4 - Travail social, la recherche pour la formation.docx

# Les sciences de l'éducation et la méthodologie de la recherche Cette section explore la nature scientifique des sciences de l'éducation, l'articulation entre théories et pratiques, et le processus de recherche en sciences sociales, depuis le sens commun jusqu'à l'enquête empirique. ## 1. Introduction aux sciences de l'éducation ### 1.1 Définir le discours scientifique Le discours scientifique vise à produire des vérités sur les réalités étudiées. Ces vérités sont temporaires et susceptibles d'être critiquées et dépassées par de nouvelles recherches. L'existence des sciences de l'éducation repose sur un discours de nature scientifique. ### 1.2 Distinction entre discours scientifique et sens commun La majorité des discours tenus relèvent du sens commun, qui n'est pas nécessairement scientifique. Un discours scientifique, contrairement à une simple discussion, articule de manière rigoureuse : * **Théories :** Cadres conceptuels pour comprendre un phénomène. * **Méthodes :** Procédures systématiques pour collecter et analyser des données. * **Enquêtes empiriques :** Collecte de données concrètes sur le terrain. > **Tip:** Pour faire de la recherche en sciences sociales, il est crucial de mettre à distance le sens commun pour s'appuyer sur une base théorique et méthodologique solide, validée par des preuves empiriques. ### 1.3 La nature des objets en sciences sociales Les sciences sociales étudient des objets qui sont familiers à la population (par exemple, l'école, la famille). Tout le monde a une opinion sur ces sujets, souvent sans information approfondie. La production d'énoncés scientifiques dans ces domaines consiste à avancer des affirmations dont la validité peut être prouvée, indépendamment du contexte de production ou des opinions individuelles. **Exemple :** Affirmer que "l'école est inégalitaire en fonction des classes sociales des élèves" est un énoncé scientifique s'il est étayé par des preuves empiriques et des analyses méthodologiques rigoureuses, démontrant une corrélation entre le statut socio-économique des parents et la réussite scolaire des enfants. L'école peut ainsi reproduire les structures sociales. ## 2. Les objets des sciences de l'éducation : où apprend-on ? ### 2.1 La définition élargie de l'éducation L'éducation ne se limite pas aux institutions scolaires. Elle est un processus d'insertion dans des relations, souvent non scolaires. Les ethnologues et anthropologues ont montré que l'éducation existe même dans des sociétés dépourvues d'écoles formelles. ### 2.2 Le processus éducatif au-delà des institutions Bien que l'on associe souvent l'éducation à l'école, le processus éducatif est plus vaste. Il englobe ce que font la famille et la société en général. Penser l'éducation uniquement par ses instances (comme l'école) occulte le processus lui-même. > **Tip:** Il est essentiel de resituer le processus éducatif dans un contexte plus global d'interactions humaines. ### 2.3 L'apprentissage permanent et la socialisation On apprend constamment, plus ou moins consciemment, à travers toutes les interactions dans lesquelles nous nous inscrivons. * **Apprentissage par l'expérience relationnelle :** L'amitié, par exemple, nous éduque sur la manière de créer et de maintenir des relations. * **Socialisation :** Il s'agit de l'ensemble des apprentissages, conscients ou inconscients, tout au long de la vie, qui construisent les individus par interactions. Cela inclut l'adoption de manières de marcher, de parler, d'aimer, etc., qui peuvent varier selon les catégories sociales. Ces mécanismes sont souvent intégrés et effectués sans réflexion consciente. ## 3. Faire de la recherche : recherche et action, recherche pour l'action ### 3.1 La distinction entre décrire et prescrire * **Décrire :** La science a pour objectif de décrire la réalité telle qu'elle est, en produisant des constats vérifiables. Par exemple, observer une inégalité dans la répartition des tâches ménagères au sein des couples hétérosexuels. * **Prescrire :** Proposer une transformation de l'ordre social ("Je veux que ce soit comme ça") relève de l'action ou de la politique, et non de la science. Les sciences sociales ne peuvent pas prouver ce qui est souhaitable ou non. > **Tip:** La science cherche à comprendre et à expliquer le monde social, pas à imposer des normes ou des valeurs. ### 3.2 La science dans la cité et son autonomie Une science est d'autant plus essentielle et pertinente pour l'action qu'elle est autonome, traitant ses problèmes sans interférences extérieures et dans la transparence. Le partage des résultats, même provisoires, via des revues à comité de lecture, est crucial. ### 3.3 Expertise et recherche : deux démarches distinctes * **Expertise :** Fournit des connaissances pratiques répondant à des interrogations politiques ou institutionnelles immédiates. Elle aide les acteurs (État, entreprises, institutions) à mener à bien leurs activités. * **Recherche fondamentale :** Cherche à produire des lois générales permettant une connaissance fondamentale des sociétés humaines. Ces travaux répondent à des interrogations universelles mais diffuses sur l'humanité, et ne correspondent pas nécessairement à une demande politique immédiate. Elle nécessite de rompre avec les demandes sociales immédiates pour produire un savoir à première vue "inutile" pour l'action politique courante. La recherche en éducation, par exemple, ne se limite pas à évaluer quelles méthodes pédagogiques sont les plus efficaces, mais peut explorer des questions plus larges sur les difficultés d'accès à la formation pour les publics fragiles. ### 3.4 La recherche scientifique et l'intervention sociale La recherche scientifique produit des constats sur l'existant (vrai ou faux). L'intervention sociale et la politique visent la transformation sociale et définissent ce qui est souhaitable (bien ou mal). ## 4. La recherche à partir d'une commande ### 4.1 Du discours commun à la question de recherche Il est essentiel de distinguer le discours commun (représentations, influences sociales) du discours de recherche (travaux scientifiques, revues). 1. **La question sociale :** Tout phénomène social peut être un objet d'étude. On part d'une question sociale qui a un intérêt social. 2. **La question de recherche :** La démarche scientifique consiste ensuite à transformer cette question sociale en une question de recherche propre au domaine scientifique. Cela implique de s'appuyer sur les travaux scientifiques existants pour construire une connaissance pertinente. > **Tip:** La "rupture épistémologique" est le passage du sens commun au discours scientifique, marqué par l'adoption d'une démarche de recherche rigoureuse. ### 4.2 L'importance du terrain en sciences sociales Aucune approche en sciences sociales ne peut se passer d'aller sur le terrain pour enquêter auprès des populations et collecter des données empiriques. Le processus de recherche sur le terrain implique généralement : * Observation * Questionnaires * Traitement des données * Analyse des résultats **Exemple d'une question sociale transformée en question de recherche :** * **Question sociale :** Les difficultés rencontrées par les publics fragiles pour entrer et se maintenir en formation et sur les terrains professionnels. * **Question de recherche (plus spécifique) :** Les rapports aux savoirs et aux dispositifs de formation des étudiants en travail social. Cette question de recherche examine la confrontation entre les étudiants (individus construits socialement avec des histoires personnelles, familiales et scolaires uniques) et le système de formation (savoirs, enseignants, horaires). Il faut considérer les étudiants en difficulté dans un système de formation de manière relative, en analysant la relation spécifique "étudiant-système éducatif". ## 5. La formation en travail social ### 5.1 Un secteur en crise d'attractivité et en augmentation des taux de réussite Malgré une baisse continue des effectifs inscrits dans les formations sociales depuis les années 2010, le nombre de diplômés a augmenté. Cette augmentation s'explique par une forte hausse du taux de réussite. ### 5.2 La dualité de la formation en travail social La formation en travail social se caractérise par : * **La "forme scolaire" :** Un temps et un espace dédiés, avec des règles spécifiques. Les savoirs acquis ici ne sont pas toujours directement investissables dans des cas pratiques immédiats ; on "apprend pour apprendre". * **Les périodes de stages :** Elles visent l'acquisition de "savoirs pratiques", tels qu'apprendre à parler en parlant, où l'on acquiert des compétences utiles à la pratique professionnelle. Une distinction nette est souvent faite par les étudiants entre ces deux espaces d'apprentissage, avec un sentiment d'apprendre dans les deux, mais plus particulièrement en stage. Il peut exister une déconnexion entre les savoirs théoriques et les savoirs pratiques. ### 5.3 Les savoirs à visée professionnelle * **L'idéologie du "vécu" et de l'apprentissage "sur le tas" :** Malgré l'éloignement du bénévolat d'origine, ces idéologies persistent. * **Constitution des connaissances :** Les connaissances qui organisent les pratiques sont un assemblage de savoirs issus de disciplines variées (psychologie, sociologie, économie, anthropologie, psychanalyse, sciences de gestion). * **Dialectique de reconfiguration et de résistance :** Les métiers du social et leurs formations évoluent constamment, marqués par la volonté de les reconfigurer et les résistances des corporations établies qui cherchent à conserver leurs spécificités. ### 5.4 Les étudiants en travail social * **Surreprésentation des origines populaires :** Comparés à d'autres filières de l'enseignement supérieur, les étudiants en travail social sont plus souvent issus de milieux populaires. L'égalité des parcours scolaires selon les origines sociales est remise en question. Les étudiants de milieux populaires peuvent avoir plus de difficultés avec l'abstraction et l'apprentissage "pour apprendre", privilégiant les apprentissages liés à leur utilité immédiate. * **Forte présence féminine :** Le secteur est surinvesti par les femmes, potentiellement en raison d'une socialisation différenciée des genres qui prépare les femmes à prendre soin des autres. * **Conversion de la volonté initiale en compétences :** L'intention d' "aider les autres" doit être convertie en compétences professionnelles étayées par un corpus de connaissances pluridisciplinaires. Il existe une tendance à la "naturalisation des compétences", où l'étudiant considère que son être ("ce que je suis") est suffisant pour exercer la fonction. Or, les futurs travailleurs sociaux doivent devenir des professionnels porteurs de techniques adossées à des savoirs. ### 5.5 Une formation saisie différemment par les étudiants Les étudiants appréhendent leur formation de diverses manières : * **Les résolues professionnelles :** Souvent les plus âgées, elles ont un parcours secondaire général plus développé, ont plus redoublé, sont issues de familles en mobilité sociale ascendante et occupent des emplois dans la fonction publique. Elles sont davantage focalisées sur l'obtention d'un métier. * **Les conformes scolairement :** Plus aisées socialement, elles se laissent davantage "travailler" par les dispositifs pédagogiques. Elles recherchent également la socialisation durant cette formation supérieure et ont moins comme objectif premier l'obtention d'un métier. * **Les hésitantes à la marge :** Cette catégorie se caractérise par une position plus incertaine face à la formation et aux objectifs professionnels. --- # Le processus éducatif au-delà de l'école Ce sujet explore l'idée que l'éducation ne se limite pas aux institutions scolaires mais englobe toutes les interactions sociales tout au long de la vie, mettant en évidence la socialisation comme un processus d'apprentissage façonnant les individus. ### 2.1 Les sciences de l'éducation et la définition de l'apprentissage Les sciences de l'éducation visent à articuler théories, méthodes et enquêtes empiriques pour prouver ce qu'elles avancent. Contrairement au discours de sens commun, le discours scientifique s'appuie sur des preuves, des faits vérifiés et des enquêtes. Il s'agit de produire des énoncés dont la validité ne dépend pas du contexte ou des acteurs, mais de leur vérifiabilité. #### 2.1.1 Où apprend-on ? L'éducation ne se limite pas à l'école. Elle procède par insertion dans des relations, souvent non scolaires. L'apprentissage se déroule dans l'ensemble des interactions où un individu s'inscrit, de manière plus ou moins consciente. **Exemple:** L'amitié nous éduque sur la manière de créer et de mettre fin à des relations, un apprentissage basé sur l'expérience. La socialisation est définie comme la somme des apprentissages conscients ou inconscients tout au long de la vie, un processus qui construit les individus par le biais des interactions. Ces mécanismes sont intégrés et s'effectuent sans y penser, comme la manière de marcher ou de parler, qui peut varier selon les catégories sociales. #### 2.1.2 La distinction entre recherche et action Il est crucial de distinguer la recherche scientifique, dont le but est de décrire (dire ce qui est), de l'action (prescrire, proposer une transformation de l'ordre social). L'intervention sociale et la politique poursuivent des objectifs de transformation en définissant ce qui est souhaitable. > **Tip:** La recherche scientifique produit des constats vérifiables, tandis que l'intervention sociale vise des transformations basées sur des jugements de valeur (bien/mal, souhaitable/indésirable). La recherche scientifique doit être autonome, transparente et partager ses résultats. L'expertise, bien qu'utile pour une action immédiate, diffère de la science fondamentale qui vise à produire des lois générales pour une compréhension approfondie des sociétés humaines. #### 2.1.3 Faire de la recherche à partir d'une commande La démarche de recherche débute par une "question sociale" qui émane d'intérêts sociaux. Pour devenir une "question de recherche", elle doit passer par une rupture épistémologique, c'est-à-dire un passage du sens commun au discours scientifique. Cela implique de se familiariser avec les travaux scientifiques existants dans le domaine concerné. > **Tip:** La rupture épistémologique est le passage essentiel du sens commun, souvent basé sur des représentations et des contextes sociaux, vers un discours de recherche ancré dans des travaux scientifiques et des données empiriques. Les sciences sociales nécessitent une approche qui inclut le terrain et la collecte de données empiriques par des méthodes comme l'observation ou les questionnaires, suivies d'un traitement et d'une analyse des résultats. ### 2.2 La formation en travail social : un cas d'étude Les difficultés rencontrées par les publics fragiles pour entrer ou se maintenir en formation professionnelle et sur les terrains professionnels constituent une "question sociale" pertinente pour la recherche en éducation et en travail social. Il s'agit d'étudier la confrontation entre les étudiants, issus d'histoires familiales et sociales spécifiques, et le système de formation. #### 2.2.1 La formation en travail social La formation en travail social combine une "forme scolaire" (temps, espace et règles dédiés, apprentissages moins directement investissables dans la pratique immédiate) et des périodes de stages axés sur l'acquisition de savoirs pratiques. Il existe une distinction nette perçue par les étudiants entre ces deux espaces, avec une impression d'apprentissage souvent plus marquée en stage. Il y a une déconnexion observée entre les savoirs théoriques, mieux structurés par des programmes, et les savoirs pratiques, plus informels. Les savoirs à visée professionnelle sont un assemblage de connaissances issues de diverses disciplines (psychologie, sociologie, économie, anthropologie, psychanalyse, gestion). La formation et les métiers du travail social évoluent dans une dialectique entre la volonté de reconfiguration et les résistances des professions établies. L'apprentissage sur le terrain complète les apprentissages scolaires. #### 2.2.2 Les étudiants en travail social Les étudiants en travail social présentent une surreprésentation des origines populaires par rapport à d'autres filières de l'enseignement supérieur. Cette filière est également fortement investie par les femmes, potentiellement en raison d'une socialisation différenciée des genres. La conversion de la volonté initiale d'aider les autres en compétences professionnelles repose sur un corpus de connaissances pluridisciplinaires. Cependant, une "naturalisation des compétences" peut survenir, où les étudiants considèrent que leur être est suffisant pour la fonction, alors qu'une professionnalisation requiert des techniques adossées à des savoirs. La formation est saisie différemment par les étudiants : * **Les résolues professionnelles:** Souvent plus âgées, issues d'une filière secondaire générale, avec des redoublements, et provenant de familles en mobilité sociale ascendante. Elles ont davantage poursuivi des études supérieures et exercent dans la fonction publique. * **Les conformes scolairement:** Capables de se laisser davantage "travailler" par les dispositifs pédagogiques et professionnels. Elles sont souvent plus aisées socialement, recherchent une socialisation lors de la formation et visent moins exclusivement l'obtention d'un métier à l'issue. * **Les hésitantes à la marge:** Ce groupe représente ceux qui sont moins clairement définis dans les deux catégories précédentes. --- # La formation en travail social : enjeux et caractéristiques Cette section explore les spécificités de la formation en travail social, en détaillant la dichotomie entre la forme scolaire et les stages, la nature des savoirs pratiques, et les défis liés à l'attractivité du secteur, tout en analysant le profil des étudiants et la transformation des motivations initiales en compétences professionnelles. ### 3.1 La nature de la formation en travail social La formation en travail social se caractérise par une double modalité d'apprentissage : * **La forme scolaire :** Il s'agit d'un temps et d'un espace dédiés, régis par des règles spécifiques. L'objectif n'est pas l'acquisition immédiate de savoirs directement applicables sur le terrain, mais plutôt un apprentissage visant à acquérir des connaissances pour comprendre et analyser. La pertinence de ces savoirs ne se mesure pas à leur utilité directe, mais à leur capacité à construire un socle de connaissances théoriques. * **Les stages :** Ces périodes sont consacrées à l'acquisition majoritaire de « savoirs pratiques », similaires à l'apprentissage par l'expérience. L'idée est d'apprendre en faisant, et ces savoirs deviendront utiles dans la pratique professionnelle ultérieure. Les étudiants perçoivent souvent une distinction nette entre ces deux espaces d'apprentissage, ressentant un apprentissage significatif dans les deux, mais une immersion plus profonde et un apprentissage perçu comme plus conséquent durant les stages. Cette distinction met en lumière une potentielle déconnexion entre les savoirs théoriques issus des programmes et les savoirs pratiques acquis sur le terrain. > **Tip:** Il est essentiel de comprendre que la formation en travail social vise à intégrer ces deux dimensions, théorique et pratique, pour former des professionnels complets. La difficulté réside souvent dans la fluidité de ce passage et la reconnaissance de la valeur de chaque type de savoir. ### 3.2 Les savoirs à visée professionnelle Malgré l'évolution du secteur et un éloignement progressif du bénévolat d'origine, l'idéologie du « vécu » et la foi en l'apprentissage sur le tas demeurent tenaces. Les connaissances qui structurent la pratique professionnelle en travail social forment un ensemble hétérogène, un véritable « puzzle » assemblé à partir de fragments de savoirs reconnus issus de diverses disciplines : * **Disciplines fondamentales :** psychologie, sociologie, économie, anthropologie, psychanalyse. * **Disciplines appliquées :** sciences et techniques de gestion, qui ont émergé plus récemment, vers la fin des années 1990. Ces formations, et les métiers qui en découlent, évoluent dans une dynamique constante entre la volonté de les réformer et la résistance des professions établies qui cherchent à préserver leurs spécificités. L'apprentissage sur le terrain vient compléter et enrichir les apprentissages scolaires, formant ainsi une compétence pluridisciplinaire. Ces formations sont par nature en mutation régulière pour s'adapter aux évolutions sociales. ### 3.3 Les enjeux d'attractivité du secteur Le secteur du travail social fait face à une crise d'attractivité notable. Les effectifs totaux d'inscrits dans les formations sociales ont connu une baisse continue depuis le début des années 2010, enregistrant une diminution de 17% entre 2010 et 2020, et de 4% entre 2019 et 2020. Cependant, paradoxalement, cette baisse d'effectifs n'a pas eu d'impact négatif sur le nombre de diplômés. Au contraire, celui-ci a augmenté grâce à une forte hausse du taux de réussite, qui atteignait 96% en 2020, soit 10 points de plus qu'en 2019. > **Tip:** Cette augmentation du taux de réussite malgré une baisse des effectifs peut s'expliquer par divers facteurs, tels qu'une meilleure sélection à l'entrée, des dispositifs de soutien renforcés pour les étudiants en difficulté, ou encore une réorientation des parcours pour maximiser les chances de diplomation. ### 3.4 Le profil des étudiants en travail social Les étudiants inscrits en formation de travail social présentent un profil sociologique distinctif : * **Surreprésentation d'origines populaires :** Comparativement à d'autres filières de l'enseignement supérieur, le travail social attire davantage d'étudiants issus de milieux populaires. Ceci soulève la question de l'égalité des parcours scolaires selon les origines sociales, et la difficulté pour certains élèves de milieux populaires à aborder l'abstraction et à apprendre « pour apprendre », étant plus habitués à des apprentissages concrets et utilitaristes. * **Secteur majoritairement féminin :** Le travail social est fortement investi par les femmes. Cela peut s'expliquer par une socialisation différenciée selon les genres, où les femmes sont davantage préparées socialement à prendre soin des autres, une disposition qui se reflète dans les métiers du social. Il ne s'agit pas d'une prédisposition génétique mais d'un apprentissage social. ### 3.5 La conversion des volontés initiales en compétences professionnelles Un enjeu majeur de la formation en travail social réside dans la conversion de la volonté initiale d'« aider les autres » en compétences professionnelles solides, étayées par un corpus de connaissances pluridisciplinaires. Il existe une tendance à la « naturalisation » des compétences, où les étudiants peuvent considérer que leur personnalité ou leurs dispositions intrinsèques suffisent à exercer la fonction. Ce positionnement pose un problème car les futurs travailleurs sociaux, pour s'investir dans une carrière centrée sur l'accompagnement d'autrui, doivent devenir des professionnels maîtrisant des techniques et s'appuyant sur un savoir théorique et méthodologique rigoureux. > **Example:** Un étudiant ayant une forte empathie naturelle doit apprendre, durant sa formation, à canaliser cette empathie, à la professionnaliser par des outils d'écoute active, d'analyse systémique, et une connaissance des dispositifs d'aide, plutôt que de se fier uniquement à son sentiment personnel. ### 3.6 Une formation saisie différemment par les étudiants L'analyse des étudiants révèle différentes manières d'appréhender la formation : * **Les résolues professionnelles :** Ce groupe, représentant environ un tiers des enquêtés, est généralement plus âgé, a souvent suivi une voie secondaire générale, et a davantage redoublé. Ils sont majoritairement issus de familles en mobilité sociale ascendante, ont poursuivi leurs études au-delà du baccalauréat, et occupent des emplois dans la fonction publique. Leur démarche est clairement orientée vers l'obtention d'un métier. * **Les conformes scolairement :** Ce quart de la population étudiante se distingue par une plus grande réceptivité aux dispositifs pédagogiques et professionnels. Ils sont issus de milieux socialement plus aisés, cherchent une forme de socialisation par cette formation supérieure, et l'objectif professionnel immédiat est moins prégnant. Ils abordent la formation avec une aisance dans les cadres académiques classiques. * **Les hésitantes à la marge :** Ce groupe regroupe les étudiants qui naviguent entre ces deux pôles, manifestant parfois des incertitudes quant à leur parcours et leurs aspirations professionnelles. Ces distinctions illustrent la diversité des parcours, des motivations et des attentes des étudiants en formation de travail social, soulignant la complexité de construire un parcours de formation homogène et adapté à tous. --- # Les étudiants en formation de travail social : profils et parcours Voici le résumé de l'étude concernant les profils et parcours des étudiants en formation de travail social. ## 4. Les étudiants en formation de travail social : profils et parcours Cette section explore la diversité des manières dont les étudiants abordent leur formation en travail social, en identifiant des profils distincts et en soulignant la composition sociodémographique de cette population étudiante. ### 4.1 Comprendre la formation en travail social La formation en travail social se caractérise par une dualité entre la "forme scolaire" et l'acquisition de savoirs pratiques durant les stages. * **La forme scolaire :** Il s'agit d'un temps et d'un espace dédiés, régis par des règles spécifiques. L'apprentissage n'est pas toujours directement transposable dans des cas pratiques immédiats, la pertinence des savoirs ne se jugeant pas uniquement par leur utilité directe. * **Les stages :** Ces périodes sont consacrées majoritairement à l'acquisition de savoirs pratiques, souvent décrits comme un apprentissage "sur le tas", où l'on apprend par l'expérience. La tendance est à l'augmentation des heures de formation pratique. Les étudiants perçoivent une distinction nette entre ces deux espaces d'apprentissage, ressentant un apprentissage dans les deux, mais davantage en stage. Il existe une déconnexion perçue entre les savoirs théoriques (souvent mieux structurés par des programmes) et les savoirs pratiques, qui sont plus difficiles à cerner et distincts. ### 4.2 Savoirs à visée professionnelle Les connaissances qui sous-tendent les pratiques professionnelles en travail social forment un ensemble complexe. * **Nature pluridisciplinaire des savoirs :** Ces connaissances sont souvent une combinaison de savoirs issus de diverses disciplines telles que la psychologie, la sociologie, l'économie, l'anthropologie et la psychanalyse. S'y ajoutent les sciences et techniques de gestion qui ont émergé plus récemment. * **Dialectique entre innovation et résistance :** Les métiers du travail social et leurs formations évoluent dans une dynamique constante entre la volonté de reconfiguration et les résistances des corps professionnels établis qui cherchent à préserver leurs spécificités. * **Conversion de la volonté initiale :** L'intention initiale d' "aider les autres" doit être transformée en compétences professionnelles étayées par un corpus de connaissances pluridisciplinaires. ### 4.3 Les étudiants : profils et parcours La population étudiante en travail social présente des caractéristiques sociodémographiques spécifiques et des approches divergentes de leur formation. #### 4.3.1 Composition sociodémographique * **Surreprésentation des origines populaires :** Par rapport à d'autres filières de l'enseignement supérieur, on observe une surreprésentation des étudiants issus de milieux populaires. Cela est lié aux inégalités dans les parcours scolaires en fonction des origines sociales, certains étudiants de milieux populaires ayant une difficulté à appréhender les apprentissages abstraits. * **Secteur fortement investi par les femmes :** Une socialisation différenciée selon les genres peut expliquer cette prédominance féminine, les femmes étant souvent socialisées à prendre soin des autres, ce qui peut s'orienter vers des professions sociales. #### 4.3.2 La naturalisation des compétences Les étudiants tendent à considérer que leurs qualités personnelles et leur identité sont suffisantes pour exercer la fonction de travailleur social. Cette "naturalisation des compétences" pose un problème majeur, car les futurs travailleurs sociaux doivent devenir des professionnels dotés de techniques s'appuyant sur un savoir académique solide. #### 4.3.3 La formation saisie différemment Les étudiants appréhendent leur formation de manières distinctes, permettant de dégager plusieurs profils : * **Les résolues professionnelles :** Ce groupe, représentant environ un tiers des enquêtés, est souvent constitué des étudiants les plus âgés de leur promotion. Ils ont généralement suivi une série secondaire générale, ont connu des redoublements et sont majoritairement issus de familles en mobilité sociale ascendante ayant poursuivi des études supérieures. Ils occupent souvent des emplois dans la fonction publique. * **Les conformes scolairement :** Ce quart de la population étudiante se distingue par sa capacité à se laisser davantage influencer par les dispositifs pédagogiques et professionnels. On y trouve des étudiantes socialement plus aisées qui cherchent également une socialisation durant leur formation supérieure et sont moins focalisées sur l'obtention d'un métier immédiat à l'issue de celle-ci. * **Les hésitantes à la marge :** Ce profil représente les étudiants qui abordent leur formation avec plus d'incertitude ou de manière moins engagée, se situant en périphérie des dynamiques de formation plus structurées. > **Tip:** Il est crucial de comprendre que les étudiants ne sont pas des individus homogènes ; leurs parcours de vie, leurs origines sociales et leurs motivations façonnent leur expérience de formation. > > **Tip:** La distinction entre "savoirs pratiques" et "savoirs théoriques" est centrale pour appréhender les défis de la formation en travail social et les perceptions des étudiants. > > **Example:** Un étudiant issu d'un milieu où l'on apprend par l'action directe pourrait trouver plus difficile d'intégrer des concepts théoriques abstraits enseignés en cours magistraux, comparativement à un étudiant dont le parcours scolaire a davantage valorisé l'abstraction. --- ## Erreurs courantes à éviter - Révisez tous les sujets en profondeur avant les examens - Portez attention aux formules et définitions clés - Pratiquez avec les exemples fournis dans chaque section - Ne mémorisez pas sans comprendre les concepts sous-jacents

| Term | Definition | |------|------------| | Sciences de l’éducation | Domaine scientifique qui articule théories, méthodes et enquêtes empiriques pour étudier les processus éducatifs, visant à produire des vérités sur les réalités de l'éducation. | | Discours scientifique | Type de discours qui s'appuie sur l'articulation de théories, de méthodes rigoureuses et d'enquêtes empiriques pour établir des énoncés dont la validité peut être prouvée. | | Sens commun | Ensemble des croyances, opinions et représentations partagées par la majorité d'une population, souvent basé sur l'expérience vécue et l'intuition plutôt que sur une démarche scientifique. | | Rupture épistémologique | Changement fondamental dans la manière de penser et de construire la connaissance, passant d'une approche basée sur le sens commun à une approche scientifique rigoureuse et méthodique. | | Socialisation | Processus continu d'apprentissage, conscient ou inconscient, par lequel un individu intègre les normes, valeurs et comportements de sa société, façonnant ainsi son identité et sa place dans le groupe. | | Recherche et action | Distinction entre la recherche scientifique qui vise à décrire et comprendre le monde social, et l'action sociale ou politique qui cherche à le transformer pour atteindre des objectifs souhaitables. | | Prescription | Dans le contexte scientifique, l'acte de proposer ou d'ordonner une transformation de l'ordre social, ce qui sort du cadre descriptif et vérifiable de la science. | | Expertise | Connaissance pratique et spécifique appliquée à des situations concrètes, souvent demandée par des institutions ou des groupes pour les aider dans leurs activités, distincte de la recherche fondamentale. | | Question sociale | Problématique ou phénomène observé dans la société qui suscite un intérêt collectif et peut servir de point de départ pour une démarche de recherche scientifique. | | Question de recherche | Formulation précise d'un problème scientifique découlant d'une question sociale, qui oriente la collecte et l'analyse des données dans le cadre d'une enquête empirique. | | Terrain | Phase de la recherche en sciences sociales où l'on se rend sur le lieu où se déroule le phénomène étudié pour collecter des données empiriques par des méthodes telles que l'observation ou les questionnaires. | | Forme scolaire | Cadre d'apprentissage caractérisé par un temps et un espace dédiés, ainsi que des règles spécifiques, propre aux institutions d'enseignement formel comme l'école ou l'université. | | Savoirs pratiques | Connaissances et compétences acquises par l'expérience directe, l'observation et la répétition, souvent développées lors de stages ou d'apprentissages sur le tas, par opposition aux savoirs théoriques. | | Idéologie du vécu | Croyance ou système de pensée qui valorise l'expérience personnelle et l'apprentissage direct comme source principale de connaissance et de compétence. | | Apprentissage sur le tas | Méthode d'acquisition de compétences et de savoirs par la pratique directe et l'expérience sur le lieu de travail, souvent en complément de formations théoriques. | | Capacités d'abstraction | Aptitude cognitive à penser de manière conceptuelle, à manipuler des idées et des symboles sans référence directe à la réalité concrète, essentielle pour comprendre des savoirs théoriques. | | Naturalisation des compétences | Tendance à considérer que les compétences nécessaires à l'exercice d'un métier découlent naturellement de la personnalité ou de l'être de l'individu, sans nécessiter un apprentissage formel ou une réflexion approfondie. | | Professionnel | Individu qui exerce une activité ou un métier en y consacrant la majeure partie de son temps, possédant les techniques et les savoirs requis pour cette profession. | | Dispositifs pédagogiques | Ensemble des méthodes, outils, supports et stratégies utilisés par les enseignants pour faciliter l'apprentissage des étudiants. | | Mobilité sociale ascendante | Changement de position sociale d'un individu ou d'une famille vers un statut socio-économique plus élevé que celui de leurs parents. |