs effets réels doivent être mesurés pour déterminer si elles justifient des mesures drastiques comme la dissolution, qui doit rester adaptée, nécessaire et proportionnée. |
| Abus de droit conventionnel (Art. 17 CEDH) | Cet article de la Convention Européenne des Droits de l'Homme interdit à tout État, groupement ou individu de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à détruire les droits ou libertés reconnus dans la Convention, ou à en imposer des limitations plus larges que celles prévues. Il s'applique notamment pour empêcher que les libertés de réunion et de manifestation ne soient utilisées à des fins contraires aux principes de la Convention. |
| Déclaration préalable de manifestation | Pour les manifestations sur la voie publique (cortèges, défilés, rassemblements), une déclaration préalable auprès des autorités locales (mairie ou préfecture) est généralement requise. Ce dispositif permet aux autorités d'évaluer les risques potentiels pour l'ordre public et de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon déroulement de l'événement, tout en respectant le droit de manifester. |